Depuis le début du mois de décembre, le Royaume-Uni, les États-Unis et le Canada ont commencé une campagne de vaccination avec le vaccin BNT162b développé par Pfizer et BioNTech. Ce vaccin à ARNm stabilisé, le premier du genre à être commercialisé, a donc remporté la course de vitesse à laquelle se sont livrés une dizaine de candidats au cours de l’année écoulée, sur les 236 vaccins recensés.
Le vaccin de Pfizer et BioNTech a notamment obtenu une autorisation de mise sur le marché (AMM) aux États-Unis, en Angleterre et au Canada. En Europe, l’Agence du médicament (EMA) a annoncé tenir une réunion spéciale le 21 décembre (le résultat n’est pas connu au moment de l’écriture de ce texte). Une fois que la Haute Autorité de santé (HAS) aura rendu son avis – elle a indiqué être prête –, « la vaccination en France pourra théoriquement commencer ensuite », a expliqué le Pr Alain Fischer, lors d’une audition par la commission des Affaires sociales du Sénat. Soit fin décembre comme l’a annoncé le gouvernement.
Vaccins à ARN efficaces à 95 %
Sur la base de projections, les firmes Pfizer et BioNTech ont d’ores et déjà déclaré qu’elles prévoyaient de fournir jusqu’à 50 millions de doses de vaccins dans le monde en 2020 et jusqu’à 1,3 milliard de doses en 2021. La Commission européenne a conclu un accord en septembre pour obtenir 200 millions de doses du vaccin Pfizer-BioNTech, avec une option pour 100 millions de doses supplémentaires.
Diffusées d’abord par voie de communiqué de presse en novembre, puis confirmées par un document rendu public par la Food and Drug Administration, les données d’efficacité de BNT162b sont de l’ordre de 95 %, au cours d’un suivi médian de deux mois après la seconde injection. Les données de sécurité se veulent rassurantes : aucun signal majeur n’a été relevé par les expérimentateurs.
Le deuxième vaccin le plus proche d’une mise sur le marché est un autre vaccin à ARNm : le MRNA-1273 développé par la firme américaine Moderna. Le comité de surveillance et de sécurité de l’essai de phase 3, en cours, a publié des données intermédiaires au moins aussi encourageantes que celles de Pfizer. Il y est fait état de 95 cas d’infections par le SARS-CoV-2 sur l’ensemble des quelque 30 000 volontaires de l’étude, dont 90 dans le groupe placebo et 5 dans le groupe vacciné, soit un taux d’efficacité de 94,5 %.
Longtemps le plus avancé, le vaccin italo-britannique à vecteur adénoviral développé par AstraZeneca, appelé AZD1222 (ou ChAdOx1 initialement), s’est fait doubler. Toutefois, il est le premier à avoir publié des résultats intermédiaires validés par les pairs chez 23 745 volontaires suivis en médiane 3,4 mois : l’efficacité est de 70 % en moyenne après la première des deux doses nécessaires et, de manière surprenante, de 90 % pour le schéma à mi-dose. Mais l’effectif étant insuffisant dans ce sous-groupe pour affirmer le résultat, une étude complémentaire a été demandée. Le vaccin AZD1222 présente l’avantage de pouvoir être conservé entre 2 et 8°C, alors que les vaccins ARN de Pfizer et de Moderna doivent être conservés à -70°C et -20°C.
Des candidats en Chine, Inde et Russie
Si Pfizer et Moderna sont en pole position en Occident, c’est en grande partie parce que l’ARN est une molécule facile à produire, rapidement et en très grand nombre. D’autres vaccins plus conventionnels sont toutefois développés en Chine, en Russie et en Inde. Trois vaccins chinois et un indien basés sur des versions atténuées du SARS-CoV-2 sont en phase 3. En Chine, le candidat mis au point par Sinopharm est déjà employé pour des campagnes de vaccination ciblées et une demande d’AMM est en cours par les autorités du pays. En Inde, le vaccin vivant atténué, développé par Bharat Biotech, le Conseil indien de recherche médicale et l’Institut national de virologie, devrait être administré en 2021.
Les chercheurs chinois travaillant sur des vaccins à base de virus inactivé ont récemment publié des données sur 743 volontaires, dans le « Lancet Infectious Diseases ». Au bout de 14 jours après l’injection, les taux de séroconversion d’anticorps neutralisants étaient de 92 % chez les 118 participants du groupe ayant reçu 3 μg, et de 98 % chez les 119volontaires du groupe 6 μg, contre 3 % chez les 60 du groupe placebo. Au bout de 28 jours, ces taux de séroconversion étaient, respectivement, de 97 %, 100 % et 0 %.
Le vaccin russe Spoutnik V – une association d’adénovirus recombinant non réplicatif de type 26 (rAd26) et d’adénovirus non réplicatif de type 5 (rAd5) – par l’institut Gamaleya a été lancé dans le pays sans que des données robustes ne soient communiquées à la communauté scientifique. Seules deux études de phase 1/2, publiées dans « The Lancet » et portant sur 76 volontaires, ont été publiées. La revue a par la suite demandé des éclaircissements sur des résultats peu vraisemblables.
Des questions en suspens
D’autres vaccins sont également en phase 3 : deux utilisant des adénovirus non réplicatifs (Ad26 de Janssen et Ad5-nCoV de la firme chinoise Casino Biologics) et un vaccin international basé sur une sous-unité protéique (NVX-CoV2373 développé notamment par Novavax).
De nombreuses questions restent en suspens pour l’ensemble des vaccins : quelle est la durée de leur protection ? Empêchent-ils l’infection, bloquant ainsi la transmission ? Ou ne font-ils que prévenir les formes graves ? Est-il pertinent de vacciner la population générale ou suffit-il de protéger les plus vulnérables et les soignants ? De nouveaux travaux seront nécessaires pour affiner ces connaissances.
En France, la plateforme INSERM Covireivac, forte de plus de 41 000 volontaires et visant à évaluer les vaccins contre le Covid-19, doit lancer plusieurs essais vaccinaux afin d’éclaircir ces points. Les trois premiers, menés sur les vaccins à adénovirus de Janssen, à adénovirus de chimpanzé d’AstraZeneca et de Moderna, débuteront début janvier 2021.
CCAM technique : des trous dans la raquette des revalorisations
Dr Patrick Gasser (Avenir Spé) : « Mon but n’est pas de m’opposer à mes collègues médecins généralistes »
Congrès de la SNFMI 2024 : la médecine interne à la loupe
La nouvelle convention médicale publiée au Journal officiel, le G à 30 euros le 22 décembre 2024