« Demain vous allez en Israël », dit-on à cet homme en poste au Centre de civilisation française à l'université de Varsovie, Outre la brutalité de l'annonce, beaucoup de tumulte s'exprime dans la tête de Jean Soler, né en 1933 en pays pyrénéen catalan. Israël c'est, juste après la guerre des Six Jours, en 1968, le conflit. Le départ de Pologne vaut pour de très sombres souvenirs dans un pays resté antisémite, même après la Shoah.
C'est aussi la taraudante réflexion sur le monothéisme et la foi. « J'ai été un enfant pieux, pour qui la foi était aussi naturelle que l'air ou l'eau. » Mais il a un jour « condamné Dieu par contumace » et continué seul son chemin, l'enfant né avec un pied mal formé, « tordu dans le ventre de sa mère ».
En Israël, Jean Soler rencontre Ben Gourion dans son kibboutz du Néguev et lui adresse de sévères critiques sur la politique de son pays. Il en profite pour oser à Tel Aviv une conférence très dérangeante sur les interdits alimentaires juifs.
En Iran, il rencontre, outre une colossale statue de Darius et une séduisante Farah Diba, le Premier ministre Amir Abbas Hoveyda, avec qui il conçoit un gigantesque lycée français. Toujours féru d'histoire, l'écrivain rappelle que, pendant six siècles, les Perses ont dominé tout le Moyen-Orient, quand « les Arabes n'étaient que quelques tribus qui nomadisaient dans les sables ».
C'est dans ce pays qu'il fait la connaissance de l'immense savant « à l'ancienne » qu'était Henri Corbin, qui parlait une dizaine de langues et passait sans difficultés de l'explication d'un monothéisme à un autre. On voit aussi passer Ionesco, que Jean Soler présente à un public cultivé mais réticent.
Sans intermédiaire
En Iran, Corbin et Soler discourent sur les anges et les intermédiaires divers entre l'homme et Dieu. Si on supprime ces derniers, dit le grand érudit, on débouche sur l'athéisme. De fait, pas besoin d'aller chercher Darwin, se dit notre héros, athée heureux, car « un Dieu tellement transcendant qu'on ne peut rien dire de lui et un Dieu qui n'existe pas sont difficilement discernables l'un de l'autre ».
Cette profession de foi athée n'épuise pas, loin de là, un livre terriblement attachant en ce que l'auteur noue son existence aux courants de l'histoire, de l'architecture et de la peinture. Il fut l'ami de Jacqueline Picasso, de Pierre Boulez et du sombre et exigeant René Char.
« Dieu et Moi - Comment on devient athée et pourquoi on le reste », De Fallois, 350 p., 22 €
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