Cette étude multicentrique publiée dans la revue Lancet HIV (1) et conduite au Massachusetts General Hospital (Boston) et au National Institutes of Health (NIH) montre des résultats intéressants en faveur de la tésamoréline par rapport au placebo. Son administration précoce permet de prévenir l’évolution de la stéatose vers la fibrose dans une population considérée à haut risque.
Les patients vivant avec le VIH ont une prévalence élevée de stéatose hépatique non-alcoolique (Non-Alcoholic Fatty Liver Disease, NAFLD), caractérisée par une accumulation de graisse dans le foie. La NAFLD peut progresser vers des lésions inflammatoires (ou NASH) puis une fibrose de sévérité variable ; la cirrhose étant le stade ultime de la fibrose (F4). La NAFLD est associée à des perturbations métaboliques (résistance à l’insuline) et à un risque accru de maladies cardiovasculaires. Dans ce cadre s’inscrit la lipodystrophie fréquemment observée chez les patients infectés par le VIH et le plus souvent induite par le traitement antirétroviral. C’est une accumulation de graisse viscérale dans l’abdomen en lien avec une perturbation de la sécrétion pulsatile de l’hormone de croissance (GH).
L’équipe du Dr Steven Grinspoon (Massachusetts General Hospital, Boston) a développé, il y a plus de 10 ans, un nouveau traitement contre la lipodystrophie des patients VIH-infectés : la tésamoréline, un analogue hypothalamique de la GHRH, qui provoque la libération de l’hormone de croissance. Ce médicament restaure la pulsatilité naturelle de l’hormone de croissance et réduit la quantité de graisse viscérale (de 15 a 20 %) chez les patients infectés par le VIH.
« La tésamoréline, un médicament déjà approuvé pour le traitement d’autres complications du VIH, pourrait traiter efficacement la stéatose hépatique non alcoolique », commente dans un communiqué le Dr Anthony S. Fauci, directeur du National Institute of Allergy and Infectious Diseases (NIAID), l’un des instituts du NIH qui a soutenu financièrement l’étude.« Nous avons conduit une nouvelle étude évaluant la tésamoréline chez des patients VIH ayant une NAFLD », explique le Dr Grinspoon. L’étude multicentrique, randomisée en double aveugle porte sur 60 patients infectés par le VIH et ayant une NAFLD (fraction graisseuse hépatique ou FGH > 5 %).
À l’inclusion dans l’étude, 33 % présentaient une stéatose hépatique avec des lésions inflammatoires (NASH) ; 43 % une fibrose de stade 1 à 3 et aucun patient n’avait une cirrhose. La population a été divisée en deux bras de traitement : tésamoréline (2 mg/j en sous-cutané) ou placebo.
Réduction de la fibrose
Au bout d’un an, il a été observé une réduction de 32 % de la quantité de graisses dans le foie (critère de jugement principal) dans le bras de traitement actif alors qu’une augmentation de 5 % était notée sous placebo. De plus, les lésions de stéatose avaient disparu chez 35 % des patients traités par tésamoréline (FGH baissant en dessous de 5 %) contre seulement 4 % dans le groupe placebo. Et surtout, elle a réduit la progression de la fibrose sur un an, avec seulement deux patients (11 %) du groupe tésamoréline présentant une progression de la fibrose, contre 9 patients (38 %) dans le groupe placebo. Le profil de tolérance de la tésamoréline est bonne et la sensibilité à l’insuline ne s’est pas majorée à un an. Toutefois, les auteurs préconisent la prudence avec surveillance étroite de la glycémie. « Nous envisageons de réaliser une grande étude de phase 3, afin d’élargir l’indication de la tésamoréline à la NAFLD dans l’infection VIH. De plus, nous étudions l’effet de la tésamoréline dans la population obèse, non infectée par le VIH», confie au « Quotidien » le Dr Grinspoon.« Nous demanderons bientôt à rencontrer la Food and Drug administration (FDA) et l’Agence européenne des médicaments afin de confirmer l’approche pour l’étude clinique de phase 3, requise pour obtenir l’autorisation de la tésamoréline dans le traitement de la
NAFLD/NASH », explique Luc Tanguay, président de Theratechnologies, la société pharmaceutique québécoise qui a développé la tésamoréline (Egrifta).
(1) T.Stanley et al., The Lancet HIV, 10.1016/PII, 2019
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