C’EST PRESQUE un cas d’école : comment Pierre Charon a-t-il pu, à lui seul, relancer la rumeur en promettant une contre-attaque du pouvoir et même un procès en utilisant une phrase qu’il prononce, nous dit-on, assez souvent ( « La peur va changer de camp »), alors qu’au même moment Carla Bruni-Sarkozy se rendait à Europe 1 pour affirmer sans réserves que le couple présidentiel ne prendrait aucune mesure, judiciaire ou autre, contre les colporteurs de bobards ? Comment Claude Guéant, secrétaire général de l’Élysée et primus inter pares, qui communique à tout va, a-t-il pu désigner Rachida Dati comme la personne à l’origine de la rumeur, puis dire, après avoir nui publiquement à la réputation de l’ex-ministre de la Justice, que ce qui était vrai la veille ne l’était plus le lendemain ?
Une équipe moins soudée.
Le président a beaucoup de défauts, ce n’est pas un juge implacable. En s’abstenant de limoger Pierre Charon, dont le zèle confine au fanatisme, il a admis que ce conseiller, qui veille plus particulièrement sur son épouse, n’a agi que sous l’emprise de l’amitié. Une rupture avec M. Guéant aurait révélé les failles béantes de son cabinet. Lequel, néanmoins, est beaucoup moins soudé que naguère. La directrice du cabinet, Emmanuelle Mignon ne ferait plus que de la figuration, de même que l’ancienne journaliste Catherine Pégard. M. Sarkozy ne serait plus entouré que de sa garde rapprochée qui comprend M. Guéant, Raymond Soubie (social), Jean-David Levitte (affaires étrangères). Henri Guaino, le chantre d’une Sarkozye mâtinée de nationalisme, serait « fâché » et refuse désormais d’assister à la réunion du matin. Dans ces conditions, que reste-t-il de la dream team censée changer la France ?
Le premier reproche qu’on peut adresser à l’équipe de l’Élysée, c’est que ses membres s’expriment trop souvent. Depuis trois ans, l’opinion constate qu’un ministre a moins d’importance que le conseiller de l’Élysée qui suit ses dossiers. Cette duplication des services a entraîné une confusion dans la communication, les sources dites autorisées se démentant réciproquement. Elle a aussi compliqué la mise en uvre des réformes, notamment parce que, à plusieurs reprises et sur des affaires importantes, l’autorité du Premier ministre n’a pas été respectée. La volonté de M. Sarkozy de s’occuper minutieusement de tous les problèmes a donné des ailes à ses conseillers qui se voyaient comme les détenteurs de la vérité présidentielle au détriment des cabinets ministériels. Le président se réservant par ailleurs la plupart des effets d’annonce, l’actualité présidentielle prend les ministres concernés par surprise. La suppression de la taxe professionnelle a été l’exemple éclatant de la dualité du sommet de l’État. Le chef de l’État l’ a annoncée au cours d’une émission télévisée, sans savoir vraiment combien elle coûtait et de quelle manière on pouvait abolir la taxe et maintenir le niveau des recettes fiscales. La décision de Nicolas Sarkozy a entraîné un travail précipité sur cette réforme qui, lorsque le projet a été présenté à l’Assemblée, était pour le moins incomplet : la recette de la taxe professionnelle finance, pour une bonne partie, les collectivités locales, lesquelles se retrouvaient avec un énorme manque à gagner.
SARKOZY DOIT AVANT TOUT UNIFIER L’ACTION DE L’ÉLYSÉE ET CELLE DES MINISTÈRES
La répétition des erreurs.
Les sénateurs ont donc retravaillé le projet jusqu’à ce qu’il devînt viable. Hâte de M. Sarkozy, dont le cabinet aurait rédigé le projet à marche forcée ? Négligences du ministère de l’Économie ? Le fait est que l’ensemble du gouvernement a donné, à ce moment-là, aux Français une impression d’incompétence, alors qu’il dispose, dans tous les cabinets, de techniciens éprouvés. Et la taxe professionnelle n’est pas le seul cas de projet de loi qui a été retoqué par des parlementaires, critiqué et renvoyé au parlement par le conseil d’État (loi HADOPI sur la propriété culturelle) ou censuré par le Conseil constitutionnel (rejet de la taxe carbone). Certes, tous les gouvernements précédents ont rencontré des difficultés semblables et nous ne pouvons que nous féliciter de disposer des garde-fous juridiques qui empêchent l’adoption de lois imparfaites ou insuffisamment démocratiques. C’est la répétition des erreurs qui fait douter de la qualité du travail gouvernemental. Le pouvoir dispose d’une bonne occasion d’améliorer sa réputation avec la réforme des retraites. C’est un chantier énorme qui va soulever toutes les formes de résistance. Il doit nous prouver qu’il peut les surmonter dans le respect des lois.
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