Le cancer de la prostate (CP), retrouvé à l’autopsie chez 80 % des hommes âgés de plus de 70 ans, constitue à l’état latent ou peu évolutif une évolution quasi naturelle de la glande prostatique. Ses formes agressives sont responsables de 9 000 décès annuels.
ProtecT, une étude britannique randomisée, évaluait l’impact sur la survie à 10 ans de 3 « techniques » (surveillance active, chirurgie, radiothérapie) dans le CP localisé dépisté par dosage de PSA et biopsie. L’ampleur de protecT est inédite : 228 966 hommes de 50 à 69 ans étaient invités à consulter ; 82 429 ont répondu et subi un dosage de PSA ; 8 566 étaient éligibles à une biopsie prostatique (PSA entre 3 et 19,9μg/l) ; 7 414 ont eu une biopsie ; 2 896 CP ont été diagnostiqués, dont 2 417 CP localisés (en général T1c, score de Gleason moyen 6). Au total 1 643 hommes volontaires, atteints d'un cancer de la prostate localisé ont été inclus, randomisés en surveillance active (n = 545), prostatectomie (n = 533) ou radiothérapie (n = 545) et suivis pendant 10 ans.
Les résultats
Sur la survie à 10 ans, critère principal de l’étude, il n’y a pas de différence statistiquement significative entre les 3 techniques (p = 0,48). La mortalité spécifique dans les 10 ans suivant le diagnostic de CP localisé est faible (17 décès pour 1 643 patients). L’étude confirme l’impact négatif sur la qualité de vie de la chirurgie (toxicité urologique : impuissance et incontinence) et de la radiothérapie (toxicité digestive : diarrhée, rectite radique). La surveillance active est cependant associée à des taux statistiquement plus élevés de métastases (p = 0,004) et de progression de la maladie (p < 0,001) que la chirurgie et la radiothérapie. Pour le Pr Giraud, « La surveillance active procure une meilleure qualité de vie, mais est associée à 2 fois plus de métastases et à plus d’évolutivité que la chirurgie ou la radiothérapie. Pour apprécier pleinement les bénéfices/risques à long terme des différentes stratégies, les auteurs eux-mêmes souhaitent poursuivre le suivi 5 à 10 ans ».
Le défi des marqueurs d’agressivité
Le dépistage systématique du PSA sans facteur de risque initial entraîne surdiagnostics et surtraitements. « Il est extrêmement difficile de savoir quel cancer risque d’évoluer sur le plan local et/ou métastatique, et justifie pour cela d’accepter les effets secondaires de la chirurgie ou de la radiothérapie », souligne le Pr Giraud. D’où le défi actuel : trouver des marqueurs et/ou facteurs de risque de CP agressifs qui soient pertinents pour proposer un dépistage personnalisé par le PSA et/ou un traitement effectif. Les facteurs de risque connus les plus importants sont l’âge, les antécédents au 1er degré de cancer de la prostate avant 70 ans, l’ethnie afro-américaine. Ont été avancés, les loci des chromosomes 8q et 17p, les mutations de BRCA1 (surtout de BRCA2, de pronostic défavorable), l’exposition aux androgènes (alopécie andogénétique, taille de l’index).
Alopécie du tout jeune homme
L’alopécie androgénétique (AAG) du tout jeune homme dans un contexte d’alopécie familiale intéresse la recherche. Elle représente un sur-risque quantitatif (probablement faible) que certains pointent comme étant surtout qualitatif (cancers de la prostate agressifs) (4). Elle surviendrait dans un environnement hormonal particulier favorisant l’infarctus et les pathologies prostatiques : taux de DHT (dihydrotestostérone) un peu plus élevé que la normale, récepteurs aux androgènes un peu plus nombreux et sensibles. « Le fait que le finastéride (inhibiteur de la 5 alpha réductase transformant la testostérone en DHT), soit à très faible dose efficace sur l’AAG et qu’il limiterait chez ces hommes la survenue d'un cancer de la prostate sans empêcher les formes graves, conforte le lien entre alopécie androgénétique et cancer », indique le Pr Giraud. Plusieurs études sont en cours pour confirmer le lien entre AAG et cancer de la prostate.
1 Donovan J.L. et al, N. Engl. J. M., september 14, 2016/DOI: 10.1056/NEJMoa1606221
2) Hamdy F.C. et al, N. Engl. J. M., september 14, 2016/DOI: 10.1056/NEJMoa1606220 3) Lane JA et al., Lancet Oncol,. 2014 vol. 15(10) pp. 1109-18
4) Yassa M et al., Ann Oncol. 2011; 22(8) : 1824-1827.
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