Que penser des panels de gènes dans le cancer du sein ?

Par
Publié le 12/03/2021
Article réservé aux abonnés

« En faire plus, ce n'est pas forcément faire mieux », estime le Pr Pascal Pujol, président de la Société française de médecine prédictive et personnalisée, à propos des panels de gènes dans le cancer du sein. « Personne ne teste les mêmes gènes, personne n'est d'accord », rapporte-t-il.

La situation est-elle plus claire avec les deux grandes études en population publiées récemment dans le « New England Journal of Medicine » ? Le Breast Cancer Consortium (1) a évalué 34 gènes de susceptibilité chez plus de 113 000 femmes de 25 pays. Une équipe coordonnée par la Mayo Clinic (2) l'a fait pour 28 gènes chez plus de 64 000 femmes américaines du consortium Carriers. Il en ressort que huit gènes sont associés de manière significative au risque de cancer du sein : BRCA1, BRCA2, PALB2, BARD1, RAD51C, RAD51D, ATM et CHEK2.

Pour le Pr Pujol, ces résultats ne changent pas grand-chose. « Seule la recherche de BRCA1/2 en préventif est validée avec une prise en charge claire à la clé, explique l'oncogénéticien. Pour les autres gènes, on ne sait pas quel suivi mettre en place : faut-il faire une IRM ? À quel âge ? Ajouter une surveillance du côlon ou du pancréas selon le gène, CHEK2 ou ATM ? ».

Les mutations BRCA1/2 représentent 90 % des prédispositions familiales aujourd'hui identifiables au cancer du sein, les autres gènes 10 %. « Pour BRCA1 et 2, le risque cumulé de cancer du sein à l'âge de 80 ans est de 72 et 69 %, quand il n'est que de 20-25 % sur toute la vie pour ATM et CHEK2, les deux gènes les plus fréquents après BRCA, sachant que le risque est de 10 % en population générale », souligne le Pr Pujol.

Dans ce contexte, est-il légitime d'inquiéter des femmes qui ont 80 % de chance de ne jamais faire de cancer du sein ? « Il est impossible de raisonner avec des probabilités au niveau individuel, estime le Pr Pujol. Une fois informées qu'elles sont porteuses d'une mutation, les femmes peuvent vouloir une mastectomie. Le mal est fait. On va trop loin aujourd'hui. Il est inutile de rendre des résultats sans avoir de stratégies à proposer derrière. Il faut résolument poursuivre l’évaluation de modalités de prévention dans ces nouvelles situations ».

Breast Cancer Consortium, NEJM, 2021. DOI:10.1056/NEJMoa1913948
C.Hu et al, NEJM, 2021. DOI:10.1056/NEJMoa2005936


Source : Le Quotidien du médecin