La Caisse nationale d'assurance-maladie (CNAM) a présenté ce mercredi aux syndicats de médecins libéraux plusieurs pistes pour revaloriser les tarifs de certains actes techniques.
Selon un document de travail, dont « le Quotidien » a eu copie, l'Assurance-maladie propose en premier lieu une évolution des modificateurs J (+6,5 % pour les actes sanglants non répétitifs, accessibles à tous les médecins) et K (+11,5 % aujourd'hui réservés aux seuls praticiens à tarifs opposables et pour les accouchements), utilisés notamment par les chirurgiens.
La CNAM propose de porter le K à 15 % (+ 3,5 points) pour revaloriser les actes lourds des chirurgiens et gynécologues-obstétriciens de secteur I ou en CAS.
Elle suggère de permettre l'usage des deux modificateurs à 34 actes qui n'en bénéficient pas actuellement. La CNAM cite les interventions réalisées sous arthroscopie comme la libération mobilisatrice de l'articulation tibiotalienne ou des exérèses de lésions tumorales.
En contrepartie, la CNAM souhaite que les modificateurs J et K ne soient plus appliqués pour cinq actes thérapeutiques non sanglants ou qui ne nécessitent pas l'utilisation d'un plateau technique lourd.
Les modificateurs d'urgence doublés
La Caisse propose par ailleurs de revaloriser de 5 % des actes ciblés à fort impact de santé publique comme la chirurgie carcinologique lourde ou la chirurgie reconstructrice pour cancer (comme la reconstruction mammaire) ou pour pathologie congénitale. Ces hausses ne concerneraient que les praticiens en secteur I ou adhérant au contrat d'accès aux soins.
Un modificateur pourrait être créé pour les actes de chirurgie lourde des enfants de moins de 4 ans d'un montant de 23 euros et l’obésité morbide, facteur compliquant des interventions, pourrait être prise en compte dans la tarification.
La CNAM veut par ailleurs revoir à la hausse les modificateurs d’urgences chirurgicales et obstétricales. Les tarifs seraient doublés pour les actes réalisés en nuit profonde (S, de 40 à 80 euros), les actes réalisés de 20 h à minuit (U, de 25,15 à 50 euros) et pour les actes réalisés les dimanches et jours fériés (F, de 19,06 à 40 euros).
Saupoudrage
Ces pistes peuvent sembler intéressantes à première vue mais l'Assurance-maladie s'est gardée de préciser le montant de l'enveloppe allouée à ces hausses de tarifs. Et la profession est unanime pour les rejeter en bloc.
« La CNAM est dans une logique d’enveloppe fermée, déplore le Dr Jean-Paul Ortiz, président de la CSMF. Les propositions de l'Assurance-maladie, pour les chirurgiens, ne vont rien changer en secteur II et seront très marginales en secteur I. » Les actes pouvant bénéficier des modificateurs J et K « ne représentent rien du tout », ajoute le patron de la confédération, qui observe que la lithotripsie extracorporelle, un « acte très courant », ne pourrait plus bénéficier des deux modificateurs. « Bref, rien ne bouge, on ne négocie toujours pas », a regretté Jean-Paul Ortiz.
La FMF est également très critique. « Nicolas Revel fait des propositions de revalorisation sur des actes qui ne sont pas ou peu pratiqués, et diminue les actes les plus courants, s'emporte son président le Dr Jean-Paul Hamon : la revalorisation de la prothèse de cheville pratiquée par une poignée d’orthopédiste en est le meilleur exemple ! »
Le patron de la FMF dénonce le « saupoudrage » de modificateurs tarifaires et s'emporte de voir de nouvelles promesses de révision de la CCAM en 2017 : « le passage au tarif cible doit avoir lieu maintenant pour tous les spécialistes », conclut-il.
La colère du BLOC
Le SML regrette toujours la « stigmatisation » du secteur II et continue de réclamer l'ouverture d'un espace de liberté tarifaire pour compenser le blocage tarifaire de certains actes techniques.
Consterné par la tournure des événements, le BLOC, qui représente les spécialistes des plateaux techniques, a quitté la séance pour exprimer son mécontentement. « C'est clair, c'est confirmé, l'assurance-maladie veut continuer à dérembourser les actes de chirurgie, confie au « Quotidien » le Dr Bertrand de Rochambeau, co-président du BLOC. Les propositions de la Caisse ne riment à rien ! »
Selon le syndicaliste, la Caisse n'a fait aucun effort financier, la hausse du K ne représentant selon qu'un « rattrapage de l'inflation » depuis 2005. Pire, l'assurance-maladie projette de réévaluer seulement 34 actes sur les 1 500 que compte la CCAM technique en réduisant les actes fréquents. « La chirurgie pédiatrique concerne moins de 100 praticiens en France et les urgences de nuit que l'on projette de majorer, sont davantage réalisées par les hôpitaux publics sous la houlette des ARS. Il n'y a rien pour nous là-dedans, c'est de la manipulation, on ne peut pas accepter ça », fulmine le Dr de Rochambeau.
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