« Hold-up sur la fertilité ». L’intitulé de la conférence organisée mardi à l’Assemblée nationale par le Réseau environnement santé (RES) sur les phtalates et perturbateurs endocriniens a le mérite d’interpeller. Couramment utilisés dans des domaines aussi divers que l’industrie automobile, les peintures, les encres d’imprimerie, le matériel médical, les médicaments, les cosmétiques ou les emballages alimentaires, certains phtalates font en effet l’objet d’un classement comme substance à risque reprotoxique (DEHP, BBP, DIPP, DMEP, DnPP et DBP). « Aujourd’hui, on entre dans une période de changement de paradigme aussi bien scientifique que politique », considère André Cicolella, président du RES qui appelle à une profonde action réglementaire sur l’ensemble des perturbateurs endocriniens (PE) dont les phtalates. Si à l’échelle européenne, la référence aux substances chimiques PE est intégrée dans plusieurs réglementations sectorielles comme les pesticides, les biocides et les substances chimiques de synthèses (REACH), ces textes ne précisent pas quelles substances sont considérées comme PE ni sur quelle base elles sont identifiées comme telles. L’enjeu actuel consiste donc à fixer des critères communs d’identification des substances chimiques PE. Pour identifier ces substances, il faut tout d’abord sortir du schéma classique des observations aux doses élevées pour prédire les effets à des doses plus faibles, rappelle le Dr Rémi Slama, épidémiologiste et président du conseil scientifique du programme national de recherche sur les perturbateurs endocriniens (INSERM).
Rôle de l’industrie.
Se pose aussi le problème des co-expositions et le besoin de prendre en compte un large spectre d’expositions environnementales nécessitant de développer d’importantes études de cohorte. Si la recherche autour des perturbateurs endocriniens s’est aujourd’hui décloisonnée, les projets scientifiques restent pour l’essentiel modestement soutenus, déplore le Dr Slama. Au niveau politique, la députée européenne Michelle Rivasi témoigne de la difficulté d’obtenir un consensus politique sur ce sujet « avec des groupes d’élus conservateurs qui ne veulent pas réglementer et ne sont pas très axés sur la santé ». Invité de ce colloque, le député PS Gérard Bapt, président du groupe d’étude « santé environnementale » de l’assemblée nationale pointe des « résistances » à l’échelle européenne émanant de certains cercles d’experts complaisants. Pour Michelle Rivasi, « tant qu’on n’aura pas mis en place une structure de contrôle des conflits d’intérêt, on ne s’en sortira pas ». Outre une volonté politique, il faut aussi savoir s’adresser à l’industrie qui ne doit pas être considérée comme un obstacle, ajoute Gérard Bapt. Le député prend l’exemple du DEHP. « Une aberration d’autant que l’industrie aujourd’hui est capable de produire des dispositifs médicaux sans cette substance. À l’image d’une entreprise française de la banlieue de Roanne (Loire) qui envoie davantage sa production aux États-Unis que dans les hôpitaux français », évoque-t-il. Une dynamique de substitution des phtalates dans les centres de soin est toutefois en cours, souligne Wiebke Winkler chargée de mission au Comité pour le développement durable en santé (C2DS) qui fait état de « résultats très encourageants » parmi les établissements membres du comité.
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