Le déclassement de la France dans le champ du médicament est désormais reconnu par tous, y compris par la mission d'information sur les médicaments de l'Assemblée nationale qui a présenté ses conclusions le 23 juin dernier : « Le déclin de la France en matière de recherche et d’innovation en santé est palpable et continu depuis un certain nombre d’années déjà. La France a perdu de son attractivité tant en matière de recherche fondamentale que de recherche clinique ou de recherche appliquée. Le manque de moyens octroyés à la recherche et à l’innovation, la complexité du paysage administratif français et la longueur excessive des procédures de mise sur le marché et de fixation du prix des médicaments semblent bien être les principaux facteurs expliquant ce déclassement. Un tel déclin n’est pas sans conséquences dans la mesure où les pays qui participent peu à l’innovation thérapeutique n’ont que très peu de place dans le développement et la production des médicaments innovants. L’enjeu est loin d’être purement économique : il est avant tout sanitaire. Le déclassement de la France rend plus difficile un accès équitable et rapide des patients français aux innovations thérapeutiques. »
Un patron
Comment alors bloquer le mécanisme et rendre à la France son prestige d'antan ? Les députés LREM Audrey Dufeu (Loire-Atlantique) et Jean-Louis Touraine (Rhône) ont listé 31 propositions. Désigner un patron au titre de haut-commissaire aux produits de santé permettrait de lever les injonctions contradictoires observées au sein même des gouvernements. À savoir arbitrer entre une politique industrielle grâce à des mesures incitatives et limiter les déficits sociaux en comprimant les prix des médicaments. Au-delà de cette forte visibilité assurée par une incarnation, les autres mesures construisent un mécano à la fois hexagonal et européen. Citons le renforcement des moyens humains au sein des différentes agences françaises et celui du rôle des instances européennes en matière de gouvernement.
Certaines propositions relèvent davantage de l'incantation comme la demande de transparence des informations transmises au CEPS, toujours exigée, jamais obtenue. On peut également évoquer la fixation d'un prix au niveau européen, rejetée par les différents gouvernements comme une atteinte à leur souveraineté.
Crédit impôt recherche pour les start-up
D'autres propositions seraient davantage dans l'air du temps. Après le rapport de France Stratégie sur le crédit impôt-recherche jugé peu efficace pour attirer des investissements étrangers en France, les rapporteurs suggèrent que cette aide publique soit à l'avenir réservée aux start-up et PME.
Au-delà de la France et de l'Europe, les États-Unis demeurent à ce jour l'horizon indépassable. Une proposition recommande la création d'un méga-hub en santé sur le modèle de Boston.
Production académique de cellules CAR-T
En attendant, les députés entrent dans le détail. Et recommandent la création d'une production académique de cellules CAR-T en s'inspirant là aussi de modèles étrangers. Et pour restaurer la souveraineté sanitaire, les rapporteurs reprennent l'idée d'instaurer un groupement à but non lucratif afin de produire des médicaments d'intérêt thérapeutique majeur. Et d'échapper ainsi aux risques de pénurie. Dans le même cadre, qui s'opposerait à la suggestion de « renforcer l'indépendance de la France en matière de médicaments dérivés du sang » ?
À l’issue du CSIS et du PLFSS 2022, on recensera les mesures retenues par le gouvernement et la représentation nationale. Pour autant, le dossier médicament échappe au microcosme et devient un enjeu national. Qui s'en plaindra ?
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