L'OS EST SOUMIS à un remodelage constant, qui comprend deux phases : la résorption de l'os par les ostéoclastes, suivie de la formation d'os nouveau par les ostéoblastes.
Les mécanismes gouvernant l'ostéoclastogenèse (développement des ostéoclastes) sont importants à comprendre si l'on veut développer de nouvelles approches pour traiter les pertes osseuses, comme l'ostéoporose.
Les ostéoclastes se forment par la différenciation et la fusion de progéniteurs de la moelle osseuse (précurseurs des monocytes/macrophages), sous le contrôle des ostéoblastes grâce à la voie RANK-Ligand (Receptor Activator of Nucellaire factor-KB ligand) modulée par l'ostéoprotégérine.
Une équipe dirigée par le Dr Kurt Redlich, de l'université médicale de Vienne (Autriche), a voulu savoir si le récepteur chimiokine CCR2, exprimé sur les ostéoclastes, joue un rôle dans l'ostéoclastogenèse.
« Nous avons montré que le récepteur chimiokine CCR2 joue un rôle important dans l'homéostasie de l'os, tant dans des conditions physiologiques que pathologiques », explique au « Quotidien » le Dr Kurt Redlich.
« Les souris KO dépourvues de Ccr2 présentent non seulement une masse osseuse accrue mais aussi des os plus résistants aux fractures. Ce phénotype est causé par un nombre réduit d'ostéoclastes résorbant l'os, qui sont en outre moins capables de résorber l'os. »
« Plus important encore, nous avons pu montrer dans un modèle murin d'ostéoporose, que les souris KO dépourvues de Ccr2 sont protégées de l'ostéoporose induite par le déficit en estrogènes (après ovariectomie). Cela procure de nouveaux outils thérapeutiques pour le traitement de l'ostéoporose. »
Les chercheurs montrent que chez les souris normales, l'activation de CCR2 (par les cytokines MCP-1 ou MCP-3) sur les précurseurs des ostéoclastes déclenche le signal NF-kappaB et ERK1/2, ce qui conduit a une augmentation d'expression de RANK à la surface cellulaire, et amène de ce fait les progéniteurs à être plus sensibles à l'induction de l'ostéoclastogenèse par RANK-L.
Les effets des estrogènes.
Alors qu'il a été montré précédemment que les estrogènes diminuent l'expression de CCR2 sur les monocytes, l'étude indique que le déficit en estrogène (après ovariectomie) augmente l'expression de CCR2 sur les pré-ostéoclastes, ainsi que l'expression de RANK sur les cellules de la moelle osseuse.
CCR2 procure une cible thérapeutique
« Parmi les thérapies utilisées pour diminuer l'ostéoporose postménopausique médiée par les ostéoclastes, une récente approche a consisté à inhiber la voie RANK- RANKL en utilisant un anticorps humain dirigé contre RANKL », notent les chercheurs. « Toutefois, l'inhibition prolongée de RANKL pourrait affecter aussi le remodelage physiologique de l’os. En effet, les souris déficientes en RANK ou RANKL sont totalement dépourvues d'ostéoblastes et sont incapables de générer une structure osseuse normale », indiquent-ils.
« Interférer avec la cascade de signal conduisant à l'expression de RANK, sans complètement l'inhiber, pourrait offrir une stratégie thérapeutique alternative », proposent-ils.
Ils citent, à l'appui de cette approche, l'association observée entre un variant (SNP) de CCR2 et une masse osseuse plus élevée chez les femmes ménopausées.
« Nous pensons donc que le fait de cibler le CCR2 en tant que régulateur du signal RANK, afin de traiter l'ostéoporose induite par le déficit en estrogène, pourrait avoir l'avantage de réduire la formation d'ostéoclastes et la résorption osseuse pathologique sans complètement compromettre l'équilibre osseux. »
Les chercheurs envisagent maintenant d'étudier le rôle de Ccr2 dans d'autres formes d'ostéoporose, telle que la perte osseuse induite par les glucocorticoïdes. Ils chercheront également à savoir si des anticorps bloquant le CCR2 peuvent être efficaces dans le traitement de l'ostéoporose.
Nature Medicine, Binder et coll., DOI: 10.1038/nm.1945
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