«XAVIER BERTRAND a fait siennes, devant la presse, le 12 mars, l'ensemble des mesures» pour lutter contre le stress en entreprises, énoncées dans le rapport sur «la détermination, la mesure et le suivi des risques psychosociaux au travail», se réjouit auprès du « Quotidien » le Dr Patrick Légeron, coauteur avec l'économiste Philippe Nasse. «Il va lancer, le plus tôt possible, une enquête nationale afin d'analyser simultanément les conditions de travail (source de stress) et l'état psychologique des salariés. Le ministre attend de premiers résultats pour le début 2009. En identifiant les branches où le stress apparaît supérieur à la moyenne, cette enquête servira à construire un indicateur global des risques psychosociaux, qui constituera le socle du dispositif auquel nous appelons. Il est indispensable d'observer, d'avoir un diagnostic, avant d'expliquer et d'agir. D'ores et déjà, cette volonté d'entreprendre quelque chose indique clairement que le tabou du stress au travail est levé» , a souligné à juste titre Xavier Bertrand.
Des indicateurs spécifiques.
Sept autres points clés figurent dans l'ordonnance du Dr Légeron : utiliser comme indicateurs spécifiques les enquêtes nationales existantes et développer des indicateurs spécifiques supplémentaires à partir des mouvements de main d'oeuvre, des arrêts maladie de courte durée, et en exploitant les rapports de la médecine du travail et des inspecteurs du travail ; lancer des expériences pilotes (investigations) dans la fonction publique ; analyser le rôle des incitations dans le fonctionnement de la branche accidents du travail et maladies professionnelles de la CNAMTS ; recenser les suicides en entreprises et procéder à leur étude psychosociale(« autopsie psychologique ») ; organiser une campagne publique d'information sur le stress ; former des acteurs de détection du mal-être au travail et créer un portail Internet offrant des référentiels de prévention aux salariés et aux employeurs.
Xavier Bertrand va confier l'épidémiologie des suicides à l'Institut de veille sanitaire dès l'année prochaine. Le ministre mettra sur la table de la Conférence sur les conditions de travail (CCT), qui doit se réunir en avril, toutes ces recommandations – il devrait disposer également, à cette époque, du rapport sur la pénibilité au travail du député Jean-Frédéric Poisson (UMP, Yvelines). Il souhaite notamment que soit donné un caractère «obligatoire» à la détection et à la prévention du stress dans les secteurs les plus exposés. A terme, la mise en application de l'ensemble du dispositif fera l'objet d'un suivi (rapport annuel) par le futur conseil d'orientation des conditions de travail voulu par la CCT, espère le Dr Légeron.
Les risques psychosociaux, au coeur de multiples conflits dans le milieu du travail, se développent à la frontière de la sphère privée (psychisme individuel) et de la sphère sociale (collectifs d'individus au travail), soulignent les auteurs du rapport. Le stress en tête, il en coûte, chaque année, entre 800 et 1 600 millions d'euros, selon l'Institut national de recherche et de sécurité.
Nouveau suicide chez Renault

«Marre de compter les copains qui partent», ont déclaré les syndicats CGT et FO du Technocentre de Renault à Guyancourt après un nouveau suicide. Un salarié de 46 ans, employé d'un sous-traitant du Technocentre, s'est donné la mort à la veille de reprendre le travail après un arrêt maladie d'un mois. Selon ses collègues, il était «surmené», «en perte d'estime de lui-même et très amaigri».
Trois suicides sont déjà survenus au Technocentre, un autre employé de Renault s'est donné la mort sur le site d'Aubevoye, dans le Finistère, et deux tentatives ont été enregistrées. Un quart des 12 500 salariés du Technocentre sont des sous-traitants. Selon la CGT, ils «subissent une double pression: celle imposée par l'organisation générale du travail de Renault et celle de leur employeur qui ne veut pas perdre le marché».
L'inspection du travail mène actuellement une enquête sur l'éventualité d'un harcèlement moral institutionnel envers les salariés du Technocentre mais la direction des ressources humaines de Renault rejette cette suspicion. Des mesures ont par ailleurs été prises depuis un an, souligne la DRH, pour être à l'écoute des salariés et alléger les pressions.
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