Le point de vue de Marie-Pierre Bichet

Maladies rares : le modèle français est unique, mais les défis à relever restent multiples

Publié le 04/03/2022
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L’Alliance maladies rares, collectif qui rassemble plus de 240 associations de maladies rares salue l’excellence de la prise en charge en France dans les centres de référence. Sa présidente appelle à un 4ème Plan National Maladies Rares pour répondre aux nombreux défis posés par la rareté de ces pathologies.

Crédit photo : DR

C'est un modèle unique en Europe : les trois Plans Nationaux Maladies Rares ont permis la création de 387 centres de référence (CRMR) et de 1 844 centres de compétence maladies rares (CCMR), prochainement relabélisés par le ministère de la Santé, de 23 filières de santé maladies rares (FSMR), de 4 plateformes de coordination en Outre-Mer et plus récemment de 19 Plateformes d’Expertise Maladies Rares en région. Si ce maillage d’excellence a représenté un énorme bond en avant pour les malades et leurs familles, des enjeux persistent autour de l’errance diagnostique, de l’errance thérapeutique et du parcours de soins.

Dans son enquête Erradiag, l’Alliance a fait le constat d’une errance diagnostique de 4 ans pour un quart des personnes malades, personnes qui déclarent subir des préjudices physiques et psychologiques et dont un tiers dit avoir subi un retard sur le conseil génétique (75 % des maladies rares sont d’origine génétique). Autre constat pour le moins préoccupant, 95 % des maladies rares ne bénéficient toujours pas de traitement curatif. Le parcours de soins pour une personne avec une maladie rare est lui aussi impacté par la rareté de la maladie, entraînant notamment isolement et ruptures de soin.

Une enquête conduite par l’institut Viavoice auprès des malades et des associations menée pour l’Alliance maladies rares à l’automne 2021 illustre une belle satisfaction de la part des malades et de leurs associations, que ce soit pour le diagnostic, l’organisation des soins ou les traitements. 77 % d’entre eux sont satisfaits des informations reçues au moment du diagnostic, 77 % d’entre eux se disent satisfaits par la qualité des soins proposés, 68 % sont satisfaits par l’accompagnement humain durant le traitement. En outre, 75 % des personnes malades sont satisfaites de la rapidité de la prise en charge en centre de référence (66 % ont attendu moins de trois mois leur première consultation) et 83 % par la durée des consultations.

Des protocoles nationaux encore trop peu nombreux

L’enquête a cependant mis en lumière différents points d’améliorations qui doivent faire l’objet d’une prise en compte attentive à l’avenir.

Ainsi, les réponses des personnes interrogées plaident en faveur d’une meilleure coordination ville-hôpital. En effet, 41 % des malades ne sont pas satisfaits de la coordination entre leur médecin généraliste et le centre de référence, 53 % des associations ne sont pas satisfaites de la coordination entre le centre de référence et les structures de ville (médecins libéraux, établissements médico-sociaux, administrations, etc.) et 46 % des associations ne sont pas satisfaites de l’organisation de la transition entre service pédiatrique et service adulte.

Les réponses montrent aussi la nécessité de développer des réunions de concertation pluridisciplinaires (RCP) pour les maladies rares, maladies souvent multifactorielles.

Enfin, l’Alliance maladies rares et ses associations font trop souvent le constat que l’ensemble de ces dispositifs maladies rares d’excellence, CRMR, CCMR, FSMR, sont toujours mal connus et insuffisamment sollicités. Il en est de même pour le site d’Orphanet et la ligne d’écoute Maladies Rares Info Services. C’est la raison pour laquelle l’Alliance maladies rares a décidé d’aller à la rencontre des professionnels de santé dans chaque région en 2022 afin de faire connaître ces dispositifs essentiels.

Forte de cette excellence française et des constats perçus, et compte tenu de la fin prochaine du PNMR 3 en 2022, l’Alliance maladies rares appelle de ses vœux une prolongation de ce 3e plan sur l’année 2023, permettant une pérennisation des actions phares de ce plan. Il s’agit notamment de l’observatoire du diagnostic, de l’observatoire des traitements, essentiels pour remédier aux errances identifiées, mais aussi des appels à projets pour développer les PNDS (protocoles nationaux de diagnostics et de soins), encore trop peu nombreux et les programmes d’ETP (Éducation thérapeutique du patient), outils absolument essentiels pour favoriser une prise en charge optimale et une amélioration de la qualité de vie des personnes malades et de leurs proches.

https://www.alliance-maladies-rares.org/
Ligne d’écoute :  https://www.maladiesraresinfo.org/ 01 56 53 81 36

Marie-Pierre Bichet, Présidente de l'Alliance des maladies rares et présidente de l'Association française de la maladie de Fanconi (AFMF)

Source : Le Quotidien du médecin