Opposition au Nutri-Score : une enquête de l’UFC-Que Choisir met à mal les arguments des lobbyistes de l'agroalimentaire

Par
Publié le 10/05/2022

Crédit photo : PHANIE

Alors que la Commission européenne envisage, dans le cadre de sa stratégie « Farm to Fork », l’instauration d’un étiquetage nutritionnel dans l’Union européenne d’ici à la fin de 2022, une enquête de l’association de consommateurs « UFC-Que Choisir », publiée le 10 mai, met à mal les arguments des industriels opposés à l’adoption d’un tel système. Selon eux, les produits régionaux seraient pénalisés par la notation adoptée en France en 2016. Mais l’étude d’une sélection de ces produits établit que ce n’est pas le cas.

« Contrairement aux discours des lobbyistes dans les couloirs de Bruxelles qui montent en épingle quelques exemples, on se rend compte avec un échantillon beaucoup plus large que les produits régionaux sont plutôt favorisés par le Nutri-Score », commente auprès de l’AFP, Olivier Andrault, chargé de mission Alimentation à l’UFC-Que Choisir.

Près des deux tiers des produits régionaux classés A à C

L’enquête a ainsi porté sur 588 références de produits, représentant 310 aliments typiques de leurs régions. Ces produits sont majoritairement (62 %) notés de A à C (26 % sont classés A, 13 % sont B et 23 % C). Par ailleurs, 25 % de ces produits sont classés D et 13 % seulement obtiennent un E. « L’argument des industriels selon lequel le Nutri-Score stigmatise les produits du terroir n’est ni plus ni moins que fallacieux ! », insiste un communiqué de l’association, soulignant que la consommation de certains de ces aliments peut même être encouragée en raison de leur meilleure qualité nutritionnelle, comme notamment certaines huiles d’olive, dont sept sont classées C et recommandées par rapport aux autres matières grasses.

Aussi, les notes D et E sont « rarement affichées sur les produits qui les obtiennent », ajoute l’association, qui rappelle qu’il ne s’agit pas d’interdire la consommation de ces produits, mais d’en recommander une consommation « en quantités modérées et à des fréquences raisonnables ».

Le « combat d’arrière-garde » des industriels

Les résultats de l’enquête ont été transmis à la Commission européenne, poursuit l’association. Alors que l’autorité européenne doit adopter un format d’étiquetage nutritionnel d’ici à la fin de l’année, « il serait logique de choisir le Nutri-Score, un affichage simple et rigoureux, plébiscité tant par les scientifiques que par les consommateurs, et déjà adopté en France ainsi que dans cinq autres pays de l’Union », plaide l’association, déplorant le « combat d’arrière-garde » mené par les industriels.

Leur lobbying est également dénoncé par le Pr Serge Hercberg, père du Nutri-Score. Celui qui raconte dans un livre récent, intitulé « Mange et tais-toi »*, la difficile mise en place de l'étiquetage nutritionnel en France, appelle à signer une pétition sur change.org pour défendre le Nutri-Score « face aux attaques des lobbys qui essayent d'empêcher qu'il devienne obligatoire et qui tentent de le dénaturer au niveau national et de l'Europe ».

En France, « aucune firme agroalimentaire n’y était favorable lorsqu’il a été proposé, rappelle le texte de la pétition. C’est grâce aux travaux scientifiques et à la pression des scientifiques, des acteurs de santé, des associations de consommateurs, de nombreuses ONG et de multiples actions citoyennes, qu’aujourd’hui plus de 800 marques se sont finalement engagées à l’afficher ».

* « Mange et tais-toi », Serge Hercberg, éditions humenSciences, 288 pages


Source : lequotidiendumedecin.fr