Élise Lucet dans l'émission « Cash investigation » du 13 janvier, sur le service public, prônait de forcer les médecins à s’installer dans les déserts médicaux et expliquait que les médecins par leurs puissants syndicats faisaient barrage à une telle obligation pour préserver leurs petits intérêts personnels.
Est-ce par insuffisance intellectuelle ou par cynisme dénué de tout scrupule ? Puisque le service public mêle incompétence et cynisme, donnons leurs ici quelques éléments de réflexion.
1) Petits intérêts personnels des médecins ?
S’il devient interdit de s’installer dans certaines régions, à leur départ en retraite, les médecins déjà installés seront assurés de revendre leur patientèle (souvent bien plus de 100k€), alors qu’aujourd’hui, ils ne trouvent pas de successeur. Renoncer à de telles sommes relève-t-il de l’intérêt personnel ? Or les syndicats des médecins libéraux sont constitués presque totalement de médecins déjà installés et qui toucheront un vrai capital à leur départ en retraite en cas d’obligation d’installation. S’ils refusent celle-ci, c’est dans l’intérêt des patients, la suite le montrera.
2) Désert médical ?
En 2022, le premier désert médical de France est officiellement l’Île-de-France.
3) Les puissants syndicats des médecins
Les cheminots ont un puissant syndicat, et leurs grèves sont terribles. Peut-on dire que les médecins ont de puissants syndicats ? Je dirais plutôt que la Nation abuse de la conscience professionnelle des médecins. La continuité des soins est assurée même pendant les grèves, d’autant que les médecins se disent rarement en grève, et ne font jamais effectivement grève. Non comme médecin, mais comme patient, je dis qu’ils ont tort. La médecine fonctionnerait mieux si les médecins savaient imposer le respect.
4) Obliger les médecins à s’installer ici ou là ?
Quand l’Île-de-France devient le premier désert médical, on comprend bien que le problème n’est pas la liberté d’installation : les médecins insultés ne veulent plus s’installer, et cela ne concerne pas que les déserts. Toute la stupidité voulue de « Cash investigation » est là : pour forcer les médecins à s’installer ici ou là, il faut d’abord que des médecins veuillent s’installer tout court. Et un médecin qui s’installe ne compense pas du tout un médecin qui part. Car les médecins ne sont prêts à travailler qu’à hauteur de la reconnaissance qu’on leur porte, et se faire insulter ne motive pas pour sacrifier sa vie de famille.
Le doc-bashing d’Élise Lucet et des autres professionnels de l’audimat, relève du harcèlement moral (avec l’approbation du CSA ?) et décourage forcément l’engagement dans une profession où on se suicide 2,5 fois plus que dans le reste de la population.
La pénurie actuelle sur presque toute la France connaît des responsables politiques et médiatiques. Madame Lucet avait déjà une voix qui portait quand Jacques Barrot a fait un pont d’or pour pousser les médecins à prendre leur retraite à 56 ans. Elle n’a rien dit. Sa voix portait aussi quand on a étranglé le numerus clausus, elle s’est tue car, comme tous les fossoyeurs de la Santé, elle voyait en chaque médecin un pion coûtant de l’argent, et non un soignant.
Il est grand temps que le service public s’excuse et que Madame Lucet retrouve le sens de l’honneur.
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Comme tous les fossoyeurs de la Santé, Elice Lucet voit en chaque médecin un pion coûtant de l’argent, et non un soignant.
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