JAZZ-ROCK - En Europe

De multiples facettes

Publié le 14/02/2011
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Crédit photo : A. BOCCALINI/ECSM RECORDS

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Crédit photo : DR

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Crédit photo : U. SCHWARZE

QUELQUES kilomètres séparent le sud de la Corse du nord de la Sardaigne. Il était donc normal qu’un jour la culture et les racines de ces deux îles, anciennes provinces romaines dont les armoiries ont une certaine analogie, se côtoient et se retrouvent pour se compléter. D’où la naissance et la concrétisation du projet du trompettiste sarde, Paolo Fresu (1), dont le résultat est le bien nommé « Mistico Mediterraneo » (ECM/Universal). Pour mener à bien cette entreprise originale, le leader a fait appel aux voix magiques du chœur corse A Filetta, dirigé par Jean-Claude Acquaviva, et au bandonéoniste italien Daniele di Bonaventura. La rencontre et la juxtaposition entre les effluves jazz romantiques et séduisantes, teintées d’un zeste de Miles Davis, de Paolo Fresu, et la merveille des chants polyphoniques corses, le tout ponctué par la mélancolie du bandonéon, donnent à cet album une tonalité jazz-world, à la fois aventureuse et traditionnelle. Surprenant pont culturel.

Marlene Dietrich (1901-1992) fut un des premiers sex-symbols du cinéma doublé d’une chanteuse. Antinazie fervente devenue citoyenne américaine, l’« Ange bleu », muse de Josef von Sternberg et maîtresse de Jean Gabin, chante avant et pendant la guerre pour les troupes alliées des chansons d’alors qui seront aussi reprises en cœur par... les troupes allemandes ! Une carrière de chanteuse qui se concrétise surtout à partir des années 1960 et qui est remise au goût du jour, en ce XXIe siècle nostalgique, par un jeune guitariste d’outre-Rhin, Johannes Haage. Le Berlinois et son trio (Andreas Lang, contrebasse ; Sebastian Merk, batterie), reprennent, avec de nombreux effets électroniques d’aujourd’hui et une approche instrumentale intéressante, ces tubes de la grande Marlène que furent « Ich bin von Kopf bis Fuss auf Liebe eingestellt » (« Je suis faite pour l’amour de la tête aux pieds », interprété dans « l’Ange bleu » en 1930), « Sag mir, wo die Blumen sind » ou encore « In der Kasernen », dans un CD intitulé « Plays Marlene Dietrich » (Meta Records/Codaex). Un très bel hommage et une redécouverte absolue des succès d’un autre âge qui appartiennent au patrimoine.

« Bold as Light » (ECM/Universal), du multi-instrumentiste Stephan Micus, est une sorte d’OMNI (objet musical non identifié). Compositeur et musicien né en Bavière en 1953, Micus s’est fait une spécialité de ne travailler qu’avec des instruments traditionnels issus de différentes cultures, notamment asiatiques (peut-être est-ce l’influence de sa femme japonaise ?). Pour son opus en solo, il pratique principalement le nplaim raj (une sorte de flûte en bambou à anche originaire du Laos), le nokan (également une flûte en bambou, mais du Japon), diverses cithares (dont la bavaroise) et des instruments venus d’Afrique, plus sa voix retravaillée et remixée à plusieurs reprises pour créer une sorte de polyphonie à l’européenne. Une musique surprenante, très improvisée, multiculturelle, certes très éloignée des canons du jazz, mais assez proche de la démarche abstraite du théâtre No.

(1) Le Mans Europa Jazz, le 11mai ; Quimper, le 13 mai ; jazz sous les pommiers, le 31 mai.

DIDIER PENNEQUIN

Source : Le Quotidien du Médecin: 8906