Après un arrêt cardiaque extrahospitalier réanimé, la survie n'excède pas les 20 % et les complications neurologiques sont nombreuses. Maintenir les patients en hypothermie à 32-36°C améliore leur morbimortalité. Néanmoins, cette stratégie augmente le risque infectieux, en particulier celui des pneumonies précoces associées à la ventilation mécanique – survenant au cours de la première semaine. Le recours à une antibiothérapie prophylactique probabiliste peut-elle réduire ce risque ? La question n'était pas clairement tranchée. On ne disposait que de quelques études, dont une monocentrique randomisée menée en ouvert et une étude de cohorte non randomisée. Néanmoins, les données rétrospectives plaidaient en faveur d’un effet bénéfique de l’antibiothérapie chez les patients en hypothermie. Aujourd’hui, cette étude randomisée multicentrique menée en double aveugle dans 16 unités de soins intensifs français pourrait clore le débat (1).
Deux cents arrêts cardiaques extrahospitaliers réanimés
L’étude a été menée entre 2014 et 2017. Elle porte sur près de 200 arrêts cardiaques extrahospitaliers ressuscités traités par hypothermie entre 32 et 34°C. À l’inclusion, ils devaient ne présenter ni pneumonie ni antécédent de pathologie pulmonaire et n’avoir pas reçu d’antibiothérapie dans les jours précédents. Ils devaient être inclus dans les 6 heures après l’arrêt cardiaque. Le critère principal est la survenue d’une pneumonie dans les 5 jours. La pneumonie devait être attestée à la fois par des critères cliniques, radiologiques et microbiologiques et adjudiquée. Les critères secondaires sont les pneumonies plus tardives (passés les 7 premiers jours), les infections nosocomiales et la mortalité à un mois.
Amoxicilline/acide clavulanique durant deux jours
Ces sujets ont 61 ans d’âge moyen. Parmi eux, 80 % sont des hommes. L’hypothermie a été débutée dans les 5 heures après l’arrêt cardiaque. Elle a été réalisée par voie externe dans près de 90 % des cas et maintenue en moyenne 30 heures. Ils ont été randomisés dans chaque centre pour recevoir l’antibiothérapie ou un placebo.
Pour éviter le développement d'antibiorésistances, le traitement choisi a été limité à deux jours d’amoxicilline/acide clavulanique à la dose de 1 g/200 mg trois fois par jour. Il était administré en double aveugle versus placebo (solution saline).
Deux fois moins de pneumonies précoces
Au total, sur les 194 patients inclus dans cet essai, 60 pneumonies liées à la ventilation ont été observées dont 50 survenues précocement (avant le septième jour). L’incidence est plus faible dans le bras antibiothérapie : elles ont touché respectivement 19 % versus 34 % des patients (RR = 0,53 ; [0,31-0,92] ; p = 0,03). Et, si on place le cut off de pneumonie précoce à cinq jours, la différence persiste (17 % vs 31 %).
En revanche, sans surprise, on n’observe pas de différence en termes de pneumonies tardives entre les deux bras (4 % vs 5 %). Et ce bénéfice sur les pneumonies précoces n’est pas associé à une réduction significative du nombre de jour de ventilation, de la durée d’hospitalisation en soins intensifs ou de la mortalité.
Enfin sur le plan bactériologique, aucune augmentation des résistances bactériennes n’a été mise en évidence.
Au total, cette stratégie, aisée à mettre en œuvre, semble donc intéressante.
(1) François B et al. Prevention of Early Ventilator-Associated Pneumonia after Cardiac Arrest. NEJM 2019.381:1831-42
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