Par le Pr Serge Rohr*
LES COMPLICATIONS infectieuses constituent le risque principal de l’emploi de prothèse non résorbable, amenant l’ablation du matériel dans plus de 80 % des cas. De ce fait, les prothèses non résorbables sont contre-indiquées en présence d’une éventration infectée (avec présence d’un abcès pariétal ou d’une fistule chronique) ou d’une éventration à risque d’infection (étranglement ou chirurgie associée à l’ouverture du tube digestif).
Évolution des biomatériaux.
Initialement, les seuls biomatériaux autorisés étaient synthétiques (à base de polyglactine), avec une résorption très rapide (perte de 60 % de la résistance de l’implant à 21 jours) et un taux de récidive de 75 % de l’éventration.
Par la suite, des biomatériaux à base de collagène ont été mis sur le marché. Il s’agit de matrices de collagène décontaminé et décellularisé ayant ainsi conservé les caractéristiques du tissu original. Cette matrice est recolonisée par les cellules mésenchymateuses de l’hôte (fibroblastes) avec activation des néovaisseaux (angiogenèse) facilitant la cicatrisation.
Ces prothèses sont soit des allogreffes employant la peau de cadavres humains (prothèses non autorisées en France), soit des xénogreffes utilisant du derme de porc ou du péricarde bovin.
Il existe deux grands types de prothèses biologiques selon qu’elles sont ou non réticulées (crosslinked pour les Anglo-Saxons). La réticulation correspond à un tannage clinique de la prothèse, la rendant plus solide à la dégradation.
La fréquence des infections, avec ces prothèses biologiques, est de l’ordre de 10 % et le taux de récidive de l’éventration de l’ordre de 20 %. Les infections en regard de la prothèse sont, dans 10 % des cas, des collections aseptiques qui ne nécessitent pas l’ablation systématique de la prothèse. Par ailleurs, le risque de fistule au contact de la prothèse avoisine les 3 %, taux faible par rapport à celui des prothèses non résorbables. Cependant, les complications et les résultats de ces prothèses méritent encore d’être précisés en raison de bases de données incomplètes avec des études souvent rétrospectives employant préférentiellement des prothèses ayant un tannage chimique.
Il ressort néanmoins des études expérimentales sur des modèles porcins que les infections de ces prothèses employées en milieu septique sont rares et que les adhérences à l’intestin sont plus marquées avec les prothèses avec tannage qu’avec les autres. Les prothèses non tannées ont une infiltration cellulaire plus précoce et un potentiel angiogénique plus marqué que les prothèses tannées, pouvant peut-être les faire privilégier en présence d’une éventration en milieu infecté.
Perspectives.
De ce fait, les premières expériences avec ces prothèses ont montré une certaine utilité dans les éventrations septiques ou potentiellement septiques. Il reste toutefois à déterminer avec plus de précision le type exact de prothèse (crosslinked ou non crosslinked) à employer en prenant en compte le type d’éventration (milieu infecté ou potentiellement infecté) et le terrain du patient (diabète, tabac, obésité).
La seule certitude concerne le coût de ces prothèses qui est toujours élevé pouvant atteindre 10 000 euros.
* CHRU, Strasbourg.
Références
Bellows CF, Jian W., Mc Hale MK, Cardenas D et al. Blood vessel matrice: a new alternative for abdominal wall reconstruction. Hernia 2008, 47: 1-14.
Harth KC, Rosen MJ. Major complications associated with xenogreft biologic Mesh implantation in abdominal wall reconstruction. Surgical Innovation 2009, 16: 324-329.
Butler CE, Burns NK, Campbell KT, Mathur AB et al. Comparison of crosslinked and non crosslinked porcine acellular dermal matrices for ventral hernia repair. J Am Coll Surg 2010, 211: 368 – 376.
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