Préciser le statut osseux

Ostéoporose cortisonique

Publié le 31/03/2010
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Crédit photo : S TOUBON

Pas comme les autres

Comme le rappellent les recommandations de l’AFSSAPS publiées en 2003, « l’ostéoporose cortisonique est la plus fréquente des ostéoporoses secondaires », et elle constitue ainsi l’une des « principales complications des traitements cortisoniques au long cours » (1). Le même texte soulignait néanmoins que, selon une étude épidémiologique, 14 % seulement des patients sous corticoïdes au long cours recevaient un traitement préventif ou curatif.

La physiopathologie de l’ostéoporose induite par les glucocorticoïdes n’est « pas comme les autres » (2). L’AFSSAPS précise que le mécanisme essentiel est la réduction de l’activité ostéoblastique. Il existe également une réduction indirecte de l’ostéoformation par inhibition de la production d’hormones sexuelles, de gonadotrophines hypophysaires et par diminution de la synthèse et de l’activité des facteurs de croissance ostéoblastique.

Comme l’a souligné le Pr T. Thomas, les effets des glucocorticoïdes s’expriment en premier lieu par une inhibition de la formation osseuse. Les glucocorticoïdes diminuent la réplication des cellules de la lignée ostéoblastique, ils inhibent la différenciation et la maturation des ostéoblastes en redirigeant les cellules stromales vers la voie adipogénique et bloquent la voie canonique Wnt/bêtacaténine, dont le rôle dans l’ostéoblastogenèse est essentiel. Enfin, ils retentissent sur la fonction des ostéoblastes matures. Ils affectent par ailleurs la fonction des ostéocytes et altèrent les propriétés biomécaniques du tissu osseux, favorisent la formation des ostéoclastes et prolongent leur durée de vie.

Densitométrie

Dans le diagnostic de l’ostéoporose cortisonique, l’indication de l’ostéodensitométrie est justifiée. Elle a été retenue par la HAS dans son avis du 21 juin 2006 dans la population générale, « quels que soient l’âge et le sexe, lors d’une corticothérapie systémique prescrite pour une durée d’au moins trois mois consécutifs, à une dose supérieure à 7,5 mg/jour d’équivalent prednisone ». L’avis précise qu’il est préférable de réaliser l’examen en début de traitement.

Prévention

L’ostéoporose cortisonique doit être prévenue et traitée. Sa prévention « doit être envisagée lors d’une corticothérapie prolongée (supérieure à trois mois), administrée par voie générale, à des doses supérieures ou égales à 7,5 mg/jour d’équivalent prednisone ». L’effet néfaste des corticoïdes sur l’os étant maximal dès les premiers mois de traitement, le traitement devra être instauré dès le début de la corticothérapie afin de prévenir efficacement la perte de masse osseuse. Un bisphosphonate est indiqué.

Le risédronate a été évalué en prévention primaire et secondaire et son efficacité a été démontrée dans les deux situations de prévention (3, 4). Il a été démontré en 2009 que l’efficacité du zolédronate administré annuellement est égale ou supérieure à celle du comparateur administré quotidiennement pour prévenir et traiter l’ostéoporose induite par les corticostéroïdes (5). Le zolédronate est apparu non-inférieur et supérieur au comparateur pour accroître la DMO au niveau de la colonne lombaire dans le groupe traitement et le groupe prévention à 12 mois. Une hausse significative de la DMO a également été constatée au niveau du col fémoral, du trochanter, de la hanche totale et au niveau du radius distal dans le groupe traitement.

Enfin, un essai clinique randomisé à double insu a montré l’efficacité du tériparatide dans le traitement de l’ostéoporose induite par les corticostéroïdes (6) ; ce médicament dispose également d’une AMM dans cette indication. Un gain statistiquement plus élevé de DMO dans la région lombaire et à la hanche a été constaté dans le groupe tériparatide par comparaison avec un bisphosphonate.

Au total, il existe des traitements efficaces dans la prise en charge de l’ostéoporose cortisonique. Ces traitements sont logiques en prévention et en traitement. Il est ainsi justifié de préciser le statut osseux des patients pour déterminer le choix thérapeutique. Des stratégies d’usage successif sont envisageables en cas de corticothérapie prolongée.

D’après les communications des Prs Thierry Thomas (CHU, Saint-Etienne) et Christian Roux (hôpital Cochin, Paris), XXIIIe Journée scientifique du GRIO.

Références

(1) AFSSAPS. Traitement médicamenteux de l’ostéoporose cortisonique. Recommandations, février 2003.

(2) Canalis E, et coll. Glucocorticoid-induced osteoporosis : pathophysiology and therapy. Osteoporos Int 2 007 ; 18 (10) : 1 319-28._(3) Cohen S, et coll. Risedronate therapy prevents corticosteroid-induced bone loss : a twelve-month, multicenter, randomized, double-blind, placebo-controlled, parallel-group study. Arthritis Rheum 1 999 ; 42 : 2309-18.

(4) Reid DM, et coll. Efficacy and safety of daily risedronate in the treatment of corticosteroid-induced osteoporosis in men and women : a randomized trial. European corticosteroid-induced osteoporosis treatment study. J Bone Miner Res 2 000 ; 15 : 1 006-13.

(5) Reid DM, et coll. Zoledronic acid and risedronate in the prevention and treatment of glucocorticoid-induced osteoporosis (HORIZON) : a multicentre, double-blind, double-dummy, randomised controlled trial. Lancet 2 009 ; 373 (9 671) : 1 253-63.

(6) Saag KG, et coll. Teriparatide or alendronate in glucocorticoid-induced osteoporosis. N Engl J Med 2 007 ; 357 (20) : 2 028-39.

 Dr GÉRARD BOZET

Source : Le Quotidien du Médecin: 8740