En 2012, l’EULAR a émis des recommandations sur le rôle de l’infirmière dans la prise en charge des rhumatismes inflammatoires chroniques. Elles concernent notamment : l’éducation thérapeutique, le développement de l’autonomie des patients, la continuité des soins, la télémédecine, l’accompagnement psychosocial, les consultations infirmières et la prise en charge globale de la maladie « En France, l’application de ces recommandations ne peut se faire d’emblée, souligne la Dr Catherine Beauvais, rhumatologue à l'hôpital Saint-Antoine (Paris). La réglementation française actuelle a certes évolué, mais elle ne le permet pas encore. De plus, il y a quelques années, une enquête avait montré qu’il existait des obstacles ». Les rhumatologues émettaient des doutes sur les connaissances des infirmières, les patients avaient peur de perdre le contact avec le rhumatologue et les infirmières déclaraient manquer de temps.
Peu de délégations de tâches
En France, une première étape a été la création des délégations de tâches, autorisées par la loi HPST de 2009 afin d’élargir les compétences et l’exercice des infirmières (ou d’autres professionnels de santé).
La délégation de tâche (ou protocole de coopération) correspond à un type précis de soin que peut réaliser l’infirmière, spécifiquement formée, et elle se fait sous le contrôle d’un médecin. « Par exemple, un médecin pourrait déléguer à l’infirmière la décision d’administrer une perfusion de biothérapie en hôpital de jour à un patient dont la maladie est stabilisée. Mais en pratique, la procédure pour obtenir l’autorisation de la Haute Autorité de santé est lourde et en rhumatologie, la délégation de tâches est très peu utilisée », explique la Dr Catherine Beauvais, alors qu’elle est très usitée dans d’autres spécialités comme la radiologie, avec les manipulateurs en radiologie, et en ophtalmologie avec les orthoptistes. « En fait, pour les infirmières, cela n’est pas toujours intéressant car c’est une tâche supplémentaire mais qui reste au même niveau que leur exercice », ajoute la rhumatologue.
La valeur ajoutée des pratiques avancées
Les pratiques avancées ont été définies par la loi de 2016 de modernisation du système de santé qui permet une nouvelle modalité d’exercice et de collaboration entre médecins et professionnels paramédicaux (décrets de 2018). L’infirmière exerçant en pratique avancée (IPA) dispose de compétences élargies par rapport à l’infirmière diplômé d’État. L’IPA doit avoir le niveau master, ce qui implique un cursus universitaire de deux ans entrepris après un minimum de trois ans d’exercice d’infirmier en équivalent temps plein. « Leur exercice est beaucoup plus large et diversifié. L’IPA participe à la prise en charge globale du patient. Elle peut faire toute activité d’orientation, d’éducation, de prévention ou de dépistage qu’elle juge nécessaire », précise la Dr Beauvais. L’IPA peut effectuer les actes techniques et demander ceux de suivi et de prévention. D'après une liste préétablie, elle peut aussi prescrire des médicaments (non soumis à prescription médicale obligatoire) et des examens de biologie, ainsi que renouveler des prescriptions médicales, en les adaptant si besoin.
Cinq groupes de pathologies sont actuellement du domaine des IPA : l’oncologie et l’hémato-oncologie, les maladies rénales chroniques, les polypathologies courantes en soins primaires et leur prévention, les maladies psychiatriques et les pathologies chroniques stabilisées (AVC, diabète, cardiopathie, insuffisance respiratoire chronique, maladies d’Alzheimer et de Parkinson). « Les maladies ostéoarticulaires n’y figurent pas, mais au vu des autres pathologies concernées, il n’y a pas de raisons pour qu’elles ne puissent pas être incluses à l’avenir », espère la rhumatologue. Il existe déjà de nombreuses preuves du bénéfice de l’exercice infirmier dans différentes pathologies rhumatologiques. « Les IPA permettraient d’améliorer la qualité du parcours de soins des patients, de libérer du temps pour les médecins… Médecins et infirmières ont chacun leur rôle dans la prise en charge : les infirmières ont une vision différente du patient, complémentaire de la nôtre. Cette collaboration est une évolution qui va se faire progressivement, comme cela a été le cas pour l’éducation thérapeutique du patient… ».
D'après un entretien avec la Dr Catherine Beauvais, hôpital Saint-Antoine (Paris)
CCAM technique : des trous dans la raquette des revalorisations
Dr Patrick Gasser (Avenir Spé) : « Mon but n’est pas de m’opposer à mes collègues médecins généralistes »
Congrès de la SNFMI 2024 : la médecine interne à la loupe
La nouvelle convention médicale publiée au Journal officiel, le G à 30 euros le 22 décembre 2024