L’élastométrie impulsionnelle du foie (fibroscan) est une méthode bien validée d’évaluation de la fibrose dans l’hépatite chronique C. Dans la cirrhose biliaire primitive (CBP) et la cholangite sclérosante primitive (CSP), les valeurs du fibroscan sont non seulement corrélées à la fibrose histologique mais ont aussi une valeur pronostique en terme de survie sans complications hépatiques. En particulier, une augmentation au cours de l’évolution est de pronostic défavorable. Une évaluation annuelle par fibroscan apparaît donc indiquée dans le suivi des CBP et des CSP.
L’évolution des tests hépatiques est l’autre principal facteur pronostique. Dans la CBP, l’acide ursodésochycholique (AUDC) est actuellement le seul médicament d’efficacité prouvée et administré systématiquement. Cependant, environ 1/3 des patients gardent, sous AUDC, des anomalies significatives des tests hépatiques. Plusieurs études ont montré que la persistance de ces anomalies a une valeur pronostique péjorative. Ceci a été confirmé par une étude internationale (1) sur plus de 4 000 patients avec CBP : une bilirubinémie supérieure à la normale (N) et/ou des phosphatases alcalines (PAL) supérieures à 1,5-1,67 N sont des facteurs de mauvais pronostic. Dans la CSP, pour laquelle aucun traitement n’a fait la preuve de son efficacité en terme de survie sans transplantation, des PAL supérieures à 1,5 N semblent également un élément de mauvais pronostic. La détermination de ces facteurs pronostiques permet d’identifier facilement les patients devant bénéficier d’autres approches thérapeutiques.
De nouvelles pistes thérapeutiques
De nombreux progrès ont été accomplis dans le domaine de la physiologie des acides biliaires, permettant d’identifier de nouvelles cibles thérapeutiques dans les maladies cholestatiques et de mettre en évidence le rôle des acides biliaires comme « modulateurs métaboliques », avec de possibles applications dans le syndrome métabolique et la stéatohépatite. Deux classes médicamenteuses ont un développement clinique avancé dans la CBP, mais aucune ne dispose actuellement d’une autorisation de mise sur le marché (AMM). La première est représentée par les agonistes du farnesoid X recepteur (FXR), récepteur nucléaire dont la stimulation déclenche une réponse coordonnée permettant de protéger l’hépatocyte vis-à-vis de l’accumulation d’acides biliaires. L’acide obeticholique (AOB) est un acide biliaire synthétique ayant une forte activité agoniste FXR. Dans une grande étude randomisée de phase 2 (2), il a été observé une diminution significative des enzymes hépatiques, notamment des PAL (de l’ordre de 25 %) et des acides biliaires. L’effet secondaire principal a été la survenue ou la majoration d’un prurit mais une modulation de la posologie semble en limiter l’incidence sans diminuer l’efficacité biochimique. La seconde classe médicamenteuse, beaucoup plus ancienne, est celle des agonistes PPAR (fibrates) qui, outre leur action anti-inflammatoire, diminuent la synthèse des acides biliaires et modulent la composition de la bile. De nombreuses études non randomisées ont montré une amélioration spectaculaire des tests hépatiques. Des essais de phase 3 sont en cours. Il est hautement probable que ces molécules viendront seconder notre « bon vieil » AUDC dans les années à venir.
Changement de nom ?
La CBP va très probablement changer de nom à la demande, très forte, des patients ! En effet, le terme « cirrhose » ne reflète plus la réalité. Il a une signification pronostique défavorable et reste sociologiquement associé à une consommation excessive d’alcool… Heureusement, l’acronyme CBP devrait persister. Le terme a priori retenu est malheureusement un affreux pléonasme « Cholangite Biliaire Primitive » puisqu’une cholangite est nécessairement biliaire…
(1) Lammers WJ et al. Gastroenterology 2015 Aug 7. pii: S0016-5085(15)01094-X. doi: 10.1053/j.gastro.2015.07.061
(2) Hirschfield GM et al. Gastroenterology 2015;148(4):751-61
CCAM technique : des trous dans la raquette des revalorisations
Dr Patrick Gasser (Avenir Spé) : « Mon but n’est pas de m’opposer à mes collègues médecins généralistes »
Congrès de la SNFMI 2024 : la médecine interne à la loupe
La nouvelle convention médicale publiée au Journal officiel, le G à 30 euros le 22 décembre 2024