« Le confinement et le déconfinement ont été sources de décompensation ou d’aggravation des troubles psychiatriques des enfants, des adolescents et de leurs parents », a résumé, le 24 septembre, la Dr Marie Touati-Pellegrin, pédopsychiatre, devant les députés de la commission d’enquête pour « mesurer et prévenir les effets de la crise du Covid-19 sur les enfants et la jeunesse ».
Pour les parents fragiles et les enfants en difficulté, le confinement a créé un « huis clos explosif », alors que « les réseaux d’aide ont été brutalement fermés », poursuit la pédopsychiatre, en poste à l’hôpital Necker pendant le confinement.
Si la crise sanitaire et le confinement n’ont pas déclenché de nouvelles pathologies mentales, « il y a eu un effet loupe et des décompensations », ajoute la Dr Catherine Lacour-Gonay, pédopsychiatrie et membre de la Société française de psychiatrie de l’enfant et de l’adolescent et des disciplines associées (SFPEADa), rappelant que le confinement a été « soudain, brutal, non prédictible ».
Effet « catastrophique » de la déscolarisation
Considérés comme vecteurs du Covid-19 au début de l’épidémie, les enfants et les adolescents ont été les premiers à connaître les effets de la crise sanitaire. Alors que la fermeture des établissements scolaires est intervenue avant celle du confinement généralisé de la population, « ils se sont sentis responsables », regrette la Dr Touati-Pellegrin.
Et si cette fermeture des établissements scolaires, lieux d’apprentissage mais aussi de socialisation, a été un soulagement pour les élèves anxieux ou atteints de phobies scolaires, elle a été « catastrophique » pour les autres. « C’est comme si on avait prescrit avec le confinement à tous nos adolescents le symptôme phobique », estime la Dr Lacour-Gonay.
Cette forme de traumatisme ne s’est pas traduite dans l’immédiat. Aux urgences, pendant le confinement, une diminution des tentatives de suicide et des scarifications a été constatée chez les adolescents. « Ce n’était pas le moment de montrer leur détresse psychique car pas mal de parents avaient du mal à composer avec la leur, explique la Dr Lacour-Gonay. En revanche, les premières réhospitalisations ont concerné les troubles du comportement alimentaire. D’autres symptômes ont connu une flambée, comme l’addiction aux écrans ». Des études épidémiologiques seront nécessaires pour suivre les conséquences sur le long terme, d’autant que le déconfinement a également été source d’angoisses.
Un effet bénéfique sur le sommeil
Quelques aspects positifs sont à relever. Alors que 75 % des enfants et adolescents ont une dette de sommeil, le confinement a pu être bénéfique. « Les adolescents qui sont des "sujets du soir" (tendance à s’endormir plus tard et se réveiller plus tard) ont pu vivre plus à leur rythme », souligne la Dr Stéphanie Bioulac, pédopsychiatre, cheffe de l’unité de prise en charge du sommeil de l’enfant et de l’adolescent au CHU de Bordeaux.
Le bilan a pu également se révéler positif pour les enfants souffrant d’un trouble de déficit de l'attention avec ou sans hyperactivité (TDAH). « Quand l’environnement était structuré, ces enfants pouvaient avoir un rythme scolaire adapté à leur timing, avec du calme et peu d’éléments distracteurs », poursuit la Dr Bioulac.
Une perte de chance pour ceux atteints de troubles
Ces expériences bénéfiques du confinement ne sont pourtant pas généralisables. Pour nombre d’enfants et d’adolescents, le confinement s’est traduit par une « perte de chance ». « L’arrêt brutal des soins a été une véritable perte de chance pour les enfants qui avaient des séances hebdomadaires d’orthophonie, de psychomotricité, etc. », déplore la Dr Touati-Pellegrin, rappelant le bénéfice d’un diagnostic et d’une prise en charge précoces, déjà mis à mal par un secteur pédopsychiatrique et une médecine scolaire exsangues depuis plusieurs années.
L’inquiétude des professionnels porte également sur « tous ceux qui sont sortis de nos radars », alerte la Dr Lacour-Gonay, soulignant la mobilisation et la « créativité » des équipes soignantes qui « ont gardé le lien » en « composant avec les moyens du bord ».
La pédopsychiatre relève un dernier aspect positif. « À côté de toute l’angoisse de mort, il y a eu cette pulsion de vie et ce formidable message donné aux enfants et aux adolescents : la vie peut être un critère d’importance absolue, plus que tout autre enjeu. C’est une dimension éthique qu’ils ont prise à leur compte ».
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