Elle était attendue de longue date, depuis la dernière feuille de route 2021-2022 : le ministère chargé de l'Autonomie et du Handicap a diffusé ce 4 septembre la stratégie nationale maladies neurodégénératives (MND) 2025-2030. « Les maladies neurodégénératives ne sont pas une réalité lointaine, elles concernant déjà plus d’1,6 million de nos concitoyens. Dans les vingt prochaines années, leur nombre pourrait augmenter de 50 % », rappelle la ministre de la Santé Catherine Vautrin en préambule. Les patients sont entourés aujourd’hui par plus de 2,5 millions d’aidants.
Pilotée par la Pr Florence Pasquier, neurologue (CHU de Lille), la Pr Maria Soto Martin, gériatre (CHU Toulouse et IHU Health Age), et le neurobiologiste Étienne Hirsch (Inserm), en lien avec les associations, « la nouvelle stratégie 2025-2030 n’est pas un plan de plus : c’est une réponse structurée et ambitieuse », lit-on dans le dossier de presse qui décline 37 mesures regroupées en six axes.
Améliorer le maintien à domicile
Parmi les nouveautés figurent l’expérimentation d’équipes mobiles hospitalières dédiées pour prendre en charge les troubles du comportement des patients jeunes (moins de 60 ans) à domicile et la création de structures dédiées à ces profils (avec hébergement, le cas échéant). Les équipes spécialisées Alzheimer (ESA) – qui proposent un accompagnement pluridisciplinaire pour retarder l’évolution de la maladie et favoriser le maintien à domicile – s’élargiront aux MND (ESMND) et leur nombre sera doublé d’ici à 2030 (+ 500).
La prise en charge à domicile est ainsi une priorité érigée en un axe à part entière, « le caractère délétère des passages aux urgences et de ces hospitalisations étant avéré ». Elle passe aussi par le développement des accueils de jour, de l’hospitalisation à domicile pour les personnes avec MND, de l’hébergement temporaire de sortie d’hospitalisation, et des centres de ressources territoriaux (CRT), qui devraient être 500 d’ici à 2028.
En matière de prise en charge à proprement parler, la stratégie veut faciliter l’accès aux soins somatiques courants en sensibilisant les somaticiens aux MND par la formation continue. À titre d’exemple de bonne pratique, trois expérimentations d’unités mobiles de soins buccodentaires pour les résidents d’établissements médico-sociaux, dans le Finistère, le Puy-de-Dôme et le Centre-Val de Loire, entreront dans le droit commun en 2026. Pour favoriser l’accès aux soins psychiques, les services des soins infirmiers à domicile seront renforcés de 100 psychologues en 2025 et 1 100 d’ici à 2034. La publication du cadre de la préparation des doses à administrer (PDA) devrait réduire la iatrogénie médicamenteuse. Les interventions non médicamenteuses, dont l’activité physique adaptée, sont encouragées.
La prévention passera par le recrutement d’infirmiers et de neuropsychologues dans les 570 lieux de consultations mémoires, et la formation des professionnels de services à domicile aux premiers signes.
En terme organisationnel, des filières MND doivent être tissées autour des centres experts, en associant ville, établissement de santé et médicosocial. D’ici à 2030, tous les territoires devront être dotés en unités cognitivo-comportementales (UCC), qui prennent en charge les patients avec des troubles du comportement. Les Ehpad, eux, devront tous avoir un pôle d’activités et de soins adaptés (Pasa) pour réduire ces potentiels troubles et travailler sur les capacités fonctionnelles, cognitives et sensorielles.
Lancer un programme prioritaire de recherche
La stratégie se donne enfin pour ambition de faire de la France un leader mondial en matière de recherche, ce qui passe par le lancement d’un programme prioritaire de recherche (PEPR), l’engagement dans un partenariat européen de recherche sur la santé du cerveau, la relance des centres d’excellence MND, et un travail sur les données : la banque nationale Alzheimer doit être consolidée comme entrepôt national, et le système national des données de santé (SNDS) doit inclure les données sur les MND.
Enfin, en plein flou politique, la stratégie se dote d’une nouvelle gouvernance avec pas moins de trois comités de pilotage : une stratégie présidée par les ministres de l’Autonomie, de la Recherche, et de la Santé ; un comité de veille sur les innovations ; et un comité de suivi technique. Aucun financement n’est néanmoins inscrit noir sur plan pour sa mise en œuvre.
« Nous n’ignorons pas le contexte politique et budgétaire compliqué, mais nous appelons au déploiement effectif de la stratégie qui doit améliorer le quotidien des personnes malades et des aidants. Le lancement de cette stratégie, c’est un pas important, mais l’essentiel reste à faire et nous œuvrerons sans relâche auprès de l’ensemble des parties prenantes », a réagi dans un communiqué l’association France Alzheimer et maladies apparentées.
Les MND en chiffres
Les maladies d’Alzheimer, à corps de Lewy, les dégénérescences lobaires fronto-temporales touchent 1,4 million de personnes, soit 20 % des plus de 80 ans (et 225 000 nouveaux cas chaque année). La maladie de Parkinson concerne 300 000 personnes (26 000 nouveaux cas annuels), la sclérose en plaques 140 000 (6 000), beaucoup plus jeunes (diagnostic entre 25 et 35 ans), sans oublier les maladies plus rares, sclérose latérale amyotrophique, Huntington, qui affectent plusieurs dizaines de milliers de patients.
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