Auteur d’une quinzaine de romans (dont « America », prix Médicis étranger 1997, et récemment « les Vrais Durs ») et d’une dizaine de recueils de nouvelles, T. C. Boyle s’est intéressé à l'immense dôme fermé construit au début des années 1990 dans le désert du Nevada, censé reproduire la diversité de la biosphère terrienne, à des fins de colonisation spatiale. Si ce fut un échec, « les Terranautes » (1) est une réussite littéraire.
Comme dans la mission Biosphère II, ils sont huit volontaires, quatre hommes et quatre femmes, à être enfermés pendant deux années. Le récit choral, limité à trois personnages (le responsable de la communication avec l’extérieur, la chargée des animaux domestiques et son amie, qui n’a pas été sélectionnée et œuvre à l’extérieur), montre non seulement les limites d’une coexistence en huis-clos, quand la faim et le sexe exacerbent les conflits, mais aussi les limites d’une science spectacle dévoyée par les intérêts personnels et financiers. Un grand moment de comédie humaine façon téléréalité scientifique.
Contre la variole
Spécialiste de l’autobiographie romancée (« Une passion indienne », « le Sari rose », « l’Empereur aux mille conquêtes »), l’Espagnol Javier Moro ajoute avec « l’Expédition de l’espoir » (2) une nouvelle pierre aux hommages rendus à Isabel Zendal Gomez. Le nom de cette fille de paysans devenue infirmière est lié à la campagne de vaccination antivariolique dans les territoires d’outre-mer de l’Empire espagnol, ordonnée par la couronne et dirigée par le médecin Francisco Xavier Balmis et son assistant Josep Salvany.
La jeune femme était chargée de prendre soin d’une vingtaine d’orphelins vaccinifères embarqués au port de La Corogne le 30 novembre 1803 à destination de l’Amérique et elle participa à une expédition similaire du Mexique aux Philippines. Sa compétence et sa sollicitude furent reconnues de tous. Au-delà de la prouesse humaine, le roman nous embarque dans une aventure mêlant tempêtes et naufrages, opposition du clergé, corruption des élus et, bien sûr, courage des enfants et audace des deux hommes qui se sont disputé l’amour de la seule femme à bord.
Réalité et fiction se mêlent plus qu’étroitement dans « Une autre ville que la mienne » (3), un roman de 1997 de Dominick Dunne (« Une saison au purgatoire ») enfin traduit. Le personnage principal est, comme l’auteur, un journaliste d’investigation en même temps qu’un romancier, après avoir été un producteur de cinéma adulé puis ruiné, tombé dans la drogue et l’alcool. Sa fille, comme la fille de Dominick Dunne (1925-2009), a été assassinée et le responsable du crime très vite libéré.
Dans le livre, le héros s’appelle Gus Bailey et il suit le procès d’une star du football américain accusée du double meurtre de son ex-femme et de l’un de ses amis. Les preuves sont accablantes mais, parce qu’il est noir et que les policiers qui l’ont arrêté sont blancs, l’affaire tourne au procès racial habilement manipulé par les avocats. Durant l’année où il assiste aux débats et en tient la chronique pour « Vanity Fair », Gus Bailey se mêle au tout-Hollywood et prend part à tous les dîners mondains, à la fois commentateur et contempteur d’une jet-set pour laquelle il ne montre ni tendresse ni pitié.
Guerre et nazisme
Après avoir passé plusieurs années en République dominicaine et l’avoir vanté dans des guides et par la photographie, Catherine Bardon lui consacre un roman qui est une vaste fresque d’amour et d’exil tout en révélant un pan méconnu de l’histoire de la Deuxième Guerre mondiale. La première partie des « Déracinés » (4) nous ramène à Vienne en 1932, lorsque Wilhelm, jeune journaliste, et Almah, qui étudie pour devenir dentiste, se rencontrent. Contraints de fuir en 1939, ils feront partie des 100 000 juifs qui, à la demande du dictateur Trujillo (pour des raisons géopolitiques et économiques), s'installeront dans le nord de l’île pour y construire une communauté autonome à la manière d’un kibboutz. Loin de l’effervescence autrichienne et des idées intellectuelles, les jeunes gens vont se transformer en travailleurs manuels au milieu d’une jungle tropicale brûlante. Prendront-ils racine dans cet environnement à la fois salvateur et impitoyable ?
Connu pour la série autour du Commissaire Marcas, le duo Éric Giacometti-Jacques Ravenne propose, avec « le Triomphe des ténèbres » (5), le premier tome d’une série, « le Cycle du soleil noir », abordant une dimension occulte du nazisme. Si les pillages de lieux sacrés à travers le monde par une organisation nazie appelée Ahnenerbe, afin d’y trouver les Quatre Éléments qui, selon une antique prophétie, permettront à celui qui les détiendra de devenir le maître du monde, est le fruit de l’imagination des auteurs, tout comme les protagonistes principaux, le livre s’inspire de nombre de faits « troublants et bien réels » tels une expédition au Tibet ou un voyage d’Himmler à Montserrat, détaillés en fin d’ouvrage.
« Made in Sweden » (6) est également un livre écrit à quatre mains, par Anders Roslund, auteur de romans policiers,et Stefan Thunberg, l’un des plus célèbres scénaristes scandinaves. Premier volet d’un diptyque, cet imposant ouvrage raconte comment, au début des années 1990, trois frères et un ami ont programmé la plus grande et la plus violente série de braquages que la Suède ait connue, et même tenté de soumettre le gouvernement au chantage. Allant bien au-delà des actes délictueux, l’ouvrage revient sur l’enfance de cette fratrie inhabituelle, vécue sous la coupe d’un père violent et d’une mère soumise. Un flic marqué lui-même par une histoire familiale difficile, tente de le contrer.
(1) Grasset, 590 p., 24 €
(2) Robert Laffont, 443 p., 21,50 €
(3) Séguier, 480 p., 22 €
(4) Les Escales, 609 p., 21,90 €
(5) JC Lattès, 476 p., 22 €
(6) Actes Sud, 654 p., 23,80 €
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