Vaccination refusée, réclamée, ou imposée ?

Publié le 11/06/2021

Depuis que l’on constate que, coïncidence ou pas, le nombre des hospitalisations et des morts par Covid s’abaisse au fur et à mesure que le nombre des vaccinés augmente, on peut se demander s’il ne serait pas souhaitable, sinon nécessaire, de rendre obligatoire cette vaccination.

Cette proposition suscite un vaste débat où sociologues, politologues, épidémiologistes, commentateurs de tous bords s’affrontent, finissant généralement par conclure que seul compte l’avis des individus concernés, c’est-à-dire des Français(es) en général, de préférence à celui de spécialistes reconnus ou autoproclamés, fussent-ils membres de l’Académie de médecine ou professeur à Marseille.

On peut être pour ou contre cette obligation de vaccination, avec d’excellentes raisons dans un cas comme dans l’autre, qu’il serait trop long d’exposer ici. Toutefois, je m’étonne que, dans les articles que j’ai lus, les déclarations, les débats que j’ai entendus, un argument n’ait jamais été soulevé, du moins à ma connaissance, qui ressort pourtant d’une évidence et d’un bon sens élémentaires.

Point n’est besoin d’être docteur en médecine inscrit au Conseil de l’Ordre pour savoir qu’il existe deux sortes de maladies : celles qui sont contagieuses, c’est-à-dire qui peuvent être transmises à d’autres humains, et celles qui ne sont pas contagieuses, c’est-à-dire qui ne peuvent pas être transmises à d’autres humains.

Un risque électoral ?

Pour ces dernières, les non contagieuses, vous êtes libre d’adopter l’attitude que vous choisirez. Si vous souffrez d’insuffisance cardiaque, de cancer de la prostate, de coxarthrose invalidante, rien ne vous force à vous soigner ou vous faire opérer. Votre maladie entraînera peut-être des désagréments à votre entourage, mais ne lui fera pas courir le risque de la contracter.

À l’inverse, si vous êtes atteint d’une maladie contagieuse, vous pouvez par votre seule présence la communiquer à ceux qui vous côtoient. Pour se protéger ceux-ci pourront vous demander, voire vous obliger, à vous tenir éloigné d’eux, vous laver les mains ou porter un masque, mais la meilleure manière de ne pas inoculer les autres reste de ne pas être inoculé soi-même. Lorsque c’est possible, soigner ou éviter la maladie pour soi est alors le meilleur moyen de l’éviter aux autres.

C’est ainsi que la Covid faisant partie des maladies éminemment contagieuses, la vaccination qui en protège doit être considérée non pas comme une nécessité vis-à-vis de soi-même, chacun restant libre de s’immuniser ou pas, mais comme un devoir vis-à-vis de son prochain, et il serait tout à fait justifié de décréter sa vaccination obligatoire, de même que l’on a décrété obligatoires les vaccinations infantiles ou l’interdiction de fumer dans les lieux publics.

Ces considérations pourraient constituer un plaidoyer efficace vis-à-vis de tous ceux qui, à l’évocation d’une vaccination obligatoire, crient au traçage numérique, à l’atteinte aux libertés fondamentales, à la dictature sanitaire, et évoquent le spectre d’une société orwellienne, où pourtant les problèmes médicaux ne semblaient pas intéresser beaucoup Big Brother.

Toutefois, en cette période électorale, il est peu probable que nos dirigeants décident de prendre une mesure qui pourrait leur faire perdre quelques voix dans les urnes. Il est peu probable également qu’ils deviennent des lecteurs assidus de la rubrique « Courrier des lecteurs » du Quotidien du Médecin.

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Dr Jean-Pierre Brunet, Chirurgien, Evreux (27)

Source : Le Quotidien du médecin