La réflexion éthique se réfère aux notions de morale et d’éthique.
« La morale (mœurs) renvoie à des normes, des règles de bien et de mal. En médecine ces règles sont assimilables aux bonnes pratiques cliniques. Le raisonnement éthique ne remet pas en question la morale mais interroge l’action. En médecine, il place le « je » - médecin qui agit- devant la question de l’ « autre », -le patient singulier, absolument singulier pour Hannah Arendt- qui est en face de lui », explique la Dr Dominique Penso-Assathiany. Tenir compte de l’autre, cette personne singulière, et adapter notre raisonnement à cette singularité est une des idées fortes du raisonnement éthique en médecine ».
L’examen de la peau des patients et la demande esthétique
« La façon dont nous examinons les patients est très particulière à la dermatologie. Nous avons les yeux et les mains sur la peau du patient. Il faut savoir comment ne pas être un intrus et ne pas être un voyeur.
Si ne pas être voyeur lorsque le patient se déshabille est universel en médecine, pour ne pas être un intrus, chacun a sa technique mais elle transforme le patient en objet uniquement pendant le temps de l’examen effectué zone anatomique par zone anatomique. Le sujet est reconstitué par la parole pendant ce temps-là et dès que l’examen est terminé. Pour réaliser un examen clinique rigoureux, certains commencent toujours par le cuir chevelu, d’autres par les pieds. Notre main, qui passe légèrement sur la peau pour en évaluer le degré de sécheresse, ne caresse pas. Elle est un outil de perception, un outil du toucher. On pourrait parler de main intelligente. Ce toucher s’oppose à la caresse par le fait que celle-ci n’est pas réalisée que par la main mais par la personne tout entière. À propos du toucher, il est intéressant de réfléchir sur le port systématique de gants par un certain nombre de dermatologues. De quoi est-il symptomatique ? Quant à nos yeux, ils lisent la peau du patient comme un livre ouvert sur sa vie dont il ne nous a pas forcément parlé. Séquelles de coup de soleil, façon d’être ridé, teint gris du tabac, cicatrices de brûlures, tentatives de suicides, etc. Doit-on en parler ? À nous de réfléchir : est-ce nécessaire à l’examen du patient ? Ma curiosité a-t-elle un but médical ou est-elle indiscrétion ? »
Devant une demande esthétique, la première question à se poser est toujours celle de l’indication : est-elle bonne ou mauvaise ? Pour la Dr Penso-Assathiany, ce qui différencie, entre autres, un dermatologue qui fait de la dermatologie esthétique d’une esthéticienne ayant acquis une technicité, c’est le raisonnement médical qui permet, outre le savoir médical, de prendre le patient par la main, de lui faire des propositions ou d’être capable de lui dire « eh bien non, c’est une mauvaise idée ».
Les travaux du GED
Chaque année depuis 2008 le GED travaille sur un thème. Présenté au cours des journées de dermatologie de Paris, illustré d’histoires cliniques, il est débattu avec la salle, puis une synthèse est publiée dans les Annales de Dermatologie et Vénéréologie. Le GED a ainsi travaillé sur : « Prendre des risques pour ces maladies qui empêchent de vivre » ; « L’intervention esthétique » ; « La diversité culturelle » ; « Décider pour autrui » ; « Mentir » ; « Dire non ».
« Notre idée n’est pas d’asséner une vérité, nous n’en avons pas. Nous souhaitons que les dermatologues se retrouvent dans les histoires cliniques présentées, qu’elles suscitent questionnements et réflexion éthique. Notre travail actuel porte sur le respect de l’anonymat des patients pris en photo pour des communications ou pour avis. Cette réflexion proposée par le Pr Olivier Chosidow, ancien président de la SDF, est menée en groupe avec Germain Decroix, (juriste, Le Sou Médical – Groupe MACSF) rédacteur en chef de Responsabilité ».
D’après un entretien avec la Dr Dominique Penso-Assathiany, Issy-les-Moulineaux
(*) Penso-Assathiany D et al. Ann Dermatol Venereol. 2014 Dec;141(12):790-8
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