DE NOTRE ENVOYÉ SPÉCIAL
«DÉSORMAIS, on arrête le temps ! », se félicite Muriel Lopes, médecin, spécialiste en biologie de la reproduction. Devant les grandes cuves où sont plongés actuellement plus de 100 ovocytes, ce médecin et son collègue biologiste Jean-François Griveau, expliquent le grand intérêt de cette nouvelle technique de la vitrification pour leurs patientes.
« À Rennes, nous sommes parmi les centres qui reçoivent le plus de dons d’ovocytes, autour de 50 à 60 par an, précise Muriel Lopes. Avec le Pr Dominique Le Lannou, l’ancien chef de service, nous nous sommes dit que leur vitrification allait permettre de simplifier grandement la procédure du don et sa gestion. Nous pouvons maintenant dissocier les cycles menstruels de la donneuse et des receveuses. Auparavant, nous devions préparer l’endomètre de ces receveuses avec un traitement hormonal pour qu’elles soient prêtes à l’implantation d’un embryon, tout en les synchronisant avec le prélèvement des ovocytes de la donneuse. Ce qui était très complexe.»
L’équipe du service de biologie de la reproduction du CHU de Rennes a alors mené une phase expérimentale, surtout pour vérifier si les cellules étaient intactes après décongélation. Pour aboutir à ce résultat, on fait passer la cellule de l’état liquide (elle est composée dans son état initial de 95 % d’eau) à un état solide vitreux de manière extrêmement rapide, pour éviter la phase au cours de laquelle des cristaux de glace se composent. « Ces cristaux ont un effet particulièrement délétère sur l’intégrité de l’ovocyte », souligne le Dr Muriel Lopes.
L’ovocyte mature (c’est-à-dire prête à être fécondé) est ainsi exposé à des cryoprotecteurs, puis est inséré dans un dispositif et plongé dans de l’azote liquide (soit à –196°C). Rennes a recours au dispositif dit fermé qui a été préféré au dispositif ouvert, majoritairement utilisé dans les autres centres et à l’étranger. « Cela signifie que la cellule n’entre pas directement en contact avec l’azote liquide qui n’est pas un milieu stérile, explique Muriel Lopes. Nous évitons ainsi tout risque de contamination.» A noter que certains centres filtrent leur azote.
Les essais ayant été concluants, les premières opérations de vitrification d’ovocytes de donneuses ont eu lieu au printemps 2012. La première grossesse s’est déclarée en juin suivant. Le CHU a accueilli son premier bébé issu d’un ovocyte congelé de donneuse en janvier 2013. Le cinquième enfant est né le 24 août dernier.
Plusieurs autres grossesses en cours.
L’analyse des prélèvements montre que 75 à 80 % des cellules vitrifiées sont intactes après réchauffement. Muriel Lopes considère que le taux de survie devrait pouvoir encore s’améliorer grâce à des milieux et des dispositifs plus performants. On parle, il est vrai, d’une technique encore très récente. En dispositif dit ouvert, le taux de survie se situe plutôt autour de 90 %.
Quel que soit le type de vitrification retenue, la performance de ces ovocytes de donneuses semble être équivalente aux ovocytes frais. Si l’on perd malgré tout des ovocytes (puisque tous ne survivent pas à leur congélation), leur désormais possible conservation représente au final une augmentation d’ovocytes mis à disposition. En effet, l’équipe peut non seulement mettre en banque tous les ovocytes matures des donneuses, mais d’autres indications de vitrification ovocytaire sont désormais apparues notamment pour préserver la fertilité des femmes qui vont subir un traitement médical susceptible de provoquer une stérilité. Auparavant lors de tentatives en intra-conjugal, des ovocytes inutilisés dans l’instant pouvaient être jetés.
A Rennes, en moyenne 6 ovocytes de donneuses sont attribués à chaque couple receveur. Cette technique de vitrification ovocytaire permet in fine une optimisation de l’utilisation des ovocytes et la répétition des tentatives, tout en diminuant la congélation embryonnaire, conformément aux recommandations de la loi de bioéthique.
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