L'étude a été publiée cette semaine dans PLoS ONE*. Son principal auteur est l'anthropologue Yves Gleize, de l'Institut national de recherches archéologiques préventives (INRAP). Lequel a résumé ainsi à l'AFP le résultat des recherches multidisciplinaires entreprises sur trois tombes découvertes en 2006 dans la ville de Nîmes (avenue Jean-Jaurès, pour être précis) : « L'analyse archéologique, anthropologique et génétique de ces sépultures du début de l'époque médiévale fournit des preuves matérielles d'une occupation musulmane au VIIIe siècle dans le sud de la France. »
Dit comme ça, cela n'a l'air de rien mais les conclusions auxquelles sont arrivés conjointement archéologues, anthropologues et paléogénéticiens sont historiquement renversantes. Remontant la piste de trois dents prélevées sur chacun des trois squelettes retrouvés dans chacune des trois sépultures nîmoises, elles apportent en effet le premier indice de la présence de communautés de musulmans dans le sud de la France au début du Moyen-Âge.
Jusqu'ici, si des manuscrits évoquaient cette installation « sarrasine » de ce côté-ci des Pyrénées**, rien de plus concret que des traces archéologiques de commerce (tessons de céramique, pièces de monnaie, sceaux) ne venait l'attester.
Une preuve consistante
Avec les trois squelettes de Nîmes, la preuve est autrement plus consistante. L'emplacement des corps, le sexe et l'âge des défunts, leur disposition dans les tombes, les hypothèses relatives aux causes de leur décès… sont autant de pistes. Et surtout, l'ADN parle.
Les morts, révèlent les analyses, sont passés de vie à trépas entre les VIIe et IXe siècles***. De sexe masculin, ils étaient âgés à leur décès de 20 à 29 ans pour l'un, d'une trentaine d'années pour le deuxième, et de plus de 50 ans pour le troisième. Les recherches ostéologiques de blessures au combat n'ont rien donné.
Leur lignée génétique paternelle (la lignée maternelle ne permet pas d'interprétation) conduit à des ancêtres nord-africains. Il s'agit, précise l'étude, d'une lignée particulièrement présente au sein de la population berbère (où on l'identifie avec une fréquence de 70 %).
L'ensemble des données recueillies dans les trois tombeaux conduit les chercheurs à penser que leurs occupants étaient des Berbères enrôlés par le califat omeyyades (661-750) durant sa conquête de l'Afrique du Nord au VIIIe siècle – les mêmes Omeyyades régneront ensuite en Espagne (756-1031). CQFD.
* Gleize Y, Mendisco F, Pemonge M-H, Hubert C, Groppi A, Houix B, et al. « Early Medieval Muslim Graves in France : First Archaeological, Anthropological and Palaeogenomic Evidence », PLoS ONE.
** Les Chroniques de Moissac et d'Uzès évoquent une telle présence entre 719 et 752. Cinq ans après après son coup d'éclat à Poitiers, Charles Martel aurait chassé les Sarrasins de Nîmes en 737 mais… ils seraient revenus et c'est un certain Ansemundus (ou Misemundus), Goth de son état, qui aurait finalement bouté l'envahisseur hors de la région.
*** Jusqu'aux trois squelettes de Nîmes, la plus ancienne sépulture musulmane répertoriée en France était à Marseille et datait du XIIIe siècle.
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