La prévention des douleurs chroniques est aujourd’hui un objectif largement partagé dans les équipes d’anesthésie-réanimation. « Une riche littérature décrit ces douleurs chez un certain nombre de patients, qui, plusieurs mois, voire même une année après une intervention continuent d’avoir des douleurs invalidantes parfois difficiles à traiter. Quand ces douleurs s’installent dans la durée, il est souvent compliqué d’en venir à bout. Souvent, les patients ont recours à des doses importantes et prolongées de morphiniques. Il est donc très important de gérer au mieux ces douleurs, lors de l’intervention, puis en postopératoire », explique le Pr Hélène Belœil, anesthésiste-réanimateur au CHU de Rennes.
Premier constat : certaines chirurgies sont plus à risque que d’autres de chronicisation de la douleur. « C’est d’abord le cas des chirurgies qui vont léser de petits rameaux nerveux. En premier lieu, on peut citer la chirurgie thoracique : en incisant entre deux côtes, on peut provoquer des douleurs neuropathiques. Une autre chirurgie à risque est celle du rachis. Mais ces douleurs peuvent aussi survenir après des chirurgies qui ne sont pas spécialement lourdes : on en voit par exemple après une chirurgie pour une hernie inguinale ou une hernie discale », précise le Pr Belœil.
Mobiliser l'arsenal thérapeutique
Pour prévenir ces douleurs chroniques, il convient d’abord d’utiliser le moins possible de morphiniques lors de l’anesthésie, insiste-t-elle : « Plus on en donne, plus on crée de l’hyperalgésie. Plus on sensibilise les récepteurs morphiniques, plus le patient va avoir besoin de morphine après l’intervention. Il est donc crucial d’utiliser des médicaments qui vont prévenir la sensibilisation de ces récepteurs, en particulier la kétamine. Il a été clairement montré dans la littérature que donner de la kétamine pendant l’opération, même lors d’une anesthésie standard avec des opiacés, réduit le risque de chronicisation de la douleur postopératoire. »
La prévention repose aussi une bonne gestion de la douleur en pré- et postopératoire. Pour la spécialiste, « le meilleur moyen d’éviter la chronicisation est de réduire le niveau de douleur. Un patient douloureux avant et après l’intervention sera plus à risque de douleurs chroniques. En postopératoire, il est donc essentiel de mobiliser tout l’arsenal thérapeutique disponible pour que le patient ait le moins de douleurs possible ». Elle conclut en ajoutant que le recours à l’anesthésie locorégional réduit aussi de façon importante le risque de chronicisation.
Plus on sensibilise les récepteurs morphiniques, plus le patient va avoir besoin de morphine après l’intervention
Entretien avec le Pr Hélène Belœil, anesthésiste-réanimateur, CHU de Rennes
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