En juin dernier, le géant mondial des technologies médicales Philips avait retiré du marché une douzaine de modèles d'appareils de ventilation mécanique, destinés aux patients atteints d’apnée du sommeil ou nécessitant une assistance respiratoire. En cause, la présence d’une mousse antibruit, potentiellement néfaste, qui selon la société néerlandaise, pourrait provoquer des effets immédiats : irritations de la peau, des yeux, des voies respiratoires, réactions inflammatoires, céphalées, asthme…
Décision de police sanitaire
Alors que la firme nééerlandaise avait promis de remplacer rapidement les appareils des 370 000 Français concernés, sept mois plus tard, force est de constater que la promesse n’a pas été tenue. Au 4 février, seuls 7 % des respirateurs défectueux ont été changés, selon l’Agence nationale du médicament (ANSM), qui s'impatiente. « Philips ne respecte pas ses engagements », a déclaré le 8 février Caroline Semaille, directrice adjointe de l’Agence, pour qui la situation n'est « plus acceptable ». En novembre dernier, Philips avait pourtant estimé pouvoir remplacer 50 % du parc des dispositifs concernés à la fin du premier trimestre 2022, 75 % à mi-2022 et 100 % fin 2022.
Face au manque de réactivité de l’entreprise, l’ANSM a décidé de frapper du poing sur la table. L’agence va, dans les prochains jours, engager une « décision de police sanitaire ». Concrètement, Philips s'exposera à des poursuites pénales s'il ne respecte pas le calendrier imposé par l'autorité. Celle-ci exige que le groupe ait remplacé trois quarts des appareils d'ici à fin juin. Elle lui demande aussi de lancer une étude pour évaluer précisément les risques, en particulier ceux de cancer. Demande déjà formulée en juin denier.
Dégradation de la mousse
Dès 2020, le groupe avait reçu plusieurs plaintes notamment aux États-Unis. Environ 0,03 % des utilisateurs de ces appareils avaient constaté « la présence de résidus/particules noirs dans le circuit d’air provenant de la sortie d’air de l’appareil, de l’humidificateur, du circuit et du masque », rapportait Philips en juin dernier.
La société avait assuré à l’ANSM avoir mis en évidence deux risques : l'un lié à l’exposition à deux composés organiques volatils ainsi qu’un risque d’exposition aux particules issues de la dégradation de la mousse. Sauf qu’à date, « il n’existe pas de données toxicologiques sur ces deux substances dans la littérature », précise l’ANSM.
Le risque cancérogène à l'étude
Depuis quelques jours, la presse se fait écho de témoignages isolés de personnes atteintes de cancer après avoir utilisé ces appareils, même s'il est impossible d'établir un lien de cause à effet. L’agence française précise toutefois qu’« au vu des données transmises par Philips, un risque cancérigène après une exposition à long terme des dispositifs concernés ne peut être exclu », mais que ce risque cancérigène « n’est pas avéré ».
Une fois de plus, l'ANSM réclame des « données consolidées » au groupe. « Pour l'instant, les résultats (...) ne montrent pas de sur-risque », rapporte Caroline Semaille, sur la foi de données canadiennes. L'ANSM souhaite toutefois disposer de ses propres éléments et envisage d'engager à ce titre une étude en France à partir des données de l'Assurance-maladie. Elle va aussi, dans l'immédiat, se doter d'un comité d'experts chargés d'évaluer le dossier.
Vent de panique
Face à la sévérité des pathologies traitées par ces appareils vitaux, les autorités sont conscientes qu'elles peuvent créer un vent de panique chez les utilisateurs, plus délétère que les risques hypothétiques de cancer. « Il vaut mieux conserver un appareil défectueux plutôt que ne plus avoir d'appareil du tout, a prévenu Caroline Semaille. Ce qu'on ne souhaite pas, c'est qu'il y ait une vague alarmiste. » L'ANSM appelle les patients à ne surtout pas arrêter leur traitement, et invite les pneumologues et prestataires de soins à domicile à informer leurs patients concernés.
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