Saluez-vous la démarche du ministre de la Santé, Olivier Véran, d’étendre la gratuité de la contraception pour les femmes jusqu’à 25 ans ?
Dr Élise Fraih : Oui, c’est évidemment une très bonne nouvelle ! Toute mesure visant à freiner l’inégalité aux soins ne peut qu'être saluée. Toutes les femmes en âge de procréer devraient avoir un accès à la contraception. Les considérations financières ne peuvent plus être des freins à l’accès aux soins.
Cette mesure est-elle suffisante selon vous ?
Dr E.F. : L’État a investi 21 millions d’euros, c’est un effort notable et c’est évidemment mieux que rien. Mais on peut encore espérer mieux ! En effet, cette mesure ne concerne pas toutes les pilules. Et certaines pilules restent relativement chères et non remboursées. Or si une femme de moins de 25 ans ne supporte pas les pilules remboursées, ce qui arrive, son choix dans la contraception va être limité. D’ailleurs l’extension de la gratuité de la contraception ne concerne pas non plus les patchs, les anneaux vaginaux, les capes cervicales, les spermicides et les préservatifs (sauf deux marques remboursées depuis 2018).
Concrètement, que change cette mesure pour vous et pour vos patientes ?
Dr E.F. : Jusqu’à maintenant un médecin pouvait coter une primo prescription de contraception pour les femmes mineures. Cette consultation était entièrement prise en charge. Désormais, nous allons pouvoir le faire pour toutes les femmes et ce jusqu’à 25 ans. En tant que médecin généraliste, mon rôle va être de communiquer cette information aux jeunes femmes concernées pour qu’ensuite nous abordions ensemble les moyens de contraception qui existent. Notre devoir est d’expliquer aux femmes tout ce qui est à leur disposition en termes de contraception et ensuite de les laisser choisir. Si une patiente souhaite s’orienter vers la pilule, j’irai avec elle vérifier les possibilités de remboursement. Même chose pour les autres moyens de contraception. D’ailleurs, outre la gratuité de la contraception et de la consultation, les jeunes femmes de moins de 25 ans pourront également obtenir un remboursement de leur bilan biologique.
Ressentez-vous la question financière comme un frein dans le recours à la contraception ?
Dr E.F. : Évidemment, pour certains budgets limités, la question du coût de la contraception est prise en compte. Il m’arrive souvent de vérifier avec mes patients à quelle hauteur s’effectue la prise en charge de certains médicaments comme la pilule. Pour certaines jeunes femmes étudiantes ou entrant tout juste dans la vie active, la contraception peut représenter des dépenses importantes. Certaines d’entre elles sont affiliées au régime des mutuelles étudiantes. Dans le Grand-Est les remboursements sont plutôt intéressants. Ce n'est pas dans toute la France le cas car même avec le tiers payant, elles doivent avancer 7, 50 euros. Cette mesure va leur permettre de l'éviter ! D’ailleurs la consultation gratuite est aussi l’occasion pour ces jeunes femmes d’aborder leur santé globale !
Cette mesure peut-elle diminuer le recours aux IVG ?
Dr E.F. : Je l’espère vraiment. Les mesures précédentes prises en 2013 en faveur de la gratuité de la contraception pour les jeunes femmes mineures âgées de 15 à 18 ans ont fait baisser les recours aux IVG entre 2012 et 2018, passant de 9,5 à 6 pour 1 000. Si cette nouvelle mesure permet de lever des freins dans l'accès à la contraception, permet aux femmes de s’approprier leurs corps et éventuellement leur donne des clés pour choisir de ne pas tomber enceinte et d’éviter de passer par une IVG, c’est magnifique ! Aucune femme ne devrait être contrainte d’avoir recours à l’IVG parce qu’elle ignore qu’elle a le droit à une contraception. Pouvoir parler de sexualité et de contraception avec son médecin est d'ailleurs l’une des clés pour que les femmes aient ce choix et soient maîtresses de leur corps.
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