CONTRIBUTION - Nos collègues birmans nous appellent à l’aide pour faire connaître ce que depuis six semaines la population en révolte subit. Depuis 40 ans l’AMFA (association médicale franco asiatique) que je préside aide des hôpitaux dispensaires. Nous avons formé médecins et infirmières et ils sont en service dans les services de réanimation et blocs opératoires dans tout le pays. Nous aidons la chirurgie traumatologique et cardiaque et aidons le fonctionnement de 23 dispensaires que nous avons construits.
Le coup d’État militaire du 1er février organisé le jour où le nouveau parlement élu démocratiquement devait se réunir a permis aux militaires d’arrêter beaucoup de députés et la conseillère Mme Aung San Suu Kyii. Il faut rappeler que les élections de novembre avaient permis au NLD d’avoir 88 % des sièges. Pour l’armée, ils perdaient la majorité leurs postes et surtout leurs immenses revenus puisqu’ils sont dans tous les groupes d’affaires et de construction et bénéficient les revenus du gaz vendu à la Thaïlande et la Chine. Le général qui a fait le coup touche d’énormes revenus, ainsi que d’autres généraux
Dès le premier jour, le mouvement de désobéissance civile CDM a été déclenché par les médecins et infirmières dans les principales villes Yangon et Mandalay puis dans tout le pays : les hôpitaux publics ont été fermés puis très vite les administrations et services ont fait de même. Des manifestations pacifiques et spontanées se sont organisées dans tout le pays. La police et l’armée ont commencé à arrêter et ils ont utilisé canons à eau et balles en caoutchouc, grenades assourdissantes et gaz lacrymogène. Mais devant l’ampleur des manifestations, ils ont commencé à utiliser des tireurs d’élite qui visent la tête ou le thorax pour tuer et effrayer la population : certains morts sont très jeunes car toute la jeunesse est dehors ; ils ne veulent plus de la dictature militaire.
Hôpitaux occupés par l'armée, médecins arrêtés
L’armée emporte les blessés et ils sont déclarés morts dans les prisons ou postes de police. Des ambulances ont été détruites et les médecins passés à tabac ou arrêtés. Des médecins ont été arrêtés aussi pour désobéissance ; des directeurs médicaux qui ont refusé de réouvrir leurs établissements aussi
Plus grave : l’armée a occupé les hôpitaux pour y établir ses camps, étant ainsi au cœur des villes et de la population. Les médecins grévistes sont soit arrêtés soit cachés ou en fuite. Certains dans des hôpitaux privés soignent gratuitement blessés ou malades.
Nous sommes plusieurs médecins français ou allemands à aller depuis des dizaines d’années en Birmanie nous connaissons bien nos amis médecins et les hôpitaux. Nous ne pouvons pas accepter que l’armée birmane occupe les hôpitaux, ne laisse pas les ambulances secourir les blessés, arrête des médecins et infirmières, que des tireurs d’élite tuent des manifestants pacifiques en visant la tête et le thorax avec des armes de guerre, c’est-à-dire pour tuer des innocents :
Tout ceci est contraire à des conventions internationales. Ce sont des crimes contre l’humanité. Depuis plusieurs semaines, l’armée birmane est en train de massacrer une population calme, pacifique, bouddhiste. Faites-le savoir : c’est ce que demandent les médecins birmans.
Cette contribution n’a pas été rédigée par un membre de la rédaction du « Quotidien » mais par un intervenant extérieur. Nous publions régulièrement des textes signés par des médecins, chercheurs, intellectuels ou autres, afin d’alimenter le débat d’idées. Si vous souhaitez vous aussi envoyer une contribution ou un courrier à la rédaction, vous pouvez l’adresser à jean.paillard@lequotidiendumedecin.fr.
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