Jusqu’à ces dernières recommandations du Gina (Global initiative for asthma), les bronchodilatateurs de courte durée d’action (B2-CDA) avaient une place de choix comme traitement de première intention, à la demande, chez des patients paucisymptomatiques, avec peu ou pas d’exacerbations, ainsi qu’en traitement de secours, dans toutes les situations d’asthme léger, modéré ou sévère. Il est désormais (1) préconisé de leur préférer, dans toutes ces cas de figure, chez les adultes et les adolescents à partir de 12 ans, un traitement associant un corticostéroïde inhalé (CSI) et un béta2-mimétique de longue durée d’action (B2-LDA).
Traiter l’inflammation en priorité
De nombreuses publications montrent en effet que l’association d’un CSI (budésonide) à un B2-LDA fait mieux que le B2-CDA seul pour contrôler l’asthme et prévenir les exacerbations de la maladie. « Ce qui est logique, puisqu’il est largement démontré que l’asthme n’est pas uniquement lié à une bronchoconstriction mais qu’il s’agit d’une pathologie essentiellement inflammatoire. Le B2-CDA ne traite les symptômes et de façon très ponctuelle, sans aucune action sur l’inflammation bronchique », souligne le Pr Gilles Devouassoux (Lyon).
Non seulement le salbutamol ne protège pas des exacerbations mais le fréquent recours à cette molécule diminue le nombre de récepteurs membranaires aux béta2-mimétiques, ce qui diminue leur efficacité en cas de symptômes ou d’exacerbations. « Si le patient prend les bronchodilatateurs au long cours, qu’ils soient à courte ou à longue durée d’action, cela signifie soit qu’il ne s’agit pas d’un asthme léger, soit que les traitements de fond sont inadaptés, peu, ou mal utilisés, soit que les symptômes ne relèvent pas forcément de l’asthme », explique le pneumologue. De plus, l’observance vis-à-vis des traitements de fond dans l’asthme est mauvaise ; ils sont souvent peu ou mal utilisés, les patients se fiant essentiellement au B2-CDA, dont ils apprécient l’effet rapide, pour gérer leur maladie et surtout ses symptômes au coup par coup. Il est préférable dans ce cas de prendre l’association formotérol/CSI qui a fait ses preuves – le CSI inhalé seul n’étant pas efficace en situation aiguë.
Une prescription hors-AMM
Il est donc préconisé, à l’étape 1 du Gina, de prescrire préférentiellement l’association CSI (budésonide)/formotérol, à faible posologie à la demande (hors AMM) au lieu d’un B2-CDA seul. À partir de 8 doses par jour, un avis du pneumologue est indispensable pour réévaluer la pathologie et discuter d’un traitement de fond.
À l’étape 2, on propose d’utiliser l’association CSI/formotérol à faible posologie en traitement de fond, en remplacement des CSI seuls, ces derniers étant en pratique peu utilisés et moins efficaces que l’association fixe. La même association est aussi prescrite en traitement de secours, quel que soit le stade thérapeutique du Gina.
« Ces recommandations vont bouleverser les habitudes, souligne le Pr Devouassoux. Pour les médecins, il s’agit maintenant de prescrire un CSI-formotérol, à faible posologie en remplacement des B2-CDA en traitement des symptômes « à la demande » et aussi la même association fixe en remplacement des CSI seuls en traitement de fond. C’est un réflexe à prendre, ce qui sera sans doute difficile à adopter au début, les B2-CDA étant, depuis des décennies, très ancrés dans la pratique médicale. Un important travail pédagogique doit aussi être mené auprès des patients pour leur rappeler que le formotérol agit aussi vite que le salbutamol, avec une durée d’action plus longue et que son association à un CSI traite la maladie et non pas uniquement les symptômes ».
Les pneumologues français ne se sont pas encore exprimés à ce sujet, les prochaines recommandations étant en cours de rédaction. Il faudra aussi résoudre quelques difficultés administratives. De plus, les associations CSI/formotérol n’ont pas toutes l’AMM dans ces indications.
exergue : « le formotérol agit aussi vite que le salbutamol, mais plus longtemps, et son association à un CSI traite la maladie et pas uniquement les symptômes »
Entretien avec le Pr Gilles Devouassoux, Service de Pneumologie, Hôpital de la Croix Rousse (Lyon) (1) Sur le site du Gina, le rapport principal (https://ginasthma.org/wp-content/uploads/2019/06/GINA-2019-main-report-…) et le guide de poche (https://ginasthma.org/pocket-guide-for-asthma-management-and-prevention)
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