« ACTUELLEMENT on n’en connaît pas suffisamment sur ces produits », reconnaît l’Office français de prévention du tabac (OFT), dans son rapport sur l’e-cigarette de mai 2013. Néanmoins l’analyse de sa composition et plusieurs études permettent d’avancer un bilan provisoire en terme de toxicité.
Les liquides des e-cigarettes appelées e-liquides contiennent tous des arômes mais également du propylène glycol ou de glycérol. Contrairement à la fumée de cigarette dont composition est totalement différente de la composition du tabac du fait de la combustion, il n’existe théoriquement pas de changement chimique entre la « vapeur » de la e-cigarette et le e-liquide.
Propylène glycol et glycérol.
Romagna et coll. ont évalué et comparé la cytotoxicité de la vapeur de l’e-cigarette à celle de la fumée de tabac sur des fibroblastes de souris en culture. Leur étude qui a inclus 21 e-liquides d’arômes différents à plusieurs dilutions, conclut à la cytotoxicité d’un seul des e-liquide mais à un niveau significativement moindre que la fumée de tabac. L’utilisation des arômes est réglementée dans l’industrie alimentaire mais peu ont été testés pour une inhalation.
Le propylène glycol et le glycérol sont utilisés pour simuler l’effet « vapeur » et renforcer les arômes. Le premier, utilisé depuis longtemps pour simuler la fumée au cinéma, a fait l’objet de nombreuses études toxicologiques et est considéré comme peu toxique et non cancérogène. Il est cependant suspecté d’être toxique à long terme par inhalation. Au Royaume-Uni, contrairement à la France, une valeur limite d’exposition professionnelle a été fixée (447 mg/m3). Le glycérol (ou glycérine végétale), s’il est irritant pour la peau, les yeux et les voies respiratoires, est considéré également comme non toxique en dessous d’une température de 275 °C (où il produit de l’acroléine), soit bien au-dessus de la chaleur dégagée par l’atomiseur (60 °C).
La toxicité pourrait surtout venir des solvants et autres impuretés comme les nitrosamines, les principaux cancérogènes trouvés dans le tabac. Mais d’après l’OFT, qui évoque un rapport de la Food and drug administration (FDA), les e-liquides présentent des taux 500 fois inférieurs à ceux de la plupart des cigarettes. Les autres cancérogènes sont présents à des doses infinitésimales, comme les benzopyrènes (9 picogrammes contre 11 190 dans une cigarette classique). Les taux d’anthracène, phénanthrène, benzène, pyrène, ou propandiol, ne dépassent pas le seuil de 1 %.
Absence de CO et de particules.
Quant aux autres risques pour la santé, l’absence de monoxyde de carbone (CO) et de particules solides préserve le vapoteur des risques cardiovasculaires et de la BPCO. Selon une étude italo-grecque (K. Farsalinos, 2013), menée sur 66 personnes de 20 et 55 ans, dont la moitié de fumeurs, l’autre d’anciens fumeurs, présentée lors du congrès de la société européenne de cardiologie, l’e-cigarette ne provoque pas de modification immédiate de la circulation coronaire. Aucune élévation de carboxyhémoglobine n’a été constatée après son utilisation.
Plusieurs études montrent une efficacité non négligeable de l’e-cigarette dans le sevrage tabagique. En juillet 2013, une recherche italienne (P. Caponnetto et al), parue dans « Plos One », randomisée en double aveugle, auprès de 300 fumeurs consommant plus de 10 cigarettes par jour, a montré que l’e-cig pourrait réduire le tabagisme et favoriser l’abstinence chez des fumeurs qui n’avaient pas envisagé l’arrêt du tabac. À la fin de l’essai, 27 % des personnes ayant quitté la cigarette vapotaient encore, mais 73 % étaient libérés de leur dépendance à la nicotine. Les auteurs soulignaient que chez des fumeurs qui n’avaient pas envie d’arrêter, un taux d’abstinence totale de 8,7 % à un an est remarquable. Mais le taux des patients répondeurs est faible à 3 mois et à un an, reconnaissaient-ils.
Une autre étude néo-zélandaise du Dr Christopher Bullen publiée dans « The Lancet » en août 2013, a comparé pour la première fois l’e-cigarette avec et sans nicotine, avec un substitut nicotinique type patch. À six mois de suivi, les taux d’abstinence étaient de 7,3 % avec l’e-cig contenant de la nicotine (16 mg), 5,8 % avec le patch (21 mg), et 4,1 % avec le placebo. Les auteurs relevaient toutefois que leur étude manquait de puissance statistique pour démontrer la supériorité de l’e-cigarette et ne pouvait conclure sur les effets à long terme.
Une porte d’entrée vers le tabagisme ?
En plus de ces zones d’ombres, certains spécialistes craignent que la cigarette électronique soit une porte d’entrée vers le tabagisme. Selon une méta-analyse réalisée sur 11 études par J.-F. Etter, seulement 0,1 à 3,8 % (médiane à 0,5 %) des vapoteurs sont des non-fumeurs, ce qui interdirait de parler de conversion de ces derniers. La majorité des vapoteurs reste des fumeurs, une minorité, des non-fumeurs. Une autre étude chez les jeunes américains, entre 2011 et 2013, montre que 3,3 % d’entre eux ont essayé l’e-cig en 2011 et 6,8 % en 2012. En 2011, 1,1 % puis 2,1 % en 2012 déclaraient avoir vapoté le mois d’avant. « L’hypothèse gateway n’est absolument pas confirmée par les données scientifiques » commente J.-F. Etter.
Les effets du vapotage passif semblent limités à la présence de marqueur de nicotine dans le sang et les urines de non vapoteurs, selon les études de Romagna. Mais les données manquent encore sur les dangers de l’e-cigarette chez la femme enceinte, et les effets à long terme.
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