L'effet de la pollution sur la santé pulmonaire et en particulier sur les crises d'asthmes a été largement démontré. Mais les données démontrant qu'elle influe sur l'incidence même de l'asthme restent plus limitées.
Aujourd'hui, une étude de qualité menée dans des populations en Californie du Sud fait avancer le débat. Elle montre que le recul de la pollution, observé entre 1993 et 2004, a été associé à une réduction de la survenue d'asthme (1). Elle met aussi en évidence que, parmi les polluants étudiés, seuls le taux dioxyde d'azote (NO2) et de particules fines PM 2,5 ont (du moins dans cette étude) un effet significatif sur l'incidence de l'asthme.
Trois cohortes locales à plusieurs années d'intervalle
Les données sont extraites de trois cohortes d'enfants provenant de la Children's health study mises en place à plusieurs années d'intervalle en 1993-2001,1996-2004 puis 2006-2014 au sein des mêmes 9 communautés en Californie du Sud.
Tous les enfants ont été inclus à l'âge de 9-10 ans. Ils devaient être exempts d'asthme à l'entrée. Ils ont ensuite été suivis 8 ans. La survenue d'asthme a été recueillie au moyen d'un questionnaire annuel.
Au total, ces trois cohortes rassemblent 4 140 enfants (60 % de filles) de 9,5 ans d'âge moyen à l'inclusion. Parmi eux, 60 % sont blancs et 42 % hispaniques.
La pollution a été évaluée localement dans chaque communauté. Les valeurs retenues sont les valeurs moyennes observées la première année du lancement de chaque cohorte. Plusieurs polluants ont été analysés : l'ozone (O3), le NO2, et les particules fines PM 10 et PM 2,5. Ces données montrent que tous les composants de la pollution analysés ont régressé au sein de chaque communauté entre 1993 et 2006. Ce recul est d'autant plus important que les taux initiaux étaient plus élevés en 1993.
Une régression de l'incidence corrélée au recul de la pollution
Au cours du suivi des trois cohortes, 525 cas d'asthme ont été recensés. Dans la seconde cohorte (1996-2014), l'incidence nette (sans ajustement) de l'asthme est de 2,7 cas/100 sujets années. C'est la valeur la plus importante. Dans celle de 2006-2014 on est en revanche à 1,8 cas/100 sujets années. Par ailleurs, quand on examine les diverses communautés, toujours sans ajustements, celles où l'incidence de l'asthme a le plus décru sont celles où les réductions des taux NO2 et les PM 2,5 ont été les plus importants.
Au-delà de ces données brutes, une analyse complexe après ajustements a été menée.
De nombreux paramètres ont été pris en compte : âge, sexe, antécédents familiaux d'asthme, ethnie, activité sportive, présence d'un foyer dans la maison, exposition intra-utérine au tabac, tabagisme passif…
Cette analyse met en évidence que les taux locaux en NO2 et en PM 2,5 sont significativement associés à la réduction de l'incidence de l'asthme chez ces jeunes. Le recul en NO2 de 4,3 parties par million (ppm) entre 1993 et 2006 est associé à une réduction de 20 % de la survenue d'asthme (RR = 0,80 ; [0,71 - 0,90]). De la même manière, le recul en PM 2,5 de 8,1 µg/m3 entre 1993 et 2006 est associé à une réduction de 18 % de l'incidence de l'asthme (RR = 0,82 ; [0,69 - 0,98]). Les analyses de sensibilité montrent en outre que l'association entre incidence et taux de NO2 est très robuste.
En revanche le recul des taux d'ozone et de PM 2,5 n'est pas significativement associé à l'évolution de l'incidence de l'asthme.
Une étude robuste et très démonstrative
« De multiples études épidémiologiques ont mis en évidence une augmentation de la survenue de l'asthme infantile associé à la pollution en particulier celle issue de la circulation autoroutière dont les PM 2,5 et le NO2. Néanmoins ces études ont toujours comparé des enfants n'habitant pas au même endroit. Du coup malgré un contrôle minutieux des caractéristiques des sujets, jusqu'ici un biais ne pouvait pas être exclu. Cette étude aujourd'hui lève cette suspicion », commente l'éditorialiste (2).
L'incidence de l'asthme a en effet été suivie au sein de chaque communauté : chacune a été comparée à elle-même sur 3 périodes. Cette stratégie réduit considérablement les facteurs confondants, en particulier géographiques. C'est par ailleurs la première étude à mettre en évidence une réduction de l'asthme associé à un recul de la pollution et non l'inverse. Or quand une cause provoque un effet, la supprimer/réduire doit causer l'inverse. « Ce travail étaye de manière claire la relation causale entre pollution et asthme », souligne l'éditorialiste.
(1) Garcia E et al. Association of Changes in Air Quality With Incident Asthma in Children in California, 1993-2014. JAMA. 2019;321:1906-15
(2) GD Thurston. Air Pollution Exposure and Asthma Incidence in Children: Demonstrating the Value of Air Quality Standards. JAMA. 2019;321:1875-77.
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