Face à un patient présentant des symptômes du bas appareil urinaire (SBAU), un bilan initial est indispensable pour affirmer que ces symptômes sont liés à une hypertrophie bénigne de la prostate (HBP), pour apprécier la gêne qui en découle et pour rechercher une obstruction sous-vésicale compliquée, comme le préconisent les recommandations de l’Association française d’urologie (1). Les explications du Pr Aurélien Descazeaud.
Entretien avec le Pr Aurélien Descazeaud (Limoges) *
La prévalence de l’HBP reste mal connue sans doute en raison du caractère non consensuel de sa définition, qui rend difficile l’interprétation des études épidémiologiques. Si elle se définit histologiquement par une hyperplasie fibromusculaire et glandulaire des zones de transition et périurétrale de la prostate, sa définition clinique est plus imprécise. Plusieurs composantes sont en effet intriquées - augmentation du volume prostatique, obstruction sous-vésicale et SBAU- dont les relations sont parfois complexes. Il est ainsi tout à fait possible d’avoir une HBP sans symptômes tout comme des SBAU non liés à une HBP. En pratique, l’ HBP est considérée comme clinique si le patient présente des SBAU gênants et que ces symptômes peuvent être reliés à une HBP par des arguments cliniques et paracliniques. Le bilan initial vise ainsi à répondre à plusieurs questions : affirmer que les SBAU sont en relation avec une HBP, évaluer leurs conséquences et rechercher une obstruction sous-vésicale compliquée.
L’interrogatoire est essentiel pour préciser la nature des SBAU. La réalisation du score symptomatique tel que l’IPSS (International Prostate Score Symptom) permet d’apprécier la sévérité des symptômes et leur impact sur la qualité de vie du patient. Certains antécédents doivent faire évoquer une étiologie autre que l’HBP dans la survenue de SBAU: diabète, maladie de Parkinson, prise de psychotropes, tabagisme....L’interrogatoire doit aussi évaluer la fonction sexuelle, qui peut être perturbée tant par les SBAU que par les éventuels traitements de l’HBP. Il doit être complété par un examen clinique comprenant un toucher rectal, la recherche d’un globe vésical ou d’une anomalie des organes génitaux externes et un examen d’urines par bandelette ou un examen cytobactériologique urinaire. Une débitmétrie et une mesure du résidu postmictionnel sont également recommandées lors du bilan initial. Le catalogue mictionnel n’est pas systématique, mais il est très utile lorsque les symptômes de la phase de remplissage prédominent (nycturie, pollakiurie, urgenturie, incontinence par urgenturie).
Dosage de PSA
Quant au dosage du PSA, il est optionnel lors du bilan initial mais recommandé lorsqu’un traitement chirurgical est envisagé, en informant le patient des conséquences d’un diagnostic de cancer de la prostate. De même, l’échographie de l’appareil urinaire et le dosage de la créatininémie ne sont recommandés de façon systématique qu’en préopératoire. Enfin, le bilan urodynamique avec mesure pression-débit n’a que de rares indications, essentiellement lorsqu’une chirurgie de l’HBP est envisagée chez des patients ayant par ailleurs une pathologie neurologique.
Le bilan initial permet le plus souvent le diagnostic différentiel de l’HBP. Chez un homme ayant une obstruction sous-vésicale et une augmentation du volume de la prostate, les SBAU peuvent de façon licite être rattachés à une HBP. Dans les autres cas différentes causes doivent être évoquées, notamment une pathologie vésicale, une affection neurologique voire un simple vieillissement vésical provoquant une hyperactivité vésicale. L’obstruction sous-vésicale peut, elle, être d’origine neurologique, prostatique autre qu’une HBP (maladie du col, prostatite aiguë, cancer évolué) ou urétrale (sténose, traumatisme). Enfin, une rétention vésicale aiguë ou chronique peut découler d’une obstruction sous-vésicale ou d’une hypoactivité vésicale, d’origine neurologique , iatrogène ou secondaire à une distension vésicale aiguë.
L’HBP est une maladie évolutive et les patients ayant une HBP symptomatique, qu’elle soit traitée ou non, doivent bénéficier d’un suivi régulier, et être revus un an après l’examen initial, voire plus précocement en cas d’aggravation des symptômes. Lors du nouvel examen, la réalisation d’un score IPSS et une évaluation de la fonction sexuelle sont recommandées. Le toucher rectal, le catalogue mictionnel, la débitmétrie et la mesure du résidu postmictionnel sont optionnels. Chez les patients recevant un traitement médicamenteux, leur tolérance doit être précisée.
(1) Bilan initial, suivi et traitement des troubles
mictionnels en rapport avec hyperplasie bénigne de
prostate : recommandations du CTMH de l’AFU.
Progrès en urologie (2012) 22, 977—988
*Service de chirurgie urologique et andrologique - CHU Limoges
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