LA THÉRAPIE par réalité virtuelle, approche fondée sur les nouvelles technologies qui a vu le jour aux États-Unis il y a une quinzaine d’année et qui se développe en France depuis le début des années 2000, présente une différence fondamentale avec la psychothérapie, puisque le sujet est en immersion dans un environnement avec lequel il interagit. « Ce que le patient voit dans le casque dépend de ses mouvements et, ainsi, l’imaginaire est contraint par la réalité », précise le Pr Roland Jouvent, qui rappelle que la thérapie par réalité virtuelle connaît différents domaines d’application, dont l’un des plus développés est celui de la peur de tomber.
De nombreux patients concernés.
La peur de tomber concerne une grande partie de la population âgée, de patients atteints de maladies neurologiques ou de syndromes posttraumatiques et découle à la fois d’une réalité corporelle et d’une phobie. Il ne s’agit donc par d’une phobie irrationnelle pure car cette peur s’explique aussi par la diminution des compétences sensorielles ou motrices. De ce fait, elle requiert un traitement adapté, qui combine deux étapes. La première est la réalité virtuelle à proprement parler, où le sujet est placé dans un environnement virtuel où il peut se déplacer en toute sécurité. Au fil des séances, de 10 à 12, le patient reprend confiance, se lève, marche, tourne, toujours accompagné par une assistante de recherche clinique. Les résultats sont très bons, voire trop bons, ce qui expose le sujet, en excès de confiance, à prendre des risques et finalement à chuter. C’est pour éviter les conséquences de cet excès de confiance qu’a été ajoutée la remédiation cognitive : la réalité augmentée, où, grâce à une webcam, le patient se voit dans l’environnement virtuel, comme cela se passe dans les jeux vidéos par exemple. Il retrouve ainsi son corps, ses limites, ce qui lui permet de trouver de nouveaux repères. « Mais chez un patient ayant un déficit moteur, la remédiation cognitive ne modifie aucunement les paramètres objectifs de la marche », insiste le Pr Jouvent.
Ce traitement combiné aboutit à un rééquilibrage physique de croyances, où interviennent des facteurs émotionnels.
Les bénéfices de cette thérapie persistent sur le long terme, en particulier chez les sujets ayant une peur de tomber posttraumatique. Dans le cadre du vieillissement, des séances « de rappel » peuvent être nécessaires pour compenser l’évolution de problèmes d’équilibre par exemple.
Plusieurs situations concernées.
« La réalité virtuelle devrait connaître un développement croissant en psychiatrie. Pour traiter notamment la peur de tomber, problème fréquent et souvent négligé, mais aussi être utilisée dans la schizophrénie et l’autisme. La réalité virtuelle permet en effet de coupler en temps réel la pensée et la réalité des informations corporelles ce qui diminue la dissociation et la dépersonnalisation », rappelle le Pr Jouvent.
Elle pourrait également être utilisée dans des pathologies infracliniques, qui retiennent de plus en plus l’attention, telles que la phobie des ascenseurs ou la peur des chutes dans les escaliers du métro, qui est rapportée par une personne sur cinq selon une enquête menée par l’observatoire régional de la santé au travail auprès de 5 000 salariés d’Île-de-France. « La RATP s’est d’ailleurs rapprochée de notre laboratoire pour étudier la possibilité de traiter cette peur de tomber avec des équipements multimédias grand public ». Tout un nouveau champ de recherches s’ouvre aujourd’hui.
D’après un entretien avec le Pr Roland Jouvent, directeur du centre émotions USR 3246, groupe hospitalier Pitié-Salpêtrière, Paris.
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