FAUT-IL JETER la pierre aux Allemands ? Rien n’est simple. L’opinion allemande est durablement scandalisée par un peuple passé maître dans l’évasion fiscale, par un pays dont un tiers de la production relève du travail au noir, qui a truqué ses comptes pour entrer dans l’Union puis dans la zone euro et qui supplie aujourd’hui le plus probe des pays européens de voler à son secours. Angela Merkel sait fort bien que mener la vie dure au Grecs relève du masochisme : à la fin des fins, la Grèce est un marché pour l’Allemagne et l’immense vertu économique des Allemands ne peut prospérer dans un environnement gravement dégradé. Mais, à la veille d’élections partielles en Allemagne, dans un contexte politique compliqué par une coalition entre les conservateurs et les libéraux plus difficile à gérer que l’ancienne coalition avec le SPD, Mme Merkel est bien obligée de survivre politiquement, avant même d’avoir un avis sur la question grecque.
Les insuffisances du traité.
Il n’empêche : le résultat des procrastinations de Berlin est désastreux, même si le gouvernement allemand présente d’excellents arguments. C’est la faute de tous les Européens. Il est surprenant que le cas d’une faillite nationale, toujours possible dans ce monde dangereux, ne soit pas prévu par le traité de Lisbonne ; qu’aucune clause ne prévoie une aide européenne à un membre défaillant de l’UE ; et que, en somme, les critères de Maastricht (3 % maximum du produit intérieur brut de déficit budgétaire, 2 % maximum d’inflation, et une dette de 60 % maximum du PIB annuel) ne représentent que l’hypothèse la moins réaliste. La crise de 2008-2009 a balayé les critères qui, cette année ne sont respectés par aucun pays membre, pas même l’Allemagne. Peut-être personne n’a-t-il vu venir la crise, mais il aura fallu énormément de complaisance, au sein de la Commission de Bruxelles pour qu’elle accepte les comptes truqués de la Grèce. La faillite grecque n’est pas un phènomène naturel. On aurait dû la voir venir.
Est-ce que cela signifie qu’il faille punir les Grecs et les laisser sombrer dans leur océan de dettes ? Il ne s’agit pas d’avoir, pour ce peuple en particulier, les yeux de Chimène, il s’agit de prendre les mesures les plus raisonnables dès lors que le mal est fait et qu’on ne peut plus y revenir. Chasser les Grecs de la zone ou de l’Union serait considéré comme la forme aboutie de l’impuissance européenne. Leur demander de s’adresser ailleurs, c’est démontrer tout aussi bien qu’un bloc formidable de 500 millions de personnes est incapable de résoudre le problème de 5 millions de Grecs.
IL FAUT FAIRE POUR LA GRÈCE CE QUI A ÉTÉ FAIT POUR LES BANQUES
Alors ? Il faut faire contre mauvaise fortune bon cur. Admettre tout d’abord que Georges Papandréou a pris, non sans courage, des mesures d’une sévérité inouïe qui lui valent des émeutes à Athènes, un mécontentement profond et durable susceptible de menacer l’existence même de son gouvernement. Les Allemands seraient-ils plus heureux si la Grèce sombrait dans le désordre et la violence ou se retrouvait dans une impasse politique ? Ensuite, il faut faire pour la Grèce ce que tous les gouvernements du monde ont fait en 2008 pour les banques : dénoncer leur malhonnêteté, certes, mais aussi les soutenir massivement avec de l’argent frais. Il faut faire ce qu’attendent les marchés, derniers juges en l’occurrence et quoi qu’on dise de leur mauvaise influence. Les marchés veulent voir une Europe solide, qu’aucune crise ne peut terrasser, qui trouve à l’intérieur de ses frontières les ressources nécessaires au rétablissement de l’ordre économique. Les Allemands ont dit : d’accord pour une aide de 45 milliards, mais le Fonds monétaire international doit en verser 15. Le FMI, c’est le médecin des pays en développement, le sauveur des nations irresponsables comme l’Argentine, il n’est pas au service d’un ensemble de nations dont la monnaie rivalise avec le dollar.
Les Grecs ont expié.
Contrairement aux grandes banques qui ont retrouvé la santé en recommençant à nous faire courir des risques, la Grèce a largement expié ses fautes : on n’envie pas le sort des fonctionnaires grecs dont la paie est diminuée de 10 %. L’Allemagne est allée très loin dans sa politique d’attentisme à l’égard de la Grèce. Elle a littéralement mis à l’écart Jean-Claude Trichet, président de la Banque centrale européenne, qui, d’emblée, disait qu’il n’y avait pas là de problème insoluble et que la solution devait venir de l’Europe exclusivement. Elle a tenu à inviter le FMI dans le club des prêteurs. On voit bien où le bât blesse : l’Europe n’est dirigée ni par la Commission européenne, ni par son président, Herman Van Rompuy. Elle est dirigée principalement par l’Allemagne et accessoirement par la France. S’il y avait un Fonds européen pour les urgences financières, si M. Trichet, ou M. Barroso, ou M. Van Rompuy avaient leur mot à dire, l’Allemagne n’aurait pas pu se dresser contre la seule solution qui vaille.
Yannick Neuder lance un plan de lutte contre la désinformation en santé
Dès 60 ans, la perte de l’odorat est associée à une hausse de la mortalité
Troubles du neurodéveloppement : les outils diagnostiques à intégrer en pratique
Santé mentale des jeunes : du mieux pour le repérage mais de nouveaux facteurs de risque