LA PRODUCTION d’hormones par le pancréas est assurée par la partie endocrine de l’organe, organisée en îlots de Langerhans. Ils sont composés de cellules alpha, bêta, delta et PP qui synthétisent respectivement le glucagon, l’insuline, la somatostatine et le polypeptide pancréatique.
La longévité des cellules bêta est grande, elles prolifèrent donc peu au cours de la vie. Dans certaines circonstances où la demande en insuline est accrue, comme l’obésité ou la grossesse, la taille et le nombre des cellules bêta peuvent augmenter. À l’inverse, en cas de diabète de type 1, les cellules bêta sont éliminées par le système immunitaire. Les complications de la maladie justifient donc le développement des approches innovantes de médecine dite régénérative.
Telle est la piste explorée par PL Herrera et coll. (Genève). Ils ont, en effet, tenté de savoir si le pancréas adulte est capable de générer de nouvelles cellules bêta après leur perte quasi totale, donc en dehors de toute prolifération, c’est-à-dire dans une situation comparable à celle du diabète de type 1 (1,2).
Pour cela, ces auteurs ont mis au point un modèle de souris diabétique transgénique. Un transgène permettant l’expression du récepteur de la toxine diphtérique (DTR) sous l’influence du promoteur de l’insuline (RIP) a été inséré à cet effet dans le génome de la souris. Lorsque le promoteur de l’insuline est activé, le récepteur de la toxine diphtérique est ainsi exprimé exclusivement dans les cellules ?êta. L’injection de toxine diphtérique chez ces souris « RIP-DTR » provoque ainsi la destruction des cellules bêta. Les animaux deviennent rapidement hyperglycémiques et développent les symptômes liés au diabète. En l’absence d’insulinothérapie, ils décèdent rapidement.
Une reprogrammation spontanée des cellules alpha.
Les auteurs ont constaté qu’une réduction de 50 à 80 % du nombre de cellules bêta induit une prolifération des cellules bêta restantes. Mais lorsque les cellules bêta sont complètement détruites, de nouvelles cellules bêta apparaissent dans les îlots de Langerhans et le contrôle glycémique est spontanément amélioré en quelques mois chez des animaux. Certaines de ces cellules bêta sont étrangement « hybrides » ou « bihormonales », car elles contiennent simultanément de l’insuline et du glucagon, ce qui ne s’observe pas dans le tissu pancréatique adulte sain. Le marquage irréversible des cellules bêta à l’aide d’un traceur fluorescent a permis de montrer que les cellules bêta néoformées ne provenaient pas de l’expansion des très rares cellules bêta ayant échappé à la mort induite par la toxine diphtérique. En revanche, le traçage des cellules alpha a montré qu’elles étaient à l’origine des cellules « bihormonales » ainsi que de la plupart des cellules contenant uniquement de l’insuline.
Les cellules bêta ainsi régénérées chez des animaux sont pleinement fonctionnelles et elles expriment, non seulement l’insuline, mais aussi les facteurs indispensables à leur bon fonctionnement.
Il semble donc que l’équipement génétique des cellules alpha du pancréas est capable de se reprogrammer pour produire des cellules bihormonales, dont le phénotype hybride est intermédiaire, avant que ces dernières n’acquièrent l’ensemble des caractéristiques fonctionnelles des cellules bêta.
Un phénomène mal compris.
Cette reprogrammation cellulaire, également nommée plasticité ou transdifférenciation, est un phénomène rare et peu décrit. Elle peut être provoquée, sous l’influence de facteurs de transcription, mais aussi spontanée, en réponse à une perte quasi totale de cellules bêta. Des travaux complémentaires sont nécessaires pour préciser si la transdifférenciation en cellules bêta peut également concerner d’autres types cellulaires, endocrines ou exocrines.
Il reste à mettre en évidence les voies de signalisation et les événements moléculaires conduisant à cette régénération cellulaire afin d’identifier des pistes thérapeutiques éventuelles.
D’après la communication de PL Herrera (Département de physiologie cellulaire et métabolisme, faculté de médecine, université de Genève, Suisse), séance plénière 1 « Nouveaux développements thérapeutiques ».
(1) Thorel F, Herrera PL. Génération de cellules beta-pancréatiques par conversion spontanée de cellules alpha chez des souris diabétiques. médecine/sciences 2010;26(11):906-9.
(2) Thorel F, et coll. Conversion of adult pancreatic alpha-cells to beta-cells after extreme beta-cell loss. Nature 2010;464:1149-54.
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