Ce sont deux chiffres apparemment paradoxaux que tente d’éclairer une analyse de l’Institut national d’études démographiques (Ined) sur la surmortalité en 2020, publiée ce 17 mars. D’un côté, Santé publique France (SPF) évalue l’impact du Covid-19 à 65 000 décès en 2020. De l’autre, les données démographiques de France métropolitaine ne font apparaître une surmortalité « que » de 55 000 décès par rapport à 2019 (soit une hausse de 9,2 %).
Les auteurs avancent plusieurs explications à cet écart : une baisse de la mortalité routière en 2020 en raison des restrictions de circulation, un recul d’autres causes de décès (liés à l’épidémie de grippe saisonnière notamment), mais surtout, une partie des décès attribués au Covid concerne des personnes avec comorbidités qui seraient « de toute façon décédées en 2020, même en l’absence d’épidémie de Covid-19 », écrivent les auteurs.
Environ 13 000 décès liés au vieillissement
Pour mener leur analyse, ils ont d’abord révisé et affiné les estimations disponibles. Les données de SPF, notamment, ne prennent pas en compte les décès à domicile, qui pourraient correspondre « à environ 5 % des décès, si l’on s’aligne sur les taux observés à l’étranger : 4 % en Suède, 5 % en Angleterre-Galles, 6 % aux États-Unis ». Ainsi, le bilan de la mortalité liée au Covid-19 en 2020 serait plus proche de 68 000 décès.
Ensuite, sur les 55 000 décès supplémentaires enregistrés par l’Insee en 2020 par rapport à 2019, environ 13 000 décès sont liés au vieillissement de la population « qui s’observe chaque année en l’absence de gain d’espérance de vie », est-il noté. La pandémie n’aurait ainsi entraîné « que » 42 000 décès supplémentaires en 2020, évaluent les auteurs.
Une « probable baisse » des décès attribués à des comorbidités
Pour expliquer l’écart entre les décès liés au Covid-19 (68 000 décès donc) et la surmortalité mise en évidence par l’Insee (42 000), les auteurs évoquent, en plus de la baisse des autres causes de décès, une « probable baisse » en 2020 du nombre de décès attribués à des pathologies qui sont des facteurs de risque pour le Covid-19 : diabète, maladie cardiovasculaire, insuffisance respiratoire chronique, etc. Une partie des décès, attribués au Covid-19, de patients souffrant de ces comorbidités auraient ainsi « de toute façon » eu lieu. « Il faudra attendre de disposer d’une statistique complète des causes de décès pour estimer l’importance de ce phénomène », est-il indiqué.
Reste que la surmortalité observée en 2020 a entraîné un recul de l’espérance de vie à la naissance, comme l’indiquait l’Insee en janvier dernier : de 85,6 ans à 85,2 ans pour les femmes (- 0,4 an) et de 79,8 ans à 79,2 ans pour les hommes (- 0,6 an).
Malgré ce recul, l’analyse de la répartition par âge des décès dus au Covid-19 apparaît proche de celle de la mortalité générale. « En revanche, ce profil par âge du risque de décès s’éloigne sensiblement du profil observé ces dernières années pour la grippe saisonnière, qui épargne davantage les jeunes et les adultes d’âge moyen », relèvent les chercheurs de l’Ined, qui insistent sur le bilan « accablant » de l’épidémie en 2020, « en dépit des mesures prises pour freiner la propagation du virus. »
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