La concertation avant les arbitrages : en ce début d’année, pas moins de cinq ministres dont Catherine Vautrin (Travail, Santé, Solidarités et Familles) préparent le projet de loi de financement de la Sécurité sociale (PLFSS 2025), en recevant les différents groupes parlementaires.
La précédente version du budget de la Sécu avait provoqué le 4 décembre la démission de l’équipe ministérielle de Michel Barnier, après une censure votée par une majorité de députés à l’Assemblée nationale. C’est la première fois depuis 1997 que le pays entame l’année sans budget de la Sécu. Et maintenant ?
Aux antipodes de ce que prédisaient certains députés, dont Élisabeth Borne – devenue depuis ministre de l’Éducation nationale – l’absence de budget n’a pas nui au fonctionnement du système de santé. Les cartes Vitale sont opérationnelles depuis le début d’année, les prestations sont remboursées. La loi spéciale, adoptée le 20 décembre, a autorisé comme prévu les organismes de Sécurité sociale à emprunter sur les marchés et à émettre de la dette. Même si les taux sont plus élevés, paiements et remboursements sont assurés.
Mais il s’agit là d’une période transitoire, que l’exécutif espère la plus courte possible. Les 11 différents groupes parlementaires de l’Assemblée – en premier lieu les socialistes, mardi 7 janvier, puis les communistes, jeudi 9 – sont conviés par le gouvernement depuis le début de la semaine à des discussions autour du budget de la Sécu pour « balayer l’ensemble du texte » et tenter de trouver des voies de compromis.
Ne pas repartir d’une feuille blanche
Dans ses prises de parole, le gouvernement a affiché son intention de repartir du texte élaboré par Michel Barnier et ses ministres avant la censure. « Nous ne repartons pas d’une feuille blanche. Autrement, nous n’aurions pas de budget avant mai. Pour que la période d’incertitude soit la plus courte possible, nous repartirons des textes en discussion au Parlement », a déclaré dès le 6 janvier la ministre chargée des Comptes publics, Amélie de Montchalin, au Parisien.
Mais si le gouvernement se montre prêt à « amender sensiblement » sa version initiale, a-t-elle défendu, le calendrier semble très serré. François Bayrou prononcera son discours de politique générale mardi prochain, le 14 janvier, où devraient notamment figurer les orientations budgétaires de l'exécutif (PLF et PLFSS), à défaut d’arbitrages définitifs.
Concessions à gauche et coup de pouce sur l’Ondam ?
Contrairement à Michel Barnier, François Bayrou semble tenté de vouloir donner des gages à la gauche socialiste et écologiste plutôt qu'au RN pour s'éviter une censure budgétaire. Le chef du parti socialiste Olivier Faure a toutefois réclamé en ce sens des « concessions remarquables ».
Le sénateur Bernard Jomier (app. socialiste) confirme ce jeudi au Quotidien que « les véritables discussions entre une partie de la gauche et le gouvernement sont très actives en ce moment ». Se montrant relativement optimiste, le généraliste prévient toutefois que « si ces négociations aboutissent, elles se traduiront très fortement dans le texte et le PLFSS sera adopté en conséquence ». « Si ce n’est pas le cas, nous repartons dans le brouillard… », recadre-t-il.
Sur Public Sénat le 9 janvier, le député socialiste Jérôme Guedj a affirmé de son côté que son parti avait réclamé le « renoncement au déremboursement des consultations et des médicaments », mesure initialement prévue avec la hausse du ticket modérateur. Une disposition « encore envisagée par le gouvernement », a-t-il avancé. Les socialistes, ajoute-t-il, sont venus à la concertation « avec des propositions de dépenses à sanctuariser sur l’accès aux soins ». Ont été évoqués également un plan pour la santé mentale et une hausse du budget pour l’hôpital et les Ehpad, à l’instar de ce que réclamait la « candidate pour Matignon » du Nouveau Front populaire (NFP), Lucie Castets, dans une lettre début janvier.
Desserrer l’étau budgétaire
Mais le gouvernement est-il prêt à desserrer un peu l’étau budgétaire ? Lors de ses vœux à la Fédération de l’hospitalisation privée (FHP), mercredi soir, Catherine Vautrin a du moins indiqué que l’objectif national de dépenses d’assurance-maladie (Ondam) était « un sujet », différenciant le taux « des tableurs Excel et celui de la vie ». « Est-ce qu’en allant un tout petit plus loin sur l’Ondam que ce qui était prévu, on ne permet pas d’apporter des réponses, notamment sur la situation des établissements de santé ? » a-t-elle suggéré. Une façon ne pas fermer la porte à une augmentation des moyens du secteur…
La rapporteure générale du PLFSS pour le Sénat, Élisabeth Doineau (UDI), confie qu’elle n’a « jamais vécu cette situation ». La sénatrice de la Mayenne, qui rencontrera le ministre Yannick Neuder mercredi prochain, marque son « exigence pour réduire le déficit de la Sécurité sociale, qui devra être moins important que l’année passée ». Elle compte à cet effet « garder toutes les recettes possibles : réduction des allègements généraux de cotisations pour les entreprises, taxes sur le sucre et les jeux… »
Nouvelle lecture
Côté calendrier, sur le budget de la Sécu, le gouvernement devrait soumettre les conclusions de la commission mixte paritaire (CMP) au vote du Sénat le 23 janvier, avant une nouvelle lecture à l’Assemblée. Mais à ce stade de la navette, le droit d’amendement est plus contraint puisque les modifications doivent être en relation directe avec le texte encore en discussion, ce qui ne permet pas d’ouvrir des chantiers additionnels. Il n’empêche pas en revanche pas de réécrire ou de supprimer certains articles qui existent.
Cette nouvelle lecture à l’Assemblée pourrait débuter la semaine du 29 janvier en commission, puis celle du 3 février en séance publique. Contacté, le cabinet du président de la commission des affaires sociales, Frédéric Valletoux, fait savoir qu’il n’a « pas d’information précise » à partager. Le calendrier au Palais Bourbon sera tranché lors de la Conférence des présidents de l’Assemblée nationale, programmée au 14 janvier.
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