Quelles sont les différentes dimensions de l'innovation en oncologie ?
Il existe plusieurs catégories d’innovations dans le domaine de la cancérologie. La première, peut-être la plus lisible pour les patients, est l’innovation organisationnelle qui passe par la nécessité de développer une multidisciplinarité pour décider des traitements à mettre en œuvre, et prendre en charge les effets secondaires du cancer ou des thérapeutiques.
Aujourd’hui, il existe trois grands types de traitements dans le domaine du cancer : la chimiothérapie, les thérapies ciblées et l’immunothérapie. Et un de nos challenges consiste à prendre en charge les effets secondaires de ces traitements, y compris ceux de l’immunothérapie, qui existent bel et bien malgré ce qu’on peut entendre ici ou là. Le problème est que les effets secondaires de l’immunothérapie peuvent être aussi bien pneumologiques, rhumatologiques, dermatologiques que cardiologiques.
Comment doit évoluer le fonctionnement des établissements ?
Le modèle de l’hôpital est de fonctionner sur la multidisciplinarité. On trouve dans les hôpitaux des oncologues mais aussi des pneumologues, dermatologues, cardiologues, endocrinologues et autres spécialités amenées à prendre en charge les effets secondaires des traitements comme l’immunothérapie. Et le défi qui s’ouvre à nous va être de construire des parcours de soins pour nos patients pour leur proposer ces traitements innovants, mais aussi une prise en charge performante des effets secondaires. Il faudra donc miser sur la multidisciplinarité de spécialistes pointus, à la fois sur le cancer et sur la problématique des effets secondaires.
Comment favoriser l'accès à l'innovation ?
Un autre défi, en matière d’innovation, est de s’attaquer aux inégalités régionales d’accès aux essais thérapeutiques. Pendant très longtemps, c’est dans les établissements parisiens qu’on trouvait les essais thérapeutiques les plus innovants. Aujourd’hui, ce n’est plus seulement le cas. Les essais, permettant d’avoir accès à des molécules nouvelles et vraiment innovantes, sont accessibles en province et donc sur l’ensemble du territoire. Et les patients réclament cet accès à l’innovation. Ils voient de plus en plus l’intérêt des essais thérapeutiques innovants. Aujourd’hui, quelle que soit la classe sociale, à l’ère de l’immunothérapie, ils vous posent la question du traitement le plus innovant possible. Et tout le problème est de pouvoir favoriser cet accès à l’innovation.
Ainsi, l’exemple du réseau ARPEGO (Accès à la Recherche Clinique Précoce et Innovante dans le Grand Ouest), mis en place afin de prendre en charge la recherche d'essais thérapeutiques pour les patients de Bretagne et du Grand Ouest, permet un accès concerté fédérant des structures publiques (CHU et CHG), des cliniques et des Centres de lutte contre le cancer. Au départ, on s’est appuyé sur les atouts de notre région où l’ARS, dans une démarche visant à optimiser les choses et à ne pas imposer un modèle, a fait confiance aux professionnels à travers le pôle régional de cancérologie Bretagne. Ensuite, nous avons développé une structure spécialisée dans le développement de la recherche clinique, qui agit en totale complémentarité avec les réseaux locaux de cancérologie.
Labellisé il y a trois ans par le Comité national de coordination de la recherche, le réseau ARPEGO est opérationnel de Brest, à Rennes, en passant par Caen, Angers, Nantes et Poitiers. Tout le monde y travaille ensemble, le public comme le privé. Tous les mercredis matin, se tient un comité qui, pour les patients du Grand Ouest, essaie de trouver un essai thérapeutique permettant de répondre à la question posée par le cancérologue.
Et comment optimiser la prise en charge ?
Une autre priorité est de mettre un terme aux prises en charge par des structures n’ayant qu’une pratique très limitée dans certains cancers. Aujourd’hui, il y a 189 structures en France qui n’opèrent qu’un seul cancer de l’œsophage par an. Ce n’est plus possible. De même, qu’il n’est plus possible d’opérer des cancers de l’œsophage ou du pancréas dans une structure où il n’y a pas de réanimation sur place. Le cahier des charges des futures autorisations en Cancérologie devrait organiser ce nouveau modèle.
L’avenir, pour ces cancers, passe par la mise en place d’équipes quasi dédiées, capables d’avoir les bons essais, les molécules les plus innovantes et des spécialistes ayant une forte expérience de ces cancers.
D'autre part, pour être innovante, la prise en charge ne peut plus reposer sur les seuls médecins. Il y a quelques années, on a vu arriver des infirmières de thérapie orale pour accompagner les patients traités avec des molécules innovantes. Bientôt, on aura les infirmières de pratique avancée qui, sur délégation du médecin, pourront suivre le patient avec une possibilité de prescription, pour par exemple changer les doses d’un médicament. Face à l’innovation, le médecin doit toujours veiller à ne jamais sortir de sa sphère de compétence et vouloir tout faire.
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