Les corticoïdes inhalés, à doses plus ou moins fortes, sont la base du traitement de fond des patients asthmatiques du stade un au stade cinq, selon les recommandations du Gina. Ils sont efficaces chez une majorité de patients (de 70 à 80 %). « Les corticoïdes agissent essentiellement sur l’inflammation éosinophilique. On peut ainsi penser que 70 à 80 % des asthmatiques ont une forme d’asthme éosinophilique corticosensible », explique le Pr Arnaud Bourdin (CHU de Montpellier). Il reste donc que 20 à 30 % des asthmatiques ne sont pas contrôlés et ne répondent pas correctement, voire pas du tout, aux corticoïdes, malgré un traitement de fond bien suivi à fortes doses, associé à une autre classe thérapeutique ou à une corticothérapie systémique. « Face à ces cas d’asthme sévère, schématiquement, deux hypothèses sont possibles : soit l’inflammation bronchique est d’un type différent (non éosinophilique), soit elle est bien éosinophilique mais son niveau est très élevé et le traitement par corticoïdes ne suffit plus », détaille le pneumologue. La mesure de biomarqueurs permet de mieux caractériser l’asthme du patient afin de guider le choix de la biothérapie à utiliser alors.
En pratique courante, trois tests simples peuvent être réalisés pour explorer les mécanismes de l’inflammation chez les patients asthmatiques sévères qui sont faiblement corticosensibles, ou qui ne répondent pas aux corticoïdes : les tests d’allergie cutanés, le dosage des éosinophiles sanguins et la mesure du NO exhalé (FeNO).
Les patients qui ont des biomarqueurs allergiques ou éosinophiles peuvent bénéficier d’un traitement biologique ciblé d’appoint. Chez les patients atteints d’asthme sévère hyperéosinophilique, l’utilisation d’un anti-IL5 (mépolizumab, reslizumab IV) ou d’un anti-IL5R (benralizumab) est recommandée. L’omalizumab, un anti-IgE, sera privilégié en cas d’asthme allergique sévère, et on choisira un anti-IL4R et anti-IL13 (dupilumab) en cas d’asthme sévère éosinophilique/type 2 avec un taux de FeNO élevé.
Des outils qui restent perfectibles
« Mais, souvent, il y a un fort chevauchement entre les trois biomarqueurs : environ 70 % des patients ont des taux élevés pour chacun des trois, souligne le Pr Bourdin. Pour choisir la biothérapie, on peut alors se fonder sur les données cliniques, l’expérience, la présence de comorbidités… En cas d’urticaire chronique, par exemple, on préférera l’omalizumab. En cas de dermatite atopique, le dupilumab. Cependant, cette attitude ne règle pas tous les problèmes qui peuvent se poser en pratique et il est parfois difficile de décider quelle biothérapie initier en première ligne. Des études comparatives sont en cours. »
De toute façon, un point clé de la prise en charge consiste à bien réévaluer la réponse du patient et à changer de traitement si les objectifs fixés ne sont pas atteints au bout de six mois ou un an. « Dans ce cas, il faut peser le pour et le contre d’un changement de traitement et réexaminer le phénotype. On peut se permettre d’être exigeant puisque nous avons plusieurs biothérapies à notre disposition », insiste le Pr Bourdin.
Dans certains cas, les trois tests reviennent au contraire négatifs. « Il faut savoir répéter ces tests car ils peuvent être négativés par les corticoïdes, en particulier oraux », souligne le Pr Bourdin, si possible en les diminuant ou en les arrêtant. En effet, les biomarqueurs d’inflammation de type 2 sont souvent supprimés par les corticoïdes oraux.
Malgré tout environ 15 à 20 % des patients n’auront toujours aucun biomarqueur positif malgré une réalisation optimale des tests. Il faut alors rechercher d’autres signes, cliniques par exemple : une polypose nasosinusienne signe une inflammation de type 2. « Dans le futur, nous espérons avoir d’autres marqueurs biologiques à notre disposition. Mais aussi des marqueurs fonctionnels, d’imagerie, etc. », indique le Pr Bourdin.
Exergue : Il faut changer de traitement si les objectifs fixés ne sont pas atteints au bout de six mois à un an
Entretien avec le Pr Arnaud Bourdin (CHU de Montpellier)
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