Même si on ne dispose toujours pas de traitement antiviral proprement dit, ces derniers mois ont apporté une meilleure connaissance physiopathologique des complications de le Covid-19, en particulier celles liées à l’inflammation et à l’orage cytokinique, d’où une prise en charge symptomatologique mieux adaptée.
« La prise en charge a fait un grand pas en avant en instaurant systématiquement chez les patients hospitalisés oxygéno-requérants un traitement par dexaméthasone (corticoïdes), un traitement prophylactique par anticoagulants, et en recourant précocement à l’oxygénothérapie à haut débit. Des chiffres confirment ces progrès en septembre puisque si au début de l’épidémie 24 % des patients hospitalisés passaient en réanimation, ils ne sont plus que de 12 % actuellement », se félicite le Pr Yazdan Yazdanpanah, infectiologie à l'hôpital Bichat (Paris).
Anticoagulation préventive et corticoïdes
Dès le début de l’épidémie, des observations ont fait état du surrisque de complications thrombo-emboliques et en particulier d’embolies pulmonaires sévères chez les patients hospitalisés. Le GIHP (Groupe d’intérêt en hémostase périopératoire) et le GFHT (Groupe français d’études sur l’hémostase et la thrombose) ont publié dès le mois d’avril des propositions sur la prévention de la maladie thrombo-embolique. Un bilan d’hémostase est désormais la règle dès l’admission, de même que la recherche de facteurs de risque liés au terrain (cancer, antécédents thrombo-emboliques veineux ou artériels, obésité, alitement prolongé, etc.) et ceux liés au Covid-19 (forme sévère, ventilation assistée, syndrome inflammatoire important) pour instaurer une anticoagulation prophylactique systématique dans ces formes graves même si on ne sait pas encore si les posologies habituellement utilisées sont suffisantes dans les formes sévères de la maladie et chez les patients obèses.
Par ailleurs, il a été clairement mis en évidence que l’intensité de l’inflammation avec des taux élevés de cytokines pro-inflammatoires est un facteur péjoratif, et il est devenu de bonne clinique lors de l’hospitalisation de faire un bilan biologique de l’inflammation, dont les résultats peuvent moduler la prise en charge.
Plusieurs essais cliniques, dont un mené en France, ont fait la preuve de l’efficacité des corticoïdes, et une méta-analyse toute récente confirme la réduction de la mortalité à un mois chez des patients Covid-19 pris en charge en réanimation. Globalement, l’étude montre une amélioration de la survie de 20 % pour les patients recevant des corticoïdes par rapport au traitement standard. Ces résultats ont amené l’OMS à recommander les corticoïdes systémiques pour le traitement des patients atteints de Covid-19 sévères.
Les immunomodulateurs anti-IL6 ou IL-1, qui ont été utilisés rapidement pour lutter contre la « tempête immunitaire », semblent avoir une certaine efficacité mais le niveau de preuve reste plus faible. On attend les résultats de l’étude multicentrique française Corimuno-19 évaluant le tocilizumab dans les formes graves du Covid-19. Les antiviraux n’ont jusqu’ici pas vraiment convaincu et le niveau de preuve est très faible pour le remdésivir.
L’interféron, de par son rôle anti-inflammatoire, pourrait avoir une certaine action. Même s'il n’a pas fait ses preuves en IV et en association avec lopinavir/ritonavir dans Discovery, « l’interféron par voie inhalée pourrait constituer une alternative thérapeutique intéressante mais une étude plus large doit le confirmer », commente le Pr Yazdan Yazdanpanah.
Une fenêtre d’opportunité thérapeutique
Les données se sont aussi affinées concernant l’oxygénothérapie. L’étude française ProCov montre l’intérêt, s’ils la tolèrent, de la position en décubitus ventral chez les patients hospitalisés mais ne relevant pas de la réanimation. Une autre étude française récente montre que l’oxygénothérapie à haut débit instaurée rapidement dès les premiers signes d’hypoxie pourrait diminuer d’un tiers le recours à l’intubation.
« D’une manière générale, il est important de respecter la fenêtre d’opportunité thérapeutique et nous devons encore affiner le moment optimal pour instaurer les traitements », poursuit l’infectiologue. Ainsi les corticoïdes peuvent être délétères s’ils sont donnés trop tôt, et l’OMS préconise de ne pas les utiliser dans les formes non sévères. Les immunomodulateurs n’ont une place éventuelle qu’au stade de dérèglement immunitaire, tandis que l’interféron ne serait efficace qu’à certains stades de la maladie avant les stades sévères.
Article suivant
Le profil des patients à risque mieux cerné
Moins de passages en réanimation grâce à une meilleure prise en charge des formes sévères
Le profil des patients à risque mieux cerné
Le taux de micro/nanoplastiques dans l’athérome carotidien est associé à la sévérité des symptômes
Dans la cholécystite, la chirurgie reste préférable chez les sujets âgés
Escmid 2025: de nouvelles options dans l’arsenal contre la gonorrhée et le Staphylococcus aureus
Yannick Neuder lance un plan de lutte contre la désinformation en santé