Le décret encadrant les infirmières en pratique avancée (IPA) est désormais entre les mains du Conseil d'État. Il était temps puisque les premières formations doivent débuter en septembre. La première version du décret avait provoqué la grogne les médecins, qui craignaient que les infirmières marchent sur leurs plates-bandes. Ils disent avoir obtenu satisfaction. La nouvelle mouture du texte, consultée par Le Généraliste, contient en effet quelques ajustements.
Exit par exemple la notion d'interprétation des examens et des actes techniques, qui dérangeait les syndicats de médecins. Suite aux dernières réunions de concertation, les représentants de la profession ont également été écoutés sur l'instauration de protocoles entre le généraliste et l'infirmière. Ceux-ci permettront d'inscrire noir sur blanc les modalités de prise en charge du patient par l'infirmière, les conditions de retour du patient vers le médecin traitant ou encore la conduite à tenir en cas d'alerte.
Les médecins ont changé d'avis
Ces nouvelles garanties font relativement consensus chez les médecins. « Le médecin traitant devait rester le chef d'orchestre. Nous avons aussi demandé à intégrer les soins primaires dans un socle commun des futurs masters », réagissait le président des Généralistes-CSMF, le Dr Luc Duquesnel, à la sortie d'une réunion au ministère ce mercredi. De son côté, le président de MG France le Dr Jacques Battistoni, reste prudent même s'il admet que « le cadre d'exercice » est mieux défini cette fois. Chez les jeunes médecins, le décret ne va même pas assez loin. Le président de ReAGJIR le Dr Yannick Schmitt déplore un texte « très timide, a minima » et regrette que les IPA ne soient pas plus impliquées dans le suivi global des patients. « Elles n'interviendront que sur des petits bouts de pathologies », dénonce-t-il.
Les infirmières frustrées
Du côté des infirmières, le texte remanié intègre également l'évaluation des pratiques et des besoins en formation de l'équipe de soins et la recherche en sciences infirmières. Des précisions sur la formation même des IPA ont été ajoutées. Elles seront diplômées d'État en master (de deux ans) comme prévu et devront justifier de trois années minimum d'exercice pour exercer en pratique avancée. Enfin, la notion de responsabilité des IPA reste floue. « L'infirmier exerçant en pratique avancée est responsable des actes qu'il réalise dans ce cadre », précise le décret, sans toutefois évoquer la responsabilité du médecin qui lance les protocoles. La rémunération de ces super-infirmières n'est inscrite nulle part dans le décret, même si un forfait devait être privilégié.
Ces ajustements ne suffisent pas à satisfaire les représentants infirmiers. Dans un communiqué commun adressé vendredi, les organisations* regrettent que les IPA « se trouvent écartées des soins de premier recours ». La disparition de la santé mentale et de la psychiatrie dans les domaines d'intervention des IPA suscite également l'incompréhension. Enfin, l'article 5 définissant les protocoles constitue selon les infirmières « une rigidification extrême de la mise en œuvre de l'exercice de pratique avancée », une mesure inutile selon elles « eu égard aux compétences développées par les IPA ». Les signataires expriment leurs « vives inquiétudes » : « Un fossé se creuse entre la France et les systèmes de santé étrangers (...) beaucoup plus audacieux et qui développent des stratégies plus adaptées dépassant les clivages traditionnels entre professions de santé. »
* Ordre des infirmiers, AFNIIDE, Collège infirmier français, ANPDE, AFDS, CNI, AFDTN, FNESI et SNIES
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