« Il ne s’agit de recommandations mais d’une prise de position de la SFD. Aujourd’hui, seule la Haute Autorité de santé (HAS) est habilitée à faire des recommandations dans ce domaine. En tant que société savante, nous avons rédigé une prise de position qui, on l’espère, servira de base aux prochaines recommandations de la HAS. Nous avons fait une version courte et une version longe », indique le Pr Pierre Fontaine, chef du service de diabétologie du CHRU de Lille et président de la Société francophone du diabète.
Ce dernier espère que les recommandations de la HAS sur la prise en charge des patients atteints du diabète de type 2 seront présentées au premier semestre 2018. « Il est temps de réactualiser le texte de 2013 car ces dernières années sont apparues de nouvelles thérapeutiques et de nouvelles études, notamment sur la sécurité cardiovasculaire des médicaments », souligne-t-il.
Alimentation saine et pratique d'une activité physique
En 2013, la HAS avait d’abord insisté sur l’importance d’adopter une alimentation saine et équilibrée et de pratiquer régulièrement une activité physique ou sportive. « En effet, faire perdre du poids au patient peut aider à baisser la glycémie (près de 80 % des diabétiques sont en surpoids ou obèses) », soulignait alors la HAS. Selon le Pr Fontaine, ce premier objectif reste plus que jamais d’actualité. « Inciter les patients à adapter une bonne hygiène de vie est bien sûr essentiel », souligne le Pr Fontaine.
Le texte de 2013 ajoutait que si les mesures hygiénodiététiques ne suffisaient pas ou plus pour atteindre l’objectif glycémique cible, le médecin, en concertation avec son patient, devait alors prescrire un traitement médicamenteux. Avec la metformine seule en première intention. « Si le traitement par metformine ne permet plus d’atteindre l’objectif glycémique cible, une bithérapie puis éventuellement une trithérapie pourront être envisagées sur la base d’une association de metformine et de sulfamide hypoglycémiant. L’insuline est le traitement de choix lorsque les traitements oraux et non insuliniques ne permettent pas d’atteindre l’objectif glycémique. Du fait d’une efficacité moindre, d’un manque de recul sur leur sécurité à moyen et long terme et/ou d’un coût supérieur, les autres traitements doivent être réservés aux situations dans lesquelles les traitements recommandés en première intention ne peuvent pas être prescrits », ajoutait la HAS.
Une prise de position pour les biosimilaires
Le fait de privilégier les thérapeutiques les plus anciennes au détriment de molécules plus récentes doit être reconsidéré pour le Pr Fontaine. « On invoque souvent une question de sécurité et de coût pour prioriser les molécules anciennes. Mais sur ce point, les choses ont évolué. Pour les molécules anciennes, on ne dispose pas d’études spécifiques, par exemple sur la sécurité cardiovasculaire. Il n’y a pas non plus d’études sur des populations spécifiques, en particulier les patients âgés ou en insuffisance rénale. Or, aujourd’hui, ces études spécifiques sont disponibles pour les nouvelles thérapeutiques. Par ailleurs, nous avons évidemment, le souci de soigner nos patients le mieux possible au meilleur coût pour la collectivité. C’est la raison pour laquelle, nous prenons clairement position pour les biosimilaires. Mais il faut aussi prendre en compte la dimension médico-économique dans une vision globale, et ne pas raisonner à partir du coût d’une boîte de médicament. Il faut regarder le coût de l’ensemble de la stratégie thérapeutique mise en œuvre pour le patient. Si un traitement permet d’éviter de faire de l’autosurveillance, réduit le risque d’hypoglycémie ainsi que le nombre d’hospitalisations, au bout de 5 ans, il y a de fortes chances que le rapport coût-efficacité de cette stratégie soit plus favorable qu’un traitement par molécule plus ancienne », indique le Pr Fontaine.
Dans sa prise de position, la SFD détaille les stratégies thérapeutiques dans tous les cas de figure et en fonction du profil des patients : âgés de plus de 75 ans, en insuffisance rénale chronique, en situation d’obésité, en prévention cardiovasculaire secondaire, en insuffisance cardiaque… « Il est indispensable de faire une médecine de précision et la plus personnalisée possible », indique le Pr Fontaine en insistant sur la nécessité de définir des critères précis pour évaluer l’efficacité d’un traitement. « Il faut aussi définir des règles d’arrêt. Au bout de 3 à 6 mois de traitement, il faut toujours évaluer l’efficacité du traitement quitte à l’arrêter si cela est nécessaire ».
Remise en cause des thérapeutiques en dehors de la metformine
Pour le Pr Fontaine, il faut en finir avec la stratégie d’empilement parfois privilégiée, notamment lors de la mise sous insuline. « Dans le diabète de type 2, elle apparaît parfois un peu trop tard. C’est un moment important qui doit être l’occasion de revoir la gestion de l’activité physique mais aussi de remettre en cause les thérapeutiques associées, en dehors de la metformine. En dehors de la metformine, on peut arrêter les autres thérapeutiques, quitte à en ré-introduire une par la suite, mais pas forcément d’empiler trois ou quatre autres traitements », indique le Pr Fontaine.
En 2013, la HAS soulignait que taux d’HbA1C devait être adapté par le médecin au profil du patient et évoluer au cours du temps. « Pour la plupart des diabétiques de type 2, l’objectif glycémique cible doit être inférieur ou égal à 7 % », soulignait la Haute Autorité. « Pour la plupart des patients, cet objectif de 7 % reste recommandé. Mais on peut fixer un objectif de 6,5 % pour les patients dont le diabète est récent et dont l’espérance de vie est supérieure à 15 ans et sans antécédent cardiovasculaire, à condition que les traitements ne provoquent pas d’hypoglycémie », indique le Pr Fontaine.
Ce dernier plaide enfin pour que soient accessibles en France deux classes d’agents antihyperglycémiants : les thiazolidinediones et les inhibiteurs des cotransporteurs sodium-glucose de type (iSGLT2). « Il y a une perte de chance pour des patients ayant une fonction cardiaque altérée. Nous sommes même en mesure de calculer le nombre de morts qu’on pourrait éviter si ces thérapeutiques étaient disponibles en France », indique le Pr Fontaine.
D’après un entretien avec le Pr Pierre Fontaine, chef du service de diabétologie du CHRU de Lille et président de la Société francophone du diabète (SFD).
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