Auteure de plusieurs livres d'histoire culturelle, Marie-Laure Le Foulon revient, dans « le Procès de Ravensbrück-Germaine Tillion : de la vérité à la justice » (1), sur le parcours de cette ethnologue (1907-2008), grande figure de la Résistance, ancienne rescapée du camp, entrée au Panthéon en 2015 et qui fut mandatée par ses camarades de détention pour témoigner au procès qui s'est ouvert à Hambourg le 5 décembre 1946. Un travail de mémoire enrichi de documents précieux, qui éclaire le difficile exercice de la justice des hommes.
Plus polémique, « Vichy tel quel (1940-1944) » (2) est le récit au jour le jour, par Dominique Canavaggio (transmis par son fils Jean après son décès en 1981), des événements qu'il a vécus à Vichy en sa qualité de correspondant du « Paris-Soir » de Lyon. Nommé en mai 1940 chef de cabinet de Jean Prouvost, alors ministre de l'Information du gouvernement Paul Reynaud, il a recueilli, de juillet 1940 à avril 1944, les impressions et les confidences des personnalités qu'il a approchées quotidiennement et il donne ainsi un éclairage inédit sur des faits importants.
Le « Journal du camp de Vittel » (3), tenu par le poète Yitzhak Katzenelson, né en Biélorussie en 1886 et déporté à Auschwitz en 1944 avec son fils, ne court que sur deux mois, à partir de mai 1943. Après que son épouse et ses deux plus jeunes enfants ont été envoyés à Treblinka, il avait pu quitter la Pologne grâce à la Résistance juive et avait été dirigé au camp de Vittel, en France ; c'est là qu'il a écrit ce témoignage en forme de journal, ainsi que son « Chant du peuple juif assassiné ».
Après « la Maladroite », un premier roman très remarqué, Alexandre Seurat donne, avec « l'Administrateur provisoire » (4), un roman documentaire édifiant et émouvant, enquête à la fois historique et familiale. Porté par la mémoire de son frère qui vient de mourir, un jeune homme en vient à évoquer le souvenir de son arrière-grand-père, qui aurait collaboré au sein du Commissariat général aux questions juives. L'ouvrage dévoile ainsi, documents authentiques à l'appui, ce que fut l'action de ces administrateurs chargés, sous Vichy, d'assurer l'aryanisation économique.
Ancien journaliste et historien de la guerre, Pierre Servent a choisi le roman pour évoquer lui aussi la guerre, à travers la recherche d'un jeune enseignant dépositaire par hasard de feuillets écrits de la main d'un Allemand emprisonné. « Le Testament Aulick » (5) est la confession rédigée par un ancien officier devenu diplomate du IIIe Reich, à la veille de son exécution en 1946. Karl Aulick, soldat en 1914-1918 puis lieutenant d'Hitler, y déroule le parcours qui l'a mené dans un cachot de Budapest.
Souvenirs de jeunesse
Bernard du Boucheron a publié huit livres depuis « Court serpent », son premier roman écrit à 76 ans, couronné par le Grand prix de l'Académie française. Dans « la Guerre en vacances » (6), il nous fait partager la « normalité monstrueuse » de son enfance pendant l'Occupation allemande. Il avait 12 ans en 1940 et il se souvient de ses vacances campagnardes, toutes de jeux, de nourritures rustiques et d'amourettes naissantes, avant le retour à Paris et aux études.
Signalons, dans le même esprit, la réédition du classique de Jean Raspail (Grand Prix de littérature de l'Académie française pour l'ensemble de son œuvre en 2003), « l'Île Bleue » (7), dans lequel il raconte l'entrée d'un groupe d'enfants dans l'adolescence, et dans la guerre en juin 1940.
Ralf Rothmann est un écrivain allemand plusieurs fois récompensé. Dans « Mourir au printemps » (8), il décrit les derniers mois de la guerre du point de vue d'un jeune soldat allemand. Le récit commence en 1945, lorsque deux amis ouvriers agricoles de 17 ans sont enrôlés de force par les SS et envoyés en Hongrie. L'un, arrêté après une tentative de désertion, est condamné à mort, tandis que l'autre est chargé de son exécution. Quelques jours plus tard, l'Armistice est signé.
On retrouve dans « Post-scriptum » (9), en plus poignante, l'atmosphère d'« Un garçon parfait », qui avait valu le prix Schiller (2005) et le prix Médicis étranger (2008) à Alain Claude Sulzer, écrivain suisse de langue allemande. En 1933, une star du cinéma allemand mondialement connue côtoie dans un luxueux palace dans la montagne suisse les intellectuels et les riches bourgeois cultivés qui ont fui Berlin. Il tombe sous le charme du postier du village ; une simple aventure pour lui, un drame pour l'autre. Apprenant qu'il ne pourra plus tourner parce qu'il est juif, il s'exile aux États-Unis, où il ne parviendra pas à renouer avec le succès.
Auteur, entre autres, de romans policiers (« Billard à l'étage », « Effroyables jardins »), Michel Quint traite, dans « Un hiver avec le diable » (10), des lendemains de la guerre. Le récit se situe dans un village du Nord en 1953, alors que s'ouvre à Bordeaux le procès des nazis qui ont massacré les habitants d'Oradour en 1944. Parmi les accusés, 13 Malgré-nous, dont un engagé volontaire, alsacien. Une jeune femme venue occuper un poste d'institutrice dans le bourg, alsacienne et fille-mère, va faire les frais de ce climat délétère qui ravive les plaies de la Libération, notamment l'affaire du réseau Voix du Nord.
(1) Le Cherche Midi, 266 p., 19,50 €
(2) De Fallois, 303 p., 22 €
(3) Calmann-Lévy, 234 p., 20 €
(4) Rouergue, 182 p., 18,50 €
(5) Robert Laffont, 349 p., 21 €
(6) Éditions du Rocher, 258 p., 18,90 €
(7) Robert Laffont, 266 p., 20 €
(8) Denoël, 238 p., 17 €
(9) Jacqueline Chambon, 280 p., 22 €
(10) Presses de la Cité, 412 p., 20 €
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