Phase intensive puis phase d’entretien
La physiothérapie décongestive complète (ou complexe) représente l’élément essentiel du traitement des lymphœdèmes. La première phase, dite « intensive », destinée à réduire le volume du lymphœdème, est basée sur l’association de bandages peu élastiques multicouches, de drainages lymphatiques manuels, d’exercices sous bandages et de soins de peau.
La physiothérapie décongestive complète peut être effectuée en hospitalisation avec des bandages gardés 24 heures sur 24 et renouvelés cinq jours sur sept, ou en ambulatoire avec des bandages renouvelés trois fois par semaine. La deuxième phase, dite « d’entretien », vise à maintenir le volume réduit à long terme, voire à poursuivre la réduction volumétrique. Elle associe le port d’une compression élastique la journée, la réalisation de bandages peu élastiques multicouches nocturnes, des soins de peau, et éventuellement des drainages lymphatiques manuels.
Bandages peu élastiques multicouches
Les bandages représentent l’élément essentiel de la physiothérapie décongestive complète, destinée à réduire le volume du lymphœdème. Il s’agit de poser, sans les serrer, des bandes à allongement court (100 %) (Somos, Comprilan, Rosidal K, Lastolan), sur un capitonnage fait, soit de coton (ouate Cellona), soit de mousse (mousse NN) ou des deux, en débutant par la partie distale du membre (pied, main). Ces bandages sont appelés multicouches car il y a superposition de 2 à 4 épaisseurs du même type de bande. La technique doit être bien maîtrisée car ces bandages doivent pouvoir être maintenus 24 à 36 heures. La pression exercée au repos est faible, ce qui permet de les supporter (à la différence des bandes élastiques), mais augmente nettement lors de la contraction musculaire. Toutes les études confirment l’intérêt de ces bandages avec des diminutions de volume comprises entre 25 et 75 % et des durées de traitement variant de 1 à 4 semaines. Ces bandages sont différents des bandages multicouches composés de l’association de bandes ayant des allongements différents (longs type Biflex) utilisés en pathologie vasculaire, et il n’existe aucune étude de qualité suffisante pour évaluer l’efficacité et la tolérance de ce type de bandage dans le traitement du lymphœdème.
Il est nécessaire d’apprendre les techniques d’auto-bandages aux patients pour favoriser leur autonomie. Les techniques sont adaptées et simplifiées pour être pratiquées à une fréquence d’au moins trois par semaine la nuit et l’aide de l’entourage est parfois nécessaire.
Drainages lymphatiques manuels
Lorsqu’ils sont utilisés seuls, les drainages lymphatiques manuels ont un effet très modéré sur le volume du lymphœdème. Réalisés avant les bandages peu élastiques, ils ont un petit effet synergique sur la réduction de volume. Ils ne sont pas indispensables dans la phase d’entretien. Ils peuvent par ailleurs apporter à certaines patientes un confort, un effet relaxant et une diminution de la tension cutanée. Les drainages lymphatiques manuels sont utiles dans les lymphœdèmes proximaux touchant le sein, ou la paroi thoracique, difficilement accessibles à la compression.
Soins de peau, préventions des érysipèles
Toute effraction cutanée, même minime, peut représenter une porte d’entrée infectieuse : griffures, morsures, brûlures, piqûres d’insecte ou d’aiguille à coudre, acupuncture. Le port de gants est vivement recommandé dans les situations à risque de blessures : jardinage, prise de plats chauds. Les érysipèles peuvent être récidivants (plus de 3 épisodes) et participer à l’augmentation du volume du lymphœdème. On peut proposer une antibioprophylaxie par une pénicilline à libération prolongée comme l’Extencilline, à la dose de 2,4 MUI toutes les 2-3 semaines (ou par pénicilline V orale), en l’absence d’allergie à la pénicilline. La durée de la prophylaxie n’est pas définie mais une durée prolongée semble nécessaire.
Compression élastique
Le terme de compression élastique est plus approprié que le terme de contention. En effet, la pression s’exerce en permanence sur le membre à traiter en raison de la présence des fibres élastiques. Les compressions sont indispensables au long cours pour maintenir le bénéfice obtenu après la réduction de volume obtenue par les bandages peu élastiques. Le type de compression doit être adapté au lymphœdème : manchon avec ou sans mitaine attenante (couvrant la main), gantelet prenant les doigts pour les membres supérieurs, bas jarret (chaussettes), bas cuisse, collant pour les membres inférieurs. Au membre supérieur, les compressions de classe II (15-20 mmHg), III (20-36 mmHg) ou IV (36 mmHg) peuvent être proposées alors qu’au membre inférieur, il faut privilégier une classe III ou IV (avec le recours fréquent à la superposition de deux bas). Il est préférable d’utiliser des bas avec pied fermé et non pied ouvert pour éviter l’aggravation du lymphœdème des orteils. Dans la plupart des cas, les compressions sont réalisées sur mesure par un orthésiste ou un pharmacien orthopédiste et sont changées tous les 3 à 4 mois.
Surveillance du poids
Ce paramètre a été particulièrement étudié dans les lymphœdèmes secondaires du membre supérieur après cancer du sein. La fréquence des lymphœdèmes les plus volumineux est supérieure chez les obèses. La prise en charge nutritionnelle, nécessaire pour favoriser un amaigrissement, est donc fondamentale dans la stratégie de traitement du lymphœdème.
Autres mesures
L’objectif de ces mesures de prévention est d’éviter l’aggravation du lymphœdème ; elles concernent surtout le membre supérieur. Ces mesures reposent sur des données consensuelles mais empiriques : éviter les activités répétitives (repassage, lavage de carreaux), la prise de la pression artérielle, les prélèvements sanguins, le port de charges lourdes, de sac en bandoulières ou à dos. La surélévation du membre supérieur n’est pas indispensable en raison d’une efficacité très modeste.
Il est très souvent recommandé aux patientes d’éviter les efforts physiques violents (squash, tennis) et/ou répétitifs (step, rameur, aviron). Cependant, ces conseils sont aussi empiriques et des études récentes montrent que les activités physiques apportent plus de bénéfice que d’effets indésirables, sous couvert qu’elles soient progressives et encadrées par des professionnels. Il a été montré que l’activité physique permettait aussi de diminuer les symptômes d’anxiété ou de dépression chez les femmes ayant eu un cancer du sein.
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