Diabète de type 1

Deux fois plus malades en quinze ans

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Publié le 19/11/2018
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Crédit photo : PHANIE

L’augmentation importante dans le monde du diabète de type 1 de l’enfant et de l’adolescent se traduit en France par un doublement des cohortes en quinze ans. Dans notre pays, 24 000 enfants ou adolescents, dont un quart ont moins de 5 ans, ont un diabète de type 1. La répartition sur le territoire est hétérogène, avec un taux d’incidence particulièrement élevé en Paca, en Corse (plus de 21 cas pour 100 000 habitants) et dans les Hauts-de-France (19,7 pour 100 000). « On estime qu’il y aura en 2030 plus de 40 000 jeunes de moins de 18 ans atteints. Parmi eux, un quart aura un diabète de type 1 depuis plus de 15 ans, avec toutes les complications chroniques que cela implique, et donc un impact médico-économique important, prévient la Pr Rachel Reynaud du CHU de Marseille. Les diabétologues pédiatres doivent se préparer à cette augmentation dès à présent. Les autres spécialistes prenant en charge les complications, ainsi que les économistes de la santé, doivent tenir compte de cet afflux de patients si le parcours de soins n’est pas amélioré dans notre pays. Dès à présent, le coût médical (3 930 € par an et par enfant) est multiplié par 7,7 par rapport à un enfant du même âge qui n’a pas de diabète de type 1. Il reste à estimer quel serait le coût sociétal avec ou sans plan spécifique. »

Une prise en charge très spécialisée

Face à ces constats, l’International Society of Pediatric and Adolescent Diabetes (ISPAD) a émis des recommandations : l’objectif à atteindre est une hémoglobine glyquée HbA1c inférieure à 7,5 % pour diminuer le risque de complications à long terme. « Pour y parvenir, outre le respect des bonnes pratiques, il faut des centres de référence avec une expertise multidisciplinaire, explique la Pr Reynaud, et, idéalement, pour 100 patients, 0,75 pédiatre diabétologue, 1 infirmier spécialisé en diabétologie pédiatrique, 0,5 diététicien et 0,3 assistant social et/ou psychologue. Le Sweet Pediatric Diabetes va même plus loin en préconisant non pas 0,75 mais 1 pédiatre diabétologue pour 100 patients. Or nous en sommes loin, avec 0,45 équivalent temps plein, et, en ce qui concerne le temps paramédical, nous n’atteignons pas la moitié de ce que préconisent ces recommandations. »

Un gain médico-économique à la clé

« Il y a urgence à constituer un observatoire national du diabète pédiatrique, développer des actions de prévention de l’acidocétose [lire ci-XXX] et évaluer les politiques de santé, résume la Pr Reynaud. Dans un Livre blanc concernant le DT1 de l’enfant, rédigé par la Société française d’endocrinologie et diabétologie pédiatrique et l’association Aide aux jeunes diabétiques, l’AJD, nous demandons la création de centres de ressources et de compétences du diabète pédiatrique, avec des plateformes d’appui régionales et des centres relais pour un meilleur maillage territorial. Dans ces CRCDP, un renforcement des équipes serait nécessaire, mais cet investissement initial permettrait à la fois des actions de prévention de l’acidocétose et les réductions des complications chroniques, comme cela a été démontré lors d’expériences internationales. Une réflexion autour des équipes mobiles et des consultations de télémédecine accessibles à tous les diabétiques de type 1 (sans contrainte d’âge) doit aussi être menée. Les formations nationales sont en cours de développement, aussi bien pour les médecins (un DIU de diabétologie pédiatrique) que pour les paramédicaux (des formations assurées par l’AJD). »

Par ailleurs, l’AJD fait un énorme travail pour proposer des séjours d’éducation thérapeutique aux jeunes diabétiques au sein de neuf établissements de soins de suite et de réadaptation. Plus de 1 200 enfants en bénéficient chaque année.

« Tout cela demande des moyens conséquents, mais le mouvement européen Sweet, qui étudie l’évolution des prises en charge en fonction de la réorganisation, montre que, lorsqu’elles sont bien pensées, les coûts de santé diminuent », souligne la Pr Reynaud.

« Le parcours de soins devra être revu pour faire face à un afflux de patients et de complications »

Entretien avec la Pr Rachel Reynaud, pédiatre à l’hôpital de la Timone à Marseille et présidente de la Société française d’endocrinologie et diabétologie pédiatrique (SFEDP).

Dr Nathalie Szapiro

Source : Bilan Spécialiste