Châtelet et Théâtre de la Ville

Spectacles nomades

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Publié le 03/11/2016
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Cl-42nd Street

Cl-42nd Street
Crédit photo : PETER McKINTOSCH

Grands bouleversements place du Châtelet, où les deux théâtres de la Ville de Paris vont fermer pour travaux. Mais avant la fermeture, début janvier, du Théâtre du Châtelet, qui marquera sans aucun doute la fin d’une ère, derniers feux avec le musical « 42nd Street », qui y occupera la scène du 17 novembre au 8 janvier. Stephen Mear met en scène, sous la direction musicale de Gareth Valentine, cette comédie musicale créée à Broadway en 1980 d’après le film de Lloyd Bacon (1933).

Comme « Singin’in the Rain » et « Kiss Me, Kate ! », « 42nd Street » est un backstage musical qui raconte les coulisses du montage d’un spectacle à New York lors de la terrible crise financière de 1929. Chant, danse et bonne humeur : idéal pour les fêtes et en famille.

De l’autre côté de la place, le Théâtre de La Ville, qui ferme aussi pour des « travaux de rénovation et de réinvention », continue de se produire sur la petite scène du Théâtre des Abbesses, son satellite habituel, et réfugie également sa programmation en divers lieux de la capitale, parmi lesquels l’Espace Cardin, le Théâtre de la Cité internationale et le Théâtre Paris-Villette.

Un spectacle légendaire

Pour la venue programmée du Berliner Ensemble avec la mise en scène de « l’Opéra de Quat ‘sous » réalisée par Robert Wilson, c’est au prestigieux Théâtre des Champs-Élysées qu’il s’est retranché. On avait vu en 2009 ce spectacle étonnant au Théâtre de la Ville. Entre-temps, il est devenu une légende. Mais le revoir au Théâtre des Champs-Élysées, qui donne une bien meilleure proximité avec les acteurs, change considérablement la donne.

Rappelons que Robert Wilson, à la demande du Berliner Ensemble, troupe allemande historique fondée en 1949 par Helene Weigel et Bertolt Brecht à Berlin-Est, y a réalisé quelques mises en scène, dont cet « Opéra de Quat ‘sous » en 2007. Au Théâtre des Champs-Élysées, on apprécie davantage l’excellence d’une troupe sur laquelle Wilson ne tarit pas d’éloges et qui réussit le même miracle sept ans après avec une distribution quasi entièrement renouvelée.

Chaque acteur, chaque silhouette est à saluer en tant qu’individualité, mais c’est la cohérence de l’ensemble qui prime. Wilson a réalisé une lecture très abstraite et d’une intelligence aiguë de l’œuvre, inspirée de « l’Opéra des Gueux » composé par John Gay deux siècles plus tôt. Les décors sont minimalistes et fabuleux, de simple lignes de néons délimitent les espaces, on joue beaucoup avec les rideaux, comme dans le cabaret berlinois classique, les maquillages sont outranciers, les costumes dans un strict noir et blanc et les éclairages virtuoses.

Le propos est grinçant, éminemment politique, et le texte d’une clarté hallucinante, dit et chanté par ses 23 acteurs-chanteurs tellement rompus à ce style et judicieusement souligné par des bruitages très wilsoniens. Et il y a la musique avec ce simple ensemble de huit musiciens réunis sous le nom de Das Dreigroschenoper Orchester, qui remplit la fosse d’une musique tour à tour glaçante et réconfortante. Un des spectacles les plus forts de ce début de siècle, qui prouve s’il était nécessaire que la vitalité satirique de cette œuvre, créée en 1928 dans une République de Weimar rongée par la montée du nazisme, n’est pas près de s’éteindre.

Danse

Parmi les prochains spectacles en exil du Théâtre de La Ville, « Tordre », du chorégraphe Rachid Ouramdane (CNN de Grenoble), au Théâtre de la Cité Internationale, du 3 au 10 novembre. Entre le chorégraphe anglais Akram Khan et le Théâtre de la Ville s'est engagée une fidélité au long cours qui donnera lieu à deux spectacles : « Until the Lions », inspiré d'un épisode du Mahabharata, du 5 au 17 décembre à la Villette, et « Chotto Desh », adaptation jeune public de son solo « Desh », du 21 décembre au 6 janvier au Théâtre des Abbesses. Et il ne faudra pas manquer la reprise de « Toro », créé avec Israel Galvan en 2014, à l'Espace Pierre Cardin les 25 et 26 novembre.

 

 

 

 

– Châtelet, tél. 01.40.28.28.40, www.chatelet-theatre.com
– Théâtre de la Ville en exil, tél. 01.42.74.22.77, www.theatredelaville-paris.com

Olivier Brunel

Source : Le Quotidien du médecin: 9531