LE QUOTIDIEN : Les efforts menés dans les pays occidentaux pour réduire la pollution sont-ils payants ?
Pr ISABELLA ANESSI-MAESSANO : Dans les pays occidentaux, la pollution, autrefois largement d’origine industrielle, est désormais majoritairement due aux émissions de gaz générées par le trafic autoroutier, composés organiques et particules fines (de 2,5 microns) et ultrafines (moins de 0,1 micron).
À Paris, si le niveau moyen de pollution a baissé, il a significativement augmenté par endroits, dans les « canyons » ou aux portes de Paris, porte de Bagnolet, par exemple. Dans ces lieux, on est à des niveaux supérieurs aux seuils OMS (alors même qu'elle s’apprête à les diviser par deux ou trois) et parfois même aux seuils européens, plus larges.
Les particules fines ne sont quasiment pas mesurées, si l’on excepte trois stations à Paris intra-muros. Quant aux ultrafines, si petites qu’elles se comportent comme un gaz, elles ne le sont pas de façon réglementaire. Elles contribuent très peu à la masse globale des polluants de l’air, mais elles sont dominantes en nombre, et, en raison de leur quantité, de leur surface spécifique, elles pénètrent profondément dans le poumon puis à travers la barrière pulmonaire.
Que sait-on aujourd’hui exactement des conséquences de la pollution sur les maladies respiratoires ?
On a aujourd’hui des preuves indiscutables de l’effet de la pollution à la fois à court et à long terme. En aigu, les effets immédiats sont nets sur les crises d’asthme ainsi que sur les exacerbations de bronchites chroniques obstructives (BPCO) et de fibrose pulmonaire idiopathique. Ce dernier effet était inconnu jusqu’à l’année dernière.
Le court terme n’est malheureusement que la partie émergée de l’iceberg. En chronique, la pollution, en particulier aux particules ultrafines, affecte très profondément la santé. Cet impact a été bien plus difficile à démontrer, vu le caractère multifactoriel de l’exposition chronique. Mais, aujourd’hui, quoi qu’en disent certains, c’est fait.
Le corpus d’études répond aux critères de Hill nécessaires pour démontrer un lien de causalité. Plusieurs travaux montrent que la pollution chronique favorise le développement à la fois de l’asthme, de la BPCO et du cancer pulmonaire. Pour ce dernier, cela a pu être démontré en étudiant des femmes non fumeuses et non exposées au tabagisme passif. L’exposition chronique majore aussi les infections pulmonaires, notamment la tuberculose. Cerise sur le gâteau, les effets du tabac et ceux de la pollution sont synergiques.
Globalement, quelle est la physiopathologie de cet effet délétère ?
Elle est complexe. Elle fait intervenir de nombreux facteurs et pas nécessairement les mêmes suivant le type de polluant. En outre, on connaît encore très peu les effets des nanoparticules qui, en plus de se trouver dans l’air, sont aussi présentes dans une multitude de produits qui nous entourent, par exemple dans les cosmétiques (crèmes, déodorants…). Mais, globalement, on peut résumer la physiopathologie à l’inflammation et au stress oxydant. Ce qui explique que la pollution majore aussi le risque cardiovasculaire, dans les maladies inflammatoires de type arthrites, dans les maladies métaboliques (diabète), etc.
exergue : Les particules ultrafines contribuent très peu à la masse globale des polluants de l’air, mais sont dominantes en nombre, surface et pénétration pulmonaire
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